Étude sur la valeur des GLAM au Canada

Rapport du groupe de travail sur la déclaration d’Ottawa

Oxford Economics

Oxford Economics a été fondée en 1981 à titre de société commerciale de l’école de commerce de l’Université d’Oxford afin de fournir des prévisions et des modèles économiques aux entreprises et aux institutions financières. Nous sommes devenus l’un des plus importants cabinets-conseils indépendants au monde, fournissant rapports, prévisions et outils analytiques sur plus de 200 pays, 250 secteurs industriels et 7 000 villes et régions.

Oxford Economics a son siège social à Oxford, en Angleterre, et ses centres régionaux sont situés à New York, Londres, Francfort et Singapour. L’entreprise a des bureaux partout dans le monde. Nous employons plus de 250 économistes professionnels, spécialistes de l’industrie et chroniqueurs économiques – l’une des plus importantes équipes de macroéconomistes et de spécialistes du leadership éclairé. Notre équipe mondiale est des plus qualifiées pour utiliser une gamme complète de techniques de recherche et de capacités de leadership éclairé, allant de la modélisation économétrique, de l’élaboration de scénarios et de l’analyse des répercussions économiques aux études de marché, aux études de cas, aux groupes d’experts et à l’analytique Web.

Oxford Economics est une firme-conseil clé auprès des décideurs et des leaders éclairés des secteurs privé, financier et gouvernemental. Notre clientèle mondiale comprend maintenant plus de 1 500 organisations.


Responsables de la recherche pour le présent rapport

Mitchell Levine

Andrew Tessler, directeur associé

Andrew s’est joint à Oxford Economics en 2007 et dirige le bureau australien. Il a travaillé à une vaste gamme d’études économiques depuis, notamment des évaluations économiques, des études de l’impact économique et des analyses de marché.

atessler@oxfordeconomics.com, + 61 2 8458 4224

Carolyn Kobernick

Alice Gambarin, économiste principale

Alice s’est jointe à Oxford Economics en 2014 et a depuis acquis de l’expérience dans le cadre d’études de l’impact économique menées notamment pour certains établissements d’enseignement supérieur, ainsi que dans le cadre d’études sur le rendement social des investissements.

agambarin@oxfordeconomics.com, + 1 646 503 3054

Dr. Ingrid Sketris

Stephanie Lukins, économiste principale

À Oxford Economics, Stephanie est une économiste principale qui se concentre sur l’analyse quantitative. Elle a l’art de développer des compétences quantitatives approfondies, en intégrant l’économétrie et les méthodes de préférence déclarée.

slukins@bisoxfordeconomics.com, + 61 2 8458 4230


Oxford Economics, 5 Hanover Square, 8e étage, New York, NY 10004.

Tel: +1 646-786-1879 Web: www.oxfordeconomics.com/consulting Twitter: @OxfordEconomics

Ce rapport est confidentiel et réservé au Groupe de travail sur la Déclaration d’Ottawa. Il ne peut être publié ou distribué sans l’autorisation écrite préalable de ce dernier. La modélisation et les résultats présentés ici s’appuient sur des renseignements fournis par des tiers, qu’Oxford Economics a utilisés pour produire son rapport et ses prévisions de bonne foi. Toute révision ou mise à jour ultérieure de ces données aura une incidence sur les évaluations et les projections présentées.

Avant-propos

Les galeries, bibliothèques, archives et musées canadiens ( GLAM) font partie intégrante du tissu de notre nation, enrichissant chaque année la vie de millions de visiteurs de tous âges, origines et régions.Riches dépositaires d'art, d'information, d'histoire et de trésors, ces précieuses institutions servent à préserver et à promouvoir le patrimoine canadien au pays et à l'étranger, tout en donnant accès à des ressources pour l'éducation, la recherche, l'apprentissage et la création artistique.

