Nous continuerons de présenter les idées de quelques un des Fellows de l’AMC et d’explorer le travail crucial que leur point de vue éclairé leur permet d’accomplir. Dans ce numéro, nous avons la chance d’entendre deux d’entre eux, l’honorable Patricia Bovey, sénatrice, et Catherine C. Cole, au sujet de la diplomatie culturelle.

La sénatrice Bovey nous donne un aperçu du rapport sur la diplomatie culturelle produit par le Sénat intitulé La diplomatie culturelle à l’avant-scène de la politique étrangère du Canada. Pour sa part, la secrétaire générale de l’Association des Musées du Commonwealth, Catherine C. Cole, discute l’état actuel de la diplomatie culturelle en ce qui concerne les musées, et les améliorations qui peuvent y être apportées.


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À l’avant-scène de la politique étrangère du Canada

L'Honorable Patricia Bovey, sénatrice

« Le rayonnement du Canada à l’étranger passe en grande partie par sa culture — il ne faudrait en aucun cas sacrifier le rôle de la culture dans la politique étrangère canadienne. » [traduction]

C’est l’idée qu’a exprimée il y a plusieurs dizaines d’année le philosophe et auteur canadien John Ralston Saul. Le rôle et le besoin dont il faisait alors état n’ont pas changé.

Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international du Canada a mené une étude échelonnée sur un an, après quoi il a déposé le 11 juin 2019 son rapport intitulé La diplomatie culturelle à l’avantscène de la politique étrangère du Canada. J’espère que ce rapport apportera une importante contribution et marquera un tournant dans le rôle de la culture à l’étranger. Cette période restera mémorable pour le Canada. Je remercie mes collègues du Comité d’avoir répondu à ma demande en réalisant cette étude et d’y avoir consacré tant d’énergie. La franchise, la perspicacité, la passion et la vision des intervenants ont été tout aussi cruciales.

L’objectif de l’étude était de définir la diplomatie culturelle, son incidence sur le rayonnement et l’économie du Canada ainsi que son importance pour le secteur canadien des arts et de la culture. De nombreux pays utilisent efficacement la diplomatie culturelle, vue dans son sens large à l’échelle mondiale. Pourtant, au fil des décennies, le Canada a tour à tour adopté et aboli des politiques et des pratiques culturelles sur la scène internationale sans avoir évalué adéquatement les avantages en découlant.

Le Comité a recueilli le témoignage d’artistes, autochtones et non autochtones; de dirigeants de bibliothèques, d’archives et de musées; d’organismes artistiques, petits et grands, de toutes les disciplines et de toutes les régions; de diplomates; d’entreprises; et de participants à des missions commerciales à l’étranger. Il a aussi pris connaissance des expériences d’autres pays.

Nous nous sommes également demandé quelle est l’incidence de la diplomatie culturelle sur les artistes, les arts et l’économie ainsi que sur les mécanismes de mesure appropriés. Quel rôle nos missions à l’étranger devraientelles jouer? Quelles fonctions et responsabilités le personnel des missions devrait-il assumer dans le domaine culturel?

Nous avons conclu que la diplomatie culturelle est importante et qu’elle devrait jouer un rôle central dans la politique étrangère du Canada. Nous avons également conclu que les arts et la culture constituent un atout sousestimé dans la politique étrangère actuelle.

Ayant œuvré dans des galeries d’art durant ma carrière dans le secteur des musées, je peux attester les retombées considérables de l’activité culturelle internationale. Pendant que je dirigeais la Galerie d’art du Grand Victoria, la Galerie d’art de Winnipeg et la Galerie Buhler, nous avons envoyé des expositions et des artistes en Chine, au Japon, en Ukraine, en Grande-Bretagne, aux ÉtatsUnis et ailleurs. En tant qu’invitée officielle du Japon, de la France et de la GrandeBretagne et représentante du Canada en Norvège, en Islande, en Finlande, en Angleterre, en Écosse et aux ÉtatsUnis, j’ai fait l’expérience d’une diplomatie culturelle qui était dynamique au début de ma carrière. J’ai ensuite été témoin de sa croissance, puis de sa quasidisparition.

