Les musées n’ont jamais été aussi importants qu’aujourd’hui

Le président du conseil d’administration de l’Association des musées canadiens Michael Wallace et l’administratrice Heather George ont comparu devant le Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes le 7 février 2022. Le Comité tenait des audiences sur l’impact de la pandémie sur le secteur culturel canadien.

Les représentants de l’AMC ont déclaré aux députés que la pandémie avait « mis en évidence des inégalités et des griefs historiques, et exacerbé les divisions au sein de notre société civile ». Ils ont ajouté que les musées, en tant que lieux de réflexion sûrs, avaient un rôle clé à jouer pour guérir la société canadienne et l’aider à aller de l’avant, mais qu’une vision commune sous la forme d’une nouvelle politique muséale nationale était nécessaire.

Leurs commentaires ont été édités pour des raisons de longueur et de clarté.

« Une époque de complexité et de crise », c’est ainsi que les auteurs d’une lettre de mandat adressée à la nouvelle direction de l’AsMadame la présidente et membres du comité, merci de nous donner l’occasion d’ajouter notre voix à ces importantes délibérations.

Je m’appelle Heather George. En plus de siéger au conseil d’administration de l’AMC, je suis conservatrice invitée au Woodland Cultural Centre à Brantford, en Ontario. Établi sur le site de l’ancien pensionnat indien Mohawk Institute, le Woodland Cultural Centre a pour mission de préserver et de promouvoir l’histoire et la culture autochtones.

Heather George

Je suis accompagné de Michael Wallace, président de l’Association des musées canadiens et directeur général du Musée Théâtre Canada — un petit musée dont la mission est de préserver et de célébrer le patrimoine canadien des arts de la scène.

Avec ses homologues provinciaux et territoriaux, l’AMC représente plus de 2 700 organismes au Canada — des musées communautaires et des petits musées dirigés par des bénévoles aux établissements nationaux — ainsi que des centaines de professionnels des musées.

C’est de ce point de vue pancanadien que nous avons constaté comment l’imprévisibilité des ouvertures et des fermetures liées à la pandémie a affecté la dotation en personnel, la programmation, la planification et le moral des employés.

Les programmes d’aide du gouvernement fédéral durant la pandémie ont permis à nos établissements de s’adapter à cette situation sans précédent.

Mais ils ont également servi à mettre en évidence la fragilité économique du secteur et la nécessité de passer de programmes de financement ponctuels à un soutien stratégique à long terme.

Michael Wallace

Si nous ne connaissions que deux musées qui ont fermé leurs portes en raison de la pandémie, nous en connaissons beaucoup d’autres qui sont désormais menacés de fermeture si les circonstances ne changent pas rapidement.

C’est pourtant sur le plan humain que l’impact de la pandémie a été le plus durement ressenti.

Chaque jour, des collègues nous disent que leur personnel est au bord de l’épuisement professionnel. D’autres me disent qu’ils ont perdu des employés précieux en raison de l’incertitude chronique.

Et plus récemment, signe des temps sans doute, nous avons entendu parler d’employés de musées harcelés et intimidés pour avoir porté des masques et appliqué les directives de santé publique.

Bien sûr, décrit de cette manière, l’impact de la pandémie sur le secteur des musées n’est pas différent de celui de nombreux autres secteurs — des soins de santé à l’hôtellerie — qui ont été bouleversés de la même manière par la COVID.

Nous devons examiner de plus près la place et le rôle de notre secteur dans la société — aujourd’hui et à l’avenir — afin de tracer une voie à suivre qui s’appuie sur les leçons des deux dernières années.

Les musées fournissent une valeur de 1,2 milliard de dollars par an en avantages éducatifs — et 277 millions de dollars en valeur de visites en ligne. Ils fournissent de bons emplois et donnent aux Canadiens l’occasion de redonner à leurs collectivités par le biais du bénévolat.

Leur valeur économique pour le pays est évidente.

Mais surtout, ils font partie intégrante de notre tissu social. Et ils n’ont jamais été aussi importants qu’ils ne le sont aujourd’hui.

Le stress et le traumatisme des deux dernières années ont mis à nu de profondes fissures dans la société canadienne.

Ils ont mis en évidence des inégalités et des griefs historiques, et ont exacerbé les divisions au sein de notre société civile.

Les musées sont des espaces sûrs pour favoriser la réflexion sur la civilité et la société civile, sur la responsabilité personnelle et sociale, et sur la diversité et l’inclusion. Ce sont des espaces sûrs pour le dialogue et la guérison à une époque où une cacophonie de points de vue apparemment inconciliables domine notre vie quotidienne.

En tant qu’établissements publics parmi les plus fiables et les plus respectés au pays, les musées peuvent fournir aux Canadiens une base solide sur laquelle ils peuvent s’arrêter et réfléchir pour définir une voie à suivre pour sortir de l’incertitude actuelle.

Mais pour que les musées puissent jouer leur rôle unique dans la guérison de notre société et aider les Canadiens à imaginer ensemble un avenir meilleur, il faut que les gouvernements le reconnaissent — à commencer par le gouvernement du Canada.

Mais voici le problème : la politique muséale nationale du Canada a été rédigée au début des années 1990, il y a plus de 30 ans. Elle n’est plus à jour. Elle ne reflète tout simplement pas le Canada moderne ou son secteur muséal diversifié — ce à quoi ils ressemblent aujourd’hui, les défis auxquels ils sont confrontés et leur potentiel pour demain.

L’élaboration d’une nouvelle politique muséale nationale est cruciale, non seulement pour notre secteur, mais pour le pays.

L’élaboration d’une nouvelle politique muséale nationale a été soulignée comme une grande priorité dans la lettre de mandat de l’ancienne ministre du Patrimoine canadien en 2019. Les leçons des deux dernières années nous disent que c’est encore plus important aujourd’hui.

Écrivons ce nouveau chapitre pour nos musées, et pour notre pays. Ensemble. M

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