Connu collectivement sous le nom de secteur GLAM, notre secteur est une industrie qui se surpasse régulièrement. Les GLAM à but non lucratif, que ce soit dans les grandes villes ou dans les petites villes du pays, attirent des expositions de classe mondiale et offrent aux communautés des occasions essentielles d'éducation et de recherche auxquelles elles n'auraient peut-être pas accès autrement.

Pendant trop longtemps, les membres du secteur des GLAM ont largement fonctionné en silos. Entrez dans le Groupe de travail de la Déclaration d'Ottawa, composé de représentants du secteur et co-dirigé par Bibliothèque et Archives Canada ( BAC) et l'Association des musées canadiens ( AMC). Nous reconnaissons maintenant l'importance de travailler ensemble pour mieux faire comprendre la valeur de notre secteur. Nous pensons que cette étude, la première du genre, contribue grandement à la réalisation de cet objectif.

Initiative du Groupe de travail de la Déclaration d'Ottawa, composé de représentants du secteur et co-dirigé par l'Association des musées canadiens ( AMC) et Bibliothèque et Archives Canada ( BAC), l'étude a révélé que pour chaque dollar investi dans les GLAM à but non lucratif, la société obtient près de quatre dollars en bénéfices. Ce rendement est équivalent aux investissements gouvernementaux dans les projets d'infrastructure de transport.

L'étude a été menée par Oxford Economics à l'aide de mesures couramment utilisées par les institutions culturelles, ainsi que des résultats d'un sondage national auprès des Canadiens. Elle a révélé que les utilisateurs des GLAM seraient prêts à payer 4 milliards de dollars de plus par an pour y accéder si nécessaire - un témoignage de la valeur intrinsèque des GLAM pour les Canadiens.

Cette valeur est si grande que même les non-utilisateurs reconnaissent l'importance des GLAM pour la société en général et pour les générations futures. Les non-utilisateurs ont déclaré qu'ils seraient prêts à verser 22 dollars par an pour les musées, 17 dollars pour les galeries et les bibliothèques et 14 dollars pour les archives, à titre de don pour le maintien de ces institutions. Cela représente un montant supplémentaire de 2,2 milliards de dollars par an.

En tout, 96 % des personnes interrogées dans le cadre de l'étude ont déclaré que les musées contribuent à notre qualité de vie. En effet, l'étude a révélé que la visite des GLAM peut être liée à une amélioration de la santé et du bien-être - ce qui équivaut à recevoir une prime monétaire de 1 440 dollars par an.

Les visites de GLAM sont associées à de nombreux autres avantages sociétaux importants, notamment une plus grande alphabétisation, une plus grande curiosité, l'innovation, la connaissance et la créativité, un taux de bénévolat accru et un meilleur sens de la communauté. Il s'agit là de qualités incroyablement importantes dans un monde de plus en plus divisé.

Les utilisateurs peuvent également interagir directement avec les GLAM par l'intermédiaire de leurs sites web officiels, de leurs catalogues en ligne et de leurs pages de médias sociaux. L'étude a évalué la valeur de ces visites en ligne à 1,6 milliard de dollars par an.

Elle a également noté que les GLAM génèrent des avantages éducatifs importants pour le Canada, notamment par le biais de visites scolaires qui offrent aux enfants de tout le pays d'importantes occasions d'apprentissage. La valeur de ces visites est estimée à 3,1 milliards de dollars. Il a en outre été constaté que les bibliothèques universitaires apportent une contribution supplémentaire de 3,4 milliards de dollars et sont associées à des salaires et des revenus plus élevés sur la durée de vie active des étudiants.

Au total, on estime que la société tire chaque année près de 8,6 milliards de dollars de l'existence des GLAM. Ce n'est pas une petite contribution à la prospérité économique et sociale du Canada. Par conséquent, la préservation, la promotion et le développement des GLAM devraient être une préoccupation non seulement pour ceux d'entre nous qui travaillent dans ce secteur, mais aussi pour tous les Canadiens.

