Prix du service méritoire

Le Prix du service méritoire souligne les contributions importantes que des personnes ont faites au secteur muséal canadien tout au long de leur carrière.

Lisa Wolfe et Wendy Fitch affirment toutes deux que recevoir le Prix du service méritoire de l’AMC justifie le « petit ».

« Cela signifie que les petits musées peuvent faire une grande différence. Quand on est reconnu pour l’importance de ce travail, je crois que cela inspire vraiment les gens à continuer de le faire », affirme Wolfe, qui a récemment pris sa retraite après avoir occupé pendant 20 ans le poste de directrice du musée de la ferme Ross [Ross Farm Museum] en Nouvelle-Écosse.

« Le musée a tout intérêt à garder une petite infrastructure, mais il faut quand même penser en grand. Vous n’avez pas à grandir physiquement pour être grand. Parfois, nous devons simplement faire grandir nos idées », dit Mme Wolfe.

« Pour moi, dit Mme Fitch, directrice générale de l’association des musées de Saskatchewan, les personnes qui travaillent avec ces très petites organisations bénévoles font également partie du secteur des musées. Le travail que j’ai accompli avec ces petits musées est important et a fait une différence; il a contribué à dynamiser le secteur des musées canadiens et à l’habiliter à gérer et à communiquer l’histoire de ce pays. »

Depuis des décennies, Wendy et Lisa contribuent à narrer ces histoires, et toutes deux ont cessé juste assez longtemps pour raconter leurs propres parcours professionnels.

De gauche à droite : Wendy Fitch et Lisa Wolfe

Mme Fitch est née à Saskatoon, mais, elle le précise tout de suite, sa famille est originaire de la région de Belcarres-Abernathy, au sud-est de la ville. Ses parents ont déménagé à Red Deer, en Alberta, et c’est là, à l’âge de 16 ans, qu’elle a siégé à son premier conseil d’administration, celui de la bibliothèque publique de la ville.

« C’est en fait comme ça que j’ai commencé dans les musées, parce que l’un des autres membres du conseil d’administration a fini par être le premier directeur du nouveau musée à Red Deer, au début des années 80. »

Il s’agissait d’un emploi d’été au musée de Red Deer, mais plus tard, avec un diplôme en histoire canadienne et en sciences politiques de l’Université de Calgary en poche, elle a rejoint le musée à temps plein, à titre de gestionnaire des collections.

Après un stage au Manitoba, elle a été la première à occuper le poste de conseillère en musées auprès de ce qu’on appelait alors l’association des musées de Saskatchewan. C’était en 1986. C’est là que les racines rurales de sa famille ont vraiment porté leurs fruits.

« En travaillant avec les petits musées de la Saskatchewan, cela m’a été très utile de pouvoir mentionner assez tôt dans la conversation que “ ma famille vient d’un milieu rural, de petites villes ”. Les gens me montraient alors un petit outil et voyaient si je pouvais l’identifier, et heureusement, j’ai une assez bonne mémoire donc je pouvais dire « oh, c’est un grattoir de peau de porc ». Puis s’ensuivait toute une série de questions sur l’agriculture, et ma crédibilité était alors établie. »

Ce test de connaissances sur les outils agricoles lui est arrivé à de nombreuses reprises, se rappelle-t-elle, mais après avoir fait ses preuves, les bénévoles locaux étaient prêts à recevoir ses conseils sur la façon de gérer leurs musées. Elle était souvent la plus jeune personne dans la salle, dit-elle, et « j’ai vraiment dû apprendre à être diplomate, pour les convaincre que, par exemple, attacher les choses avec des punaises n’est pas une bonne idée ».

Elle décrit le travail de conseillère en musées comme étant « la première ligne de contact pour nos membres, principalement pour les petits musées dirigés par des bénévoles, lorsqu’ils ont des questions ou des préoccupations au sujet de la gestion d’un musée. Ils pouvaient venir me voir et nous trouvions une solution. » Ils « travaillaient ensemble pour trouver une solution qui leur permettrait d’être le meilleur musée possible. »

En 2012, elle a été nommée directrice générale de l’association : « Je pense que mon raisonnement était que si je restais assez longtemps, ils me confieraient la responsabilité. »

Avec le recul, elle a éprouvé une grande satisfaction à avoir publié le premier ensemble de normes pour les musées au Canada, et à avoir aidé les petits musées à comprendre comment entreposer et exposer (ou non) de façon respectueuse des artéfacts autochtones. À titre d’exemple, elle mentionne le musée mémorial Clayton McLain de Cut Knife.