L’Institut de diplomatie culturelle définit la notion de diplomatie culturelle comme « un plan d’action qui est fondé sur l’échange d’idées, de valeurs, de traditions et d’autres aspects de la culture ou de l’identité et qui en tire parti pour renforcer les relations, améliorer la coopération socioculturelle ou promouvoir les intérêts nationaux » [traduction]. La culture relie les êtres humains dans notre monde en rassemblant les gens pour promouvoir les droits de la personne et la paix. Elle sert de pont pendant les controverses politiques internationales et lorsque les négociations diplomatiques ordinaires piétinent. Comme s’a affirmé Simon Brault, « les artistes peuvent parfois transmettre des messages et du contenu que les politiciens ou les diplomates ne peuvent pas transmettre ».

Toutefois, des intervenants se sont également dits préoccupés et embarrassés par le manque de soutien offert par le gouvernement fédéral et les ambassades. L’appui des ambassades et des missions à l’étranger est essentiel à la diplomatie culturelle. À l’étranger, nos artistes et nos organismes du domaine des arts ont besoin d’aide, notamment pour entrer en contact avec des intervenants locaux, se familiariser avec la situation et les règles locales, rivaliser à armes égales pour les possibilités de revenus et connaître les réalités en matière de fiscalité et de droit d’auteur.

C’est pourquoi nous avons donc recommandé qu’Affaires mondiales Canada renforce les capacités des missions canadiennes à l’étranger de façon à ce qu’elles aient les compétences, les connaissances et les outils nécessaires pour soutenir les initiatives de diplomatie culturelle du gouvernement fédéral. Nous avons aussi recommandé que ce ministère fournisse de la formation sur la diplomatie culturelle à ses employés, et particulièrement aux employés permutants en poste à l’étranger. Je suis heureuse que le ministère ait lancé une formation initiale en diplomatie culturelle après la publication de notre rapport.

En reconnaissant le rôle essentiel de la culture dans le rayonnement international du Canada, le Comité a souligné que le pays devrait être proactif, et non réactif, à l’appui des initiatives artistiques et culturelles internationales. De vastes travaux ont été amorcés sur la scène internationale sans l’aide du gouvernement fédéral. Certains ont bénéficié d’un soutien provincial. Nous avons recommandé que le gouvernement fédéral examine les possibilités d’accroître ou d’améliorer la collaboration et la coordination avec les provinces, les territoires et les municipalités en matière de diplomatie culturelle.

La recherche menée par le Comité a également révélé une fragmentation des rôles et des responsabilités actuels du gouvernement fédéral en matière de diplomatie culturelle. Pour accroître la mobilisation et la cohérence, nous avons recommandé que le gouvernement du Canada développe et mette en œuvre une stratégie globale de diplomatie culturelle et qu’il désigne Affaires mondiales Canada — doté d’immeubles et de personnel partout dans le monde — comme le principal ministère responsable de la coordination, de l’exécution et de l’évaluation de la stratégie et des activités de diplomatie culturelle du Canada ainsi que de la production de rapports à cet égard. Le Comité estime également que Patrimoine canadien et le Conseil des arts du Canada devraient participer activement à la stratégie.

En outre, le rapport souligne l’importance des anciens pro-grammes d’études canadiennes. Nous avons recommandé qu’ils soient rétablis et qu’Affaires mondiales Canada appuie la création d’un programme d’études canadiennes modernisé. Les collections, la recherche et les programmes publics des musées pourraient jouer un rôle important dans ces efforts. Les associations qui soutiennent le milieu des musées au Canada pourraient aussi être mises à contribution.

Le Comité a aussi trouvé encourageant le nouveau programme Exportation créative Canada lancé l’an dernier, qui remplace l’ancien programme Routes commerciales. Nous avons appris que la participation a été si forte que le financement demandé dépasse largement les sommes disponibles.