Le groupe de travail sur la Déclaration d’Ottawa

Jack Lohman, Royal BC Museum et Président de l’Association des musées canadiens, co-président Leslie Weir, Bibliothèque et Archives Canada, co-président

En ordre alphabétique :
Loubna Ghaouti, Université Laval
Paul Gilbert, Calliope Consulting
Anne-Marie Hayden, Association des musées canadiens
Chris Kitzan, Musée de l’aviation et de l’espace du Canada
Christine Lovelace, University of New Brunswick
Maureen Sawa, Greater Victoria Public Library
Vanda Vitali, Association des musées canadiens

Sommaire

En 2016, l’Association des musées canadiens, en partenariat avec Bibliothèque et Archives Canada ( BAC), a tenu un sommet sur la valeur des galeries, bibliothèques, archives et musées ( GLAM). Oxford Economics a participé à la discussion et recommandé que « la vaste communauté [des GLAM] envisage de collaborer activement pour recueillir des données et mener des études horizontales sur la valeur ». À la fin de 2018, l’Association des musées canadiens, au nom du Groupe de travail sur la Déclaration d’Ottawa, a chargé Oxford Economics d’entreprendre une étude nationale sur la valeur des GLAM au Canada.

150 M$
Nombre estimatif de visites aux galeries, bibliothèques, archives et musées canadiens en un an. De ce nombre, plus de 100 millions ont été effectuées dans des bibliothèques publiques et plus de 30 millions, dans des musées.

Les GLAM canadiens reçoivent chaque année quelque 150 millions de visiteurs, mais ils sont bien plus que de simples attractions touristiques. Ils préservent et mettent en valeur le patrimoine canadien au pays et partout dans le monde, tout en donnant accès à des ressources propices à l’éducation, à la recherche, à l’apprentissage et à la création artistique. Le présent rapport vise à rendre compte du rôle fondamental que jouent les GLAM à but non lucratif au Canada, à partir de mesures quantitatives de leur valeur et d’évaluations qualitatives des valeurs sociétales.

Méthode d’évaluation de la valeur des galeries, bibliothèques, archives et musées

Cette étude permet d’évaluer la valeur des GLAM à l’aide d’une analyse coûts-avantages ( ACA) dans un cadre de bien-être économique. Elle adopte une approche fondée sur la valeur économique totale ( VET), qui mesure les avantages économiques qui reviennent non seulement aux bénéficiaires directs, comme les visiteurs des GLAM, mais aussi aux « non-usagers », soit les personnes qui apprécient l’existence des GLAM, sans les avoir fréquentés dernièrement.

Bien qu’il soit relativement simple d’évaluer les coûts d’entretien et d’exploitation des GLAM, il est plus difficile d’en quantifier les avantages. Pour ce faire, il faut recourir à une gamme de techniques économiques correspondant à la diversité des activités qui y sont offertes. Il s’agit notamment de calculer la valeur des GLAM en tant qu’attractions touristiques, à partir du prix que les visiteurs paient réellement pour y avoir accès, mais aussi d’estimer la somme que ces derniers seraient disposés à payer en plus du prix du billet (appelée « surplus du consommateur »).

4,0 G$
« Surplus du consommateur » annuel total des visiteurs des GLAM au Canada. Il s’agit de la somme des montants supplémentaires que ces visiteurs seraient prêts à payer pour visiter les GLAM .

Pour évaluer la valeur de non-usage et la valeur sociale générale des GLAM, nous avons mené une enquête nationale auprès de 2 045 résidents canadiens (ci-après appelée l’« enquête nationale »). Des questions sur la volonté de payer ont été intégrées à cette enquête, et des quotas ont été imposés en fonction du sexe, de l’âge, du niveau de scolarité, de la langue (français/anglais) et de la province ou du territoire de résidence pour obtenir un échantillon représentatif de la population canadienne.

Valeur des glam pour leurs visiteurs

Sur la base de données plus récentes, on estime à 150 millions le nombre de visites du public aux GLAM chaque année. Certaines visites exigent des droits d’entrée et permettent donc à l’établissement de générer des revenus d’exploitation. Pour beaucoup d’autres, comme les bibliothèques, l’entrée est gratuite.