« Ils ont ensuite créé leur propre politique de rapatriement, afin d’inclure des membres autochtones dans leur conseil d’administration. Il y a un an, ils ont travaillé en collaboration avec deux Premières Nations pour commémorer en trois parties la signature du Traité Six, et ils ont remporté un prix du mérite de l’association des musées de la Saskatchewan pour ce projet. C’était l’un de ces moments de très, très grande fierté. Je peux dire que j’ai peut-être joué un rôle dans le démarrage de tout cela. »

Avec des origines rurales similaires, Lisa Wolfe a commencé à Timmins, en Ontario, puis elle est partie étudier la biologie marine à l’Université de Guelph. « Et je me retrouve dans une ferme », souligne-t-elle, en plein milieu du sud-ouest de la Nouvelle-Écosse.

N’ayant pas trouvé d’emploi stable dans le domaine de la biologie marine, elle a commencé à travailler avec des organisations commerciales du centre-ville, utilisant les compétences acquises en organisant les bureaux de terrain dans le domaine de la biologie. Le travail de son mari les a amenés en Nouvelle-Écosse et « j’ai constaté que j’aimais beaucoup les aspects éducatifs des choses, alors j’ai commencé à travailler avec les musées. »

En 2000, elle a été embauchée comme directrice du musée de la ferme Ross. Le musée vivant est situé sur un terrain de 60 acres et possède encore les bâtiments originaux d’une ferme familiale établie en 1816. C’est un exemple important des fermes familiales qui se sont établies à l’intérieur des terres, loin des côtes sauvages et accidentées de la Nouvelle-Écosse.

Le musée de la ferme Ross appartient à la province, mais il est géré par la société bénévole New Ross District Museum Society.

« L’un de ses grands attraits est qu’il fonctionne comme si les gens vivaient réellement sur place », dit-elle. Personne ne vit sur la ferme, mais le personnel qui la dirigent et font le travail historique viennent de la collectivité très rurale et possèdent les compétences nécessaires.

La ferme bourdonne d’activités traditionnelles. Elle offre des programmes d’élevage traditionnel de chevaux, de porcs, de moutons et de poulets. Elle a un programme de conservation des semences patrimoniales. On dirait que c’est le genre d’endroit qui ne changera jamais, mais Wolfe dit qu’il a changé.

« Nous avons constaté que ce n’était pas tant le musée qui changeait, mais plutôt nos visiteurs et leurs attentes. »

On pourrait s’attendre à entendre les gens exiger des expériences numériques et une informatisation tape-à-l’œil, mais en fait, ils se précipitent vers l’apprentissage de compétences anciennes — comment tisser, jardiner, conserver les aliments, récolter les fruits et les légumes et les cuisiner dans un foyer ouvert, tout cela est enseigné par le personnel et des experts locaux. C’est ce que dit Wolfe en citant l’un des membres du personnel, comme si « nous sommes tellement vieux que nous redevenons à la mode ».

Une grande partie de cette activité a lieu dans le nouveau Centre d’apprentissage qui a ouvert ses portes en 2016, un projet de 4 millions de dollars qui a apporté un soutien financier important à la petite localité. Le nouveau bâtiment est tout à fait moderne, avec des éléments solaires passives, un chauffage géothermique et même un Wi-Fi gratuit, mais son style architectural complémente les anciens bâtiments existants. Les leçons enseignées à l’intérieur comprennent également le matelassage et le crochetage de tapis. Même les costumes d’époque portés par les gens qui travaillent à la ferme sont fabriqués au Centre d’apprentissage.

L’emplacement du musée était idéal pour la résurgence de l’artisanat, et les membres du conseil bénévole ont misé sur cette croissance et l’ont intégrée au plan stratégique.

Ils ont demandé : « Quelles choses pouvons-nous faire bien et développer, tout en répondant aux besoins de la collectivité? Je pense que l’un des atouts des musées, c’est de pouvoir rester pertinent, regarder vers l’avenir et voir ce que vous pouvez offrir, ce que vous pouvez faire pour aider les gens à comprendre ce qui se passe dans le monde contemporain. »

Elle garde un excellent souvenir de son travail avec les communautés locales, provinciales et parfois même internationales. Les étudiants de la ferme viennent de loin pour étudier les métiers de la forge, la fabrication de raquettes et même la tonnellerie, car le monde moderne a toujours besoin de barils.

« Je crois qu’une grande partie de l’attrait de la ferme est le désir de créer quelque chose avec vos mains, de vous voir accomplir quelque chose », dit-elle. « Pouvoir le mettre en valeur à l’échelle internationale n’a pas juste été favorable à la ferme Ross, mais aussi à la province. »