En conclusion, le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international a convenu à l’unanimité que la diplomatie culturelle constitue bel et bien un aspect fondamental de la politique étrangère et qu’elle devrait redevenir un pilier des activités d’Affaires mondiales.1

« Selon la perspective d’Affaires mondiales, a expliqué Stuart Savage, la promotion des arts et de la culture du Canada sert trois objectifs principaux : l’interaction, la défense des intérêts et la prospérité ». À mon avis, nous devons prendre conscience de l’importance des commentaires formulés dans le Rapport sur la diplomatie culturelle du Royaume-Uni publié en 2007, dans lequel on peut lire :

« À l’avenir, des alliances sont tout aussi susceptibles d’être forgées en fonction d’une entente culturelle que d’ententes économiques ou géographiques. […] L’importance de l’activité culturelle découle précisément de son indépendance, de sa liberté et du fait qu’elle représente et relie les gens. » [traduction]

Le Canada est également partie prenante de la stratégie de l’UNESCO visant à promouvoir « le potentiel que recèle un dialogue reposant sur la musique et les arts comme vecteur du renforcement de la compréhension mutuelle et de l’interaction, ainsi que de l’instauration d’une culture de la paix et du respect de la diversité culturelle ».

Jeremy Kinsman, ancien diplomate et maintenant négociateur en commerce international, a déclaré : « Personnellement, je dois vous dire que je ne vois aucun sujet plus important pour votre comité. […] la diplomatie culturelle et la façon dont nous nous projetons dans le monde ne dépendent que de nous. […] la culture et la diplomatie publique sont parfaitement indissociables. […] C’est une quête d’influence au nom de nos intérêts, et rien ne saurait être plus important. […] le pouvoir de convaincre ne se substitue pas au pouvoir de la force, il s’y conjugue. […] Nos réalités, nos valeurs, notre créativité, notre sentiment de pouvoir innover sont tous interreliés. »

« Nous devons passer à l’action. »

— Patricia Bovey, sénatrice

Dans quelle mesure ces recommandations du Sénat influentelles sur le secteur canadien des musées et des galeries d’art? Énormément à mon avis. La recherche, les expositions, les publications et les programmes d’accès du public de ces institutions rehaussent certainement les valeurs, la définition et le rayonnement de notre pays. Il est important que le secteur des arts et de la culture, notamment les musées et les galeries d’art, applique les décisions du gouvernement et d’Affaires mondiales en mettant en œuvre les huit recommandations formulées dans le rapport.

En plus d’agir comme organe législatif, le Sénat joue un rôle en matière de représentation et d’enquête. Il ne peut mettre en œuvre des projets de loi de finances, mais le gouvernement doit donner suite aux rapports publiés par le Sénat. D’après moi, La diplomatie culturelle à l’avant-scène de la politique étrangère du Canada constitue l’aboutissement d’une enquête rigoureuse sur les besoins et est représentatif du secteur des arts et de la culture à l’échelle du pays. Ce rapport énonce les enjeux propres à enrichir les lois et les politiques actuelles et établit un plan d’action.

De mon point de vue axé sur les musées, l’Association des musées canadiens — qui publie la présente revue — peut et devrait également jouer un rôle de premier plan dans cette initiative grâce à ses efforts de défense des intérêts, à ses activités de perfectionnement professionnel et à la représentation des musées canadiens dans la sphère mondiale. Elle peut constituer une ressource pour renforcer la capacité des missions diplomatiques afin de s’assurer qu’elles prennent davantage en compte les besoins des musées à l’étranger.

Je continuerai de veiller à ce que le gouvernement et Affaires mondiales Canada misent sur l’aspect culturel de nos efforts diplomatiques pour faire progresser les objectifs du Canada à l’échelle internationale et à ce que les artistes et les organismes artistiques, entre autres les musées, reçoivent le soutien nécessaire en matière de finances et de programmes afin d’assumer leurs importantes responsabilités connexes.