Les chercheurs utilisent diverses approches pour estimer la valeur que les visiteurs accordent aux GLAM. L’approche adoptée pour les visites en personne dans cette étude est la méthode du coût du trajet ( MCT), qui estime le surplus du consommateur en fonction de l’évolution de la demande advenant une hausse des frais d’admission par rapport aux prix actuels. Cette approche laisse voir un surplus du consommateur total de 4,0 milliards de dollars sur un an pour les visites en personne aux GLAM Footnote 2

1,6 G$
Valeur totale sur un an des services en ligne offerts par les GLAM. L’avènement des services en ligne a grandement facilité l’accès aux renseignements détenus par les GLAM ces dernières années.

Valeur de non-usage des glam

Outre les avantages pour les visiteurs, il faut également évaluer la valeur sous-jacente que les Canadiens accordent aux GLAM, qu’ils les visitent ou non. Cette valeur découle du fait que, peu importe s’ils les visitent ou non, les Canadiens apprécient ces établissements et veulent qu’ils soient soutenus. Cette soi-disant valeur de non-usage comporte un certain nombre d’aspects, notamment :

  • la valeur que les gens attachent à l’existence des GLAM, qu’ils les visitent ou non (valeur d’existence);
  • la valeur accordée à la préservation des GLAM au profit des générations à venir (valeur de legs);
  • la valeur d’avoir la possibilité de visiter des GLAM à un certain moment à l’avenir (valeur d’option).

Pour quantifier ces valeurs intrinsèques, notre enquête nationale a permis d’examiner le montant maximal que les gens seraient prêts à verser chaque année à titre de don pour maintenir l’ensemble des GLAM à but non lucratif du Canada. Les répondants qui n’ont pas visité de GLAM au cours des 12 derniers mois se disent disposés à verser 22 $ par année pour les musées, 17 $ pour les galeries et bibliothèques et 14 $ pour les archives. En considérant ces montants comme la valeur de non-usage des GLAM sous-jacente pour tous les Canadiens de 16 ans et plus, nous estimons une valeur de non-usage totale de 2,2 milliards de dollars pour l’ensemble de ce secteur au Canada.

3,1 G$
Total des avantages éducatifs pour les étudiants. Il s’agit de la valeur de la contribution éducative des GLAM pour les étudiants et la société dans son ensemble.

Valeur éducative des glam pour les étudiants

Les GLAM procurent également d’importants avantages sur le plan de l’éducation au Canada, notamment l’apprentissage que les visites scolaires procurent aux enfants partout au pays. L’estimation du rendement de l’éducation ne se fait pas facilement, mais les économistes reconnaissent depuis longtemps l’existence de ce rendement et le mesurent selon la valeur qu’apporte l’éducation aux salaires futurs. Nous avons adopté cette méthode pour donner une valeur totale de 3,1 milliards de dollars aux avantages éducatifs qu’offrent les GLAM (découlant des visites scolaires).

Valeur du contenu en ligne des glam

Les visites en ligne sont une autre façon pour les usagers d’interagir directement avec les GLAM; elles constituent donc un autre type de surplus du consommateur qui doit être pris en considération au moment d’estimer leur valeur totale. Nous estimons que la valeur en ligne des GLAM (soit le surplus du consommateur) équivaut à 1,6 milliard de dollars par année. Ce chiffre englobe la consultation des sites Web officiels et des catalogues des GLAM, ainsi que des comptes Facebook, Twitter et Instagram, mais excluent les autres portails de médias sociaux.

1 440 $
Valeur annuelle des GLAM pour l’usager moyen en ce qui concerne l’amélioration de son bien-être. Mesuré selon les effets des GLAM sur la santé.

Avantages globaux

Au-delà des valeurs décrites jusqu’à présent, les GLAM offrent des avantages plus généraux (« externalités ») qui peuvent ne pas être mesurés par le surplus du consommateur d’un usager ou d’autres méthodes d’évaluation directe. Certains de ces avantages généraux sont difficiles à intégrer dans une analyse coûts-avantages, mais il est néanmoins important de les reconnaître.

Cela dit, l’un des avantages généraux des GLAM que nous sommes en mesure de quantifier est leur effet sur le bien-être. La modélisation par régression des données issues de notre enquête nationale a donné une estimation monétaire de l’avantage équivalent en matière de bien-être conféré par l’usage des GLAM. Selon cette estimation, la valeur annuelle des GLAM pour l’amélioration du bien-être d’un usager moyen (mesurée par les effets sur la santé) équivaut à 1 440 $. En d’autres termes, la visite de GLAM a le même effet sur le bien-être que l’obtention d’une prime monétaire de 1 440 $ par année.

Analyse multicritères

Les GLAM ont une valeur sociale intrinsèque dont les cadres économiques ne peuvent rendre compte. Nous avons donc également procédé à une analyse multicritères ( AMC) pour évaluer l’importance perçue et le degré d’efficacité de ces attributs. Notre AMC montre que le grand public et les intervenants des GLAM ont tendance à s’entendre sur les objectifs les plus importants pour les GLAM : alors que les archives, les galeries et les musées jouent un rôle clé dans la préservation du patrimoine canadien, les bibliothèques sont essentielles à l’accès aux ressources de recherche.

RCA de 3,9
Pour chaque dollar investi dans les GLAM, la société en retire presque quatre. Rapport coûts-avantages (RCA) des GLAM .

Analyse coûts-avantages des glam

En combinant tous les éléments de valeur, nous avons été en mesure de quantifier en avantages la valeur brute totale des GLAM pour le Canada, qui est de 11,7 milliards de dollars par année (selon les prix de 2019). Ces avantages estimatifs découlent de frais annuels (dépenses d’exploitation nécessaires pour faire fonctionner les GLAM) de 3,0 milliards de dollars. En divisant les avantages de 11,7 milliards de dollars par les frais de 3,0 milliards, on obtient un rapport coûts-avantages (RCA) de 3,9. C’est donc dire que, pour chaque dollar investi dans les GLAM à but non lucratif, la société obtient près de quatre dollars en retour. Les GLAM affichent un rendement très favorable par rapport aux autres grands investissements sociaux, comme l’infrastructure de transport.

Il est également utile de mettre en évidence les avantages nets des GLAM; certains préfèrent cette approche, car elle indique à quel point la société s’en porte mieux dans l’ensemble. Nous estimons que la société gagne 8,6 milliards de dollars de la seule existence des GLAM chaque année.

Fig. 1. Sommaire des coûts et avantages des GLAM, prix de 2019
M$ en 2019 Galeries Bibliothèques Archives Musées Tous les GLAM
Recettes 222 31 22 451 727
Valeur de non-usage 536 537 446 693 2 212
Valeur d’usages 615 1 797 185 1 374 3 972
Usage en ligne 378 636 353 277 1 644
Valeur éducative 435 1 361 41 1 271 3 108
Avantages totaux 2 185 4 362 1 047 4 067 11 662
Coût d’exploitation 556 955 395 1 106 3 012
Coût total 556 955 395 1 106 3 012
Rapport coûts-avantages ( RCA) 3,9 4,6 2,7 3,7 3,9
Avantages nets 1 629 3 408 652 2 961 8 650

Glossaire

Terme
Définition
ACA
Analyse coûts-avantages. Processus par lequel les avantages des établissements ou des initiatives (comme les GLAM) sont mesurés par rapport à leur coût.
AFA
Alberta Foundation for the Arts.
ALC
Americans for Libraries Council.
AMC
Analyse multicritères. Méthode qualitative utilisée pour donner un aperçu plus global des avantages. Les répondants évaluent explicitement les critères utilisés pour prendre des décisions dans les principaux domaines d’intérêt.
Anciens usagers
Personnes qui ont visité des GLAM canadiens dans le passé, mais pas au cours des 12 derniers mois.
Archives
Établissements qui collectent, conservent, et donnent accès aux dossiers ou aux documents ayant un valeur historique.
BAC
Bibliothèque et Archives Canada.
Bibliothèques
Établissements qui offrent des collections de ressources, en particulier des livres, servant à la lecture et à l’étude, en plus de vastes ensembles de ressources et de services d’information qui peuvent également être de nature virtuelle.
Bibliothèques publiques
Établissements qui fournissent gratuitement des ressources et des services à tous les résidents d’une collectivité ou d’une région donnée. Les bibliothèques publiques sont habituellement financées en grande partie par des sources publiques.
Bibliothèques universitaires
Bibliothèques qui appuient les activités de recherche et d’apprentissage des étudiants et des chercheurs universitaires; normalement rattachées aux établissements d’enseignement supérieur.
Capital social
Renvoie à la valeur inhérente aux communautés ayant des normes, des valeurs et des conceptions sociales communes et cohérentes, lesquelles facilitent à leur tour une plus grande coopération au sein des groupes ou entre eux. Le capital social peut découler d’activités sociales comme la mobilisation communautaire, la confiance envers les personnes et les institutions démocratiques, un faible niveau de criminalité et de solides valeurs civiques.
CBUC
Conseil des bibliothèques urbaines du Canada.
EC
Évaluation contingente. Technique d’enquête servant à évaluer l’appréciation qu’ont les gens envers certaines ressources, mais qui n’est pas nécessairement bien rendue par les mesures types du marché – p. ex., la valeur des GLAM pour ceux qui ne les utilisent pas.
Éducation formelle
Enseignement dispensé ou supervisé par des enseignants qualifiés dans le cadre d’un programme scolaire, d’enseignement supérieur ou universitaire, par opposition à l’éducation informelle.
Éducation informelle
Apprentissage entrepris en dehors d’un programme d’études structuré dans les temps libres d’une personne, notamment l’auto-apprentissage et/ou l’apprentissage par l’expérience.
Effets sur le bien-être
Sentiments positifs généraux pouvant être liés aux GLAM et se manifester par une connexion spirituelle positive, la santé, le bonheur, l’inspiration et la mobilisation communautaire.
ESDS
Service de données économiques et sociales du Royaume-Uni.
Galeries
On entend ici des établissements qui choisissent et préservent les œuvres d’art et les rendent accessibles au public. En organisant des expositions et des programmes, les galeries font progresser la connaissance, la compréhension et l’appréciation des arts, aident à soutenir la recherche et inspirent la créativité.
GLAM
Galeries, bibliothèques, archives et musées.
GTDO
Groupe de travail sur la Déclaration d’Ottawa.
MCT
Méthode du coût du trajet. Méthode économique servant à estimer la valeur de biens non marchands comme les arts et la culture. La technique consiste généralement à estimer les coûts d’accès des visiteurs aux institutions comme les GLAM (p. ex., les tarifs, le temps et les droits d’entrée) et à s’en servir pour déterminer le surplus du consommateur.
Musées
Une institution à but non lucratif, ouverte au public et au service du développement social, qui collecte, conserve, interprète et expose au public des objets de valeur culturelle, artistique, scientifique et historique à des fins d’éducation, de recherche et de divertissement.
Non-usagers
Personnes qui n’ont pas utilisé de GLAM au cours des 12 derniers mois (ou qui ne les ont jamais utilisés du tout).
OCDE
Organisation de coopération et de développement économiques.
PIB
Produit intérieur brut.
PSQG
Public Services Quality Group du Royaume-Uni
RCA
Rapport coûts-avantages. Rapport obtenu en divisant les avantages totaux par le coût total. Dans ce cas, le rapport représente effectivement le rendement de chaque dollar investi dans les GLAM.
R et D
Recherche et développement.
Retombées
Effets d’entraînement qui surviennent lorsque les conséquences des actions personnelles ou organisationnelles ne sont pas pleinