La culture pour tous

Un nouveau musée voit le jour à Vancouver-Nord

Sandra Thomas

MONOVA : Campfire Capers (Les aventures autour du feu de camp) du Musée de Vancouver-Nord est un programme préscolaire de l’heure du conte pour les enfants de 2 à 5 ans, axé sur différents thèmes. Dans chaque programme de 30 minutes, les enfants apprennent un sujet, lisent une histoire, chantent une chanson, regardent un objet spécial du musée et font une activité amusante. Photo — Maxine Bulloch

Ouvrir un nouveau musée est tout un exploit, particulièrement en pleine pandémie mondiale. C’est toutefois le défi qu’ont relevé en décembre dernier les employés et les bénévoles du MONOVA, le musée de Vancouver-Nord.

Niché au sein d’une florissante zone de magasinage en bordure de mer connue sous le nom de The Shipyards, l’espace de 16 000 pieds carrés présente une galerie permanente et un lieu destiné à la location, qui comprend une grande terrasse. On y retrouve également une galerie temporaire, qui devrait être terminée avant la fin de 2022. Parmi les joyaux des expositions, on retrouve le tramway 153, qui a été restauré; une nouvelle sculpture en cèdre d’une grande puissance du sculpteur Sḵwx̱wú7mesh (Squamish) Wade Baker intitulée Sch’ich’iyuy (Les deux sœurs); un cercle de bienvenue autochtone qui met en valeur des artefacts des premières nations Sḵwx̱wú7mesh et Səl̓ílwətaɬ (Tsleil-Waututh); des présentoirs interactifs destinés aux enfants; et bien plus encore.

Le 4 décembre 2021, MONOVA: musée de Vancouver-Nord a officiellement ouvert ses portes à The Shipyards. Dee Dhaliwal, le conseiller Don Bell, John Gilmour, la députée Bowinn Ma, la mairesse Linda Buchanan, Latash Maurice Nahanee, le maire Mike Little, Carleen Thomas, Bob McCormack et Greg Holmes étaient sur place pour la coupure officielle du ruban. Photo — Alison Boulier

De plus, des dizaines de programmes, nés d’un amour voué à Vancouver-Nord mais conçus au cours d’une pandémie, ont été mis sur pied. Les programmes ont été conçus et offerts dans un grand esprit de flexibilité; en ligne, en personne, ou un mélange des deux. Cette programmation est un aspect extrêmement important de la contribution du MONOVA à sa communauté.

L’ouverture du musée, qui devait avoir lieu en 2020, a été repoussée en raison de la pandémie. La coordonnatrice des programmes du MONOVA, Carol Ballard, a indiqué que tenter d’établir une programmation pendant la COVID-19 a posé bien des défis. En raison des vagues de différents variants, l’équipe devait constamment réévaluer son approche.

« Nous avons donc lancé une galerie virtuelle pour les gens qui ne se sentaient pas à l’aise de venir en personne, afin qu’ils puissent avoir accès au musée à partir de chez eux, a dit Carol Ballard. On retrouve donc un élément interactif qui utilise la chanson, les témoignages et le théâtre, et qui aborde les thèmes de l’appartenance, de ce que signifie l’appartenance et pourquoi on y aspire. » Cette visite virtuelle a également été conçue pour devenir une visite autoguidée en personne du musée.

Vue de l’extérieur du musée et du Streetcar 153 dans son hall. Photo — Brett Hitchens / Brett Ryan Studio

Carol Ballard indique également que bien que les employés du MONOVA souhaitent s’assurer que la programmation convienne à tous, ils déploient un effort concerté pour intéresser les jeunes.

À cette fin, le MONOVA a créé une programmation intéressante pour ce public plus jeune. Un programme de récits pour les enfants d’âge préscolaire, appelé Les aventures autour du feu de camp, a été mis sur pied, ainsi que des expériences éducatives pour les écoles offertes en personne et en ligne. Mais l’idée peut-être la plus innovante est le partenariat que le MONOVA a formé avec les étudiants de l’université du voisinage, Capilano University, pour programmer leur toute nouvelle chaîne TikTok.

Pamela Roberts, la planificatrice des programmes publics du musée, a passé les trois dernières années à élaborer la stratégie de programmation publique. Elle reconnaît que la COVID-19 a eu d’énormes répercussions, et pas seulement pour le musée.

« La COVID a frappé pendant que je concevais des idées et des plans pour la programmation, et ça a vraiment tout changé pour nos visiteurs, a indiqué Pamela Roberts. Plusieurs familles ont été vraiment touchées par la COVID, mais plus particulièrement les familles qui ont besoin d’une aide supplémentaire. Les enfants atteints d’autisme ont fait face à beaucoup de défis pendant la COVID, que ce soit à cause du bouleversement des routines, de l’élimination des mesures d’aide en personne ou de l’annulation d’une multitude de programmes. »

Charlie Cook animant le programme Science Shows : Tree Talks (Spectacles scientifiques : Discussions sur les arbres) au MONOVA. Photo — Maxine Bulloch

Pamela Roberts a ajouté que ces défis ont pris de l’ampleur avec la distanciation physique et le port obligatoire du masque. C’est pourquoi elle a senti qu’il était primordial de créer des matinées offrant une convivialité sensorielle, soit des heures d’ouverture dédiées aux familles et aux individus qui pourraient tirer parti de bruits réduits dans la galerie et d’activités tranquilles conçues spécialement pour eux.

Le mandat de « culture pour tous » est la force motrice d’un autre programme important en cours d’élaboration qui vise à diversifier le groupe de bénévoles du MONOVA. Selon Pamela Roberts, le programme « New Voices » (nouvelles voix) vise à encourager les nouveaux arrivants à prendre part aux activités tout en apprenant l’histoire de Vancouver-Nord.

« Les nouveaux arrivants vont tirer parti de ce programme. Cela va leur permettre d’acquérir une importante expérience de travail au Canada et, surtout, de tisser des liens avec leur nouvelle communauté, dit Pamela Roberts. Diversifier son groupe de bénévoles permet au MONOVA de poser un regard neuf sur l’expérience du visiteur dans le but de l’améliorer, entre autres en offrant aux visiteurs une expérience dans différentes langues. »

Pamela Roberts note que la programmation muséale s’est transformée au cours des dernières années. La programmation offre une perspective historique, mais on l’utilise également comme outil de réflexion sur les évènements actuels. Pamela Roberts ajoute que la société d’aujourd’hui fait face à de nombreux défis et que les musées devraient être des lieux sûrs et de confiance au sein desquels des discussions peuvent prendre place.

Elle ajoute que « la programmation publique joue un rôle essentiel lorsque vient le moment de créer des endroits où discuter des questions contemporaines qui préoccupent nos visiteurs — par exemple, les changements climatiques. En plus, le fait que les archives de Vancouver-Nord fassent partie de notre organisation représente un réel avantage ; les preuves historiques du passé sont là, nous pouvons faire des recherches et relier les questions du passé au présent par des faits. Le plus grand changement au sein de la programmation muséale vient du fait que nous ne pouvons plus être une voix neutre au sein de la société contemporaine. »

Pamela Roberts a contribué à inclure du contenu autochtone dans la programmation du musée pour faire honneur au mandat du musée. Elle ajoute qu’elle a été personnellement inspirée par les First Peoples Principles of Learning (principes de l’apprentissage des Premières Nations), des lignes directrices fondamentales que les enseignants peuvent utiliser pour aider leurs étudiants à vivre des expériences authentiques d’apprentissage autochtone. « C’est une différente façon de concevoir tous les programmes dans le respect du travail avec nos partenaires et nos collègues. »

Sheryl Rivers, membre de la commission des archives et du musée de Vancouver-Nord, a aidé à mettre en place le Comité consultatif des voix autochtones du MONOVA il y a six ans. Le comité a joué un grand rôle pour transformer la relation informelle du MONOVA avec les nations Sḵwx̱ wú7mesh (Squamish) et Səl̓ílwətaɬ (Tsleil-Waututh) en un partenariat formel et structuré, grâce à la mise en œuvre et à la signature d’un protocole d’entente avec chaque nation.

Carol Ballard, coordinatrice de programme, dirige le programme Les aventures autour du feu de camp au MONOVA : musée de Vancouver-Nord. Photo — Maxine Bulloch

Sheryl Rivers indique que la décision a été prise très tôt d’inclure un conseiller culturel à chaque étape de l’élaboration du nouveau musée, y compris dans la programmation. Tsawasiya Spukwus (Alice Guss) et Senaqwila Wyss sont responsables de la programmation autochtone du musée.

« Nous avons eu l’idée d’intégrer la culture Squamish et Tsleil-Waututh partout dans le musée, au lieu de nous limiter à une ou plusieurs expositions isolées sur les nations décrivant leur mode de vie et comment ils ont été intégrés à Vancouver-Nord. Au contraire, tout a été intégré dans l’ensemble du musée », dit Sheryl Rivers.

Sheryl Rivers ajoute que ces consultations importantes entre le MONOVA et les Premières Nations locales ont aidé à créer un modèle dont les autres musées devraient s’inspirer.

« Je pense qu’on peut éduquer les autres musées sur la façon dont on peut prôner l’intégration, au lieu de l’isolation, dit Sheryl Rivers. J’aimerais d’ailleurs souligner les efforts du personnel actuel, ils ont réalisé un travail extraordinaire pour concrétiser notre vision. Ceci est très important pour moi. J’ai l’impression de suivre ma vocation, alors je vais faire tout mon possible pour les appuyer. »

Lawrel Lawry, la gestionnaire des opérations du MONOVA, ajoute que l’équipe a travaillé très fort pour s’assurer que diverses voix ont été bien représentées dans tous les aspects du musée, y compris dans la programmation.

Senaqwila Wyss, programmatrice culturelle autochtone. Photo — Maxine Bulloch

« Ce que nous tentons d’accomplir grâce à notre programmation, c’est de rester pertinent. Nous voulons voir comment les membres de la communauté vont se sentir en pénétrant dans le musée, qu’ils sentent que c’est leur musée, indique Lawrel Lawry. Nous voulons qu’ils aient un sentiment d’appartenance et nous souhaitons devenir un pôle communautaire où les gens pourront non seulement en apprendre plus sur eux-mêmes, mais également découvrir de nouvelles choses sur leur communauté. »

Elle ajoute que l’équipe du service à la clientèle du MONOVA ne ménage aucun effort pour trouver des moyens de coopérer avec la communauté, par exemple en menant des sondages de consultation. Ces renseignements sont utilisés, et continueront de l’être, pour prendre des décisions sur la programmation offerte.

« Cette rétroaction nous aide à décider quels programmes mettre en œuvre, à quel moment les offrir et comment les exécuter, indique Lawrel Lawry. Nous voulons que les membres de la communauté découvrent le musée et qu’ils participent aux programmes et aux expositions de façon concrète. La programmation est vraiment au cœur de tout ce que nous faisons et de tout ce que nous souhaitons accomplir au cours de la prochaine année. » M

Sandra Thomas est une journaliste primée et une rédactrice et éditrice indépendante basée à Vancouver, en Colombie-Britannique.

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