Note :
1. Sauf indications contraires, toutes les citations ont été faites durant les audiences 2018-2019 du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et commerce international.

The Honourable Patricia Bovey, FRSA, FAMC. Sénatrice indépendante du Manitoba. Membre du Comité sénatorial des affaires étrangères et du commerce international


Le rapport du Sénat intitulé La diplomatie culturelle à l’avant-scène de la politique étrangère du Canada a ouvert la voie à une discussion sur le rôle des musées dans la diplomatie culturelle et sur la nécessité de renouveler et d’accroître les investissements dans les programmes patrimoniaux canadiennes d’envergure internationale. Publié moins d’un an après le rapport du Comité permanent du patrimoine canadien intitulé Aller de l’avant — vers un secteur des musées canadiens plus fort (septembre 2018), qui reconnaissait la nécessité d’une nouvelle politique nationale sur les musées, le rapport sénatorial montre qu’il est temps de repositionner les musées.


 

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Musées et diplomatie culturelle

Catherine C. Cole

Le rapport renferme huit recommandations clés. Ces recommandations mettent l’accent sur les arts, mais le milieu du patrimoine doit veiller à ce que les musées soient reconnus comme participants à la diplomatie culturelle dans le cadre de leur mise en œuvre. Bien que les programmes patrimoniaux soient sous-estimés, ils suscitent un appui à la politique étrangère du Canada, améliorent la compréhension mutuelle et les liens interpersonnels, renforcent la confiance à l’égard des interactions ultérieures et font progresser les questions d’intérêt national.

Le gouvernement fédéral devrait renouveler les investissements dans ses propres programmes patrimoniaux d’envergure internationale. La réputation du Canada dans le milieu international du patrimoine s’est ternie au cours des dernières années en raison de la faible participation du gouvernement précédent aux programmes internationaux et des compressions effectuées dans les programmes fédéraux — mentionnons notamment l’Institut canadien de conservation (p. ex. publications, ateliers et stages) et le Réseau canadien d’information sur le patrimoine. Le Canada est moins présent qu’il y a 15 ans dans la sphère internationale.

Le rapport donne l’occasion de mettre en valeur la participation du Canada à des activités internationales dans le domaine du patrimoine. Des conservateurs canadiens travaillent dans d’autres pays pour mieux comprendre leurs collections et améliorer les expositions. Par ailleurs, d’autres pays découvrent le Canada en partie grâce aux musées, que ce soit au moyen d’objets prêtés ou d’expositions internationales produites par des musées canadiens. Les étrangers visitent des expositions au Canada et repartent avec leurs impressions dans leur pays d’origine ou, sans se déplacer, explorent des musées canadiens en consultant de riches sites Web qui donnent accès à des collections et présentent des expositions virtuelles. Pourtant, il devient de plus en plus difficile (coûteux) pour les musées canadiens de créer des expositions itinérantes internationales.

La plupart des recommandations formulées dans le rapport s’adressent au gouvernement fédéral, mais elles ont une incidence sur les musées. Par exemple, le rapport recommande d’accroître ou d’améliorer la collaboration entre le gouvernement fédéral et les autres ordres de gouvernement. La responsabilité des musées canadiens, à l’instar de celle de la diplomatie, est partagée entre tous les ordres de gouvernement. Ces musées devraient donc contribuer à l’effort concerté sur ce front. Le rapport recommande aussi que les ministères et les sociétés d’État fédéraux prenant part à des activités appuyant la diplomatie culturelle élaborent des indicateurs de mesure du rendement, mais les autres ordres de gouvernement devraient participer à cette discussion ou élaborer leurs propres indicateurs. Affaires mondiales Canada pilotera ce programme. Toutefois, les ministères provinciaux de la Culture, du Développement international et du Commerce ainsi que les gouvernements autochtones ont également un rôle à jouer, car ils participent eux aussi à la diplomatie et à l’investissement dans les musées.

La recommandation no 6 souligne une inégalité entre les professionnels des arts et ceux du patrimoine. Elle préconise « qu’Affaires mondiales Canada renforce les capacités des missions canadiennes à l’étranger de façon à ce qu’elles [puissent] soutenir les initiatives de diplomatie culturelle du gouvernement fédéral ». Le gouvernement fédéral devrait investir davantage dans des programmes comme le Fonds culturel des missions — et modifier la pratique actuelle pour permettre aux professionnels du patrimoine de demander des subventions afin de participer à des activités internationales. On s’attend à ce que seuls les artistes participent à des expositions et à des programmes internationaux et présentent des demandes au Conseil des arts du Canada. Les professionnels du patrimoine sont défavorisés, puisqu’ils ne sont pas admissibles à ces subventions et qu’il n’existe aucun volet d’investissement similaire dans le Programme d’aide aux musées. Il m’apparaît évident que le gouvernement fédéral doit traiter sur un pied d’égalité le secteur des arts et celui du patrimoine.

En plus d’accroître les investissements dans ses propres programmes patrimoniaux d’envergure internationale, comme l’Institut canadien de conservation et le Réseau canadien d’information sur le patrimoine, ainsi que dans les initiatives internationales des musées canadiens, le gouvernement fédéral devrait investir dans des organismes internationaux voués au patrimoine dont le Canada est membre, par exemple la Commonwealth Association of Museums (CAM), et qui participent à la diplomatie culturelle. À titre de secrétaire générale de la CAM, je me permets de citer cette association comme un excellent exemple de diplomatie culturelle à l’œuvre. Il s’agit d’un réseau de musées postcoloniaux qui se penche sur l’héritage colonial et établit des pratiques de travail et des relations à l’échelle internationale.

La CAM propose un programme de stages internationaux auquel contribue Jeunesse Canada au travail pour une carrière vouée au patrimoine du ministère du Patrimoine canadien, programme administré par l’Association des musées canadiens (AMC). Les stagiaires acquièrent une expérience de travail à l’étranger, tout en faisant connaître les pratiques des musées canadiens. La CAM élabore actuellement un programme d’échanges entre les Caraïbes et le Canada. Tout comme le Commonwealth of Learning, organisme intergouvernemental du Commonwealth établi à Vancouver, la CAM offre de l’enseignement à distance. Toutefois, elle le fait sans investissement fédéral. Le certificat en études muséales de base est administré au Canada et prend en compte les perspectives canadiennes. La CAM organise également des conférences internationales et des ateliers régionaux faisant appel à des muséologues canadiens à titre de conférenciers et d’animateurs.

En qualité d’organisme accrédité du Commonwealth, la CAM est invitée à participer à de grandes réunions internationales comme la Réunion des chefs de gouvernement des pays du Commonwealth et la Conférence des ministres de l’éducation du Commonwealth. Elle contribue à l’élaboration des documents présentés aux ministres, distribue les déclarations et les rapports, prend part à des groupes d’experts dans diverses tribunes et désigne des représentants pour assister à titre d’observateurs aux réunions des ministres. La CAM organise immédiatement avant les réunions des activités visant à faire mieux connaître les musées auprès des ministres et à favoriser la compréhension de divers sujets à chaque endroit où se tiennent les réunions.

De plus, en tant qu’organisme affilié au Conseil international des musées (ICOM), la CAM est particulièrement bien placée pour mettre en valeur la muséologie canadienne contemporaine sur la scène mondiale. Par exemple, l’ouvrage du journaliste canadien Doug Saunders intitulé Du village à la ville : comment les migrants changent le monde a été la source d’inspiration du projet Migration:Cities | (im)migration and arrival cities. La CAM a d’ailleurs invité M. Saunders à prononcer une allocution et elle a encouragé les musées canadiens œuvrant auprès des groupes de migrants à participer au projet. De même, le projet piloté par la CAM portant sur la gestion des restes humains en Afrique du Sud s’appuie sur des protocoles, des précédents et l’évolution de la relation entre les musées canadiens et les peuples autochtones. L’importance accordée par la CAM à la décolonisation et aux efforts de réconciliation déployés par les musées canadiens trouve écho dans d’autres pays.

Malgré toutes ces initiatives importantes, la CAM ne reçoit aucun investissement d’Affaires mondiales Canada ou du ministère du Patrimoine canadien pour son fonctionnement. Elle n’est pas admissible au Programme d’aide aux musées, car ses ressources limitées ne lui permettent pas de pourvoir un poste à temps plein. Or, ce manque de soutien même l’empêche d’embaucher le personnel à temps plein nécessaire pour assurer sa viabilité à long terme.

Il est grand temps d’élaborer une nouvelle Politique nationale des musées. La politique actuelle remonte à 1972 — il y a près de 50 ans! Une nouvelle politique pourrait définir plus en détail le rôle des musées et des organismes canadiens connexes dans le domaine de la diplomatie culturelle, dont fait état le rapport sénatorial; reconnaître l’augmentation du nombre de musées canadiens et de leur diversité; répondre aux besoins en investissements plus élevés — et plus souples — dans ces musées et leur personnel; et corriger le déséquilibre au chapitre de l’investissement fédéral dans le secteur des arts et celui du patrimoine. Le Parti libéral nouvellement réélu s’est engagé à réviser la Politique nationale des musées. L’AMC et le milieu des musées dans son ensemble collaboreront avec le gouvernement afin d’apporter des changements qui profiteront aux musées canadiens, notamment une augmentation de l’investissement dans les efforts de diplomatie culturelle des musées. Le monde est aujourd’hui très différent de ce qu’il était en 1972 — songeons aux changements dans les relations entre les musées et les peuples autochtones ainsi qu’entre les musées et les immigrants à l’avant-scène et à l’adoption de la technologie numérique qui a révolutionné les musées et leur travail. La nouvelle Politique nationale des musées devrait refléter ces changements.

Catherine C. Cole, FAMCest conseillère principale au sein de Catherine C. Cole & Associates, secrétaire générale de la CAM et vice-présidente du Comité international sur les collections et activités des musées des villes (CAMOC – ICOM).


En seulement six mois, plus précisément d’octobre 2018 à mars 2019, Kanchan Lal, stagiaire à la CAM, a organisé l’exposition temporaire intitulée Women & Weaving. Elle a aussi rédigé et conçu une publication et une trousse d’éducation connexes au Centre culturel de Vanuatu. Mme Lal a également élaboré une proposition afin que la CAM commence à accorder une importance particulière à un projet consacré au genre pour souligner la campagne de l’ONU des « 16 jours d’activisme pour mettre fin la violence faite aux femmes de l’ONU ». Il s’agissait pour elle d’une excellente occasion de découvrir une autre culture et d’acquérir une expérience de travail à l’étranger. Tout au long de sa carrière, cette expérience continuera d’influencer sa façon de travailler dans des collectivités canadiennes diversifiées sur le plan culturel. Pour ses collègues du Centre culturel de Vanuatu, le stage de Kanchan Lal a renforcé les relations de travail entre leur pays et le Canada. Les liens soutenus entretenus par nos deux pays au fil du temps sont très importants. La CAM avait déjà envoyé des stagiaires à Vanuatu en 2008-2009 et en 2011-2012. J’ai moi-même acquis une longue expérience dans la région. Lorsque je travaillais aux Îles Salomon, de 1991 à 1993, mon personnel a participé au Programme des travailleurs sur le terrain de Vanuatu. Carol E. Meyer, directrice du département de la conservation, de l’interprétation et de la conception du Musée d’anthropologie à l’Université de la Colombie-Britannique (et membre active de la CAM), a travaillé pendant de nombreuses années à Vanuatu et dans l’ensemble de la Mélanésie. Les relations ainsi établies ne se limitent pas au niveau personnel; il s’agit de relations entre des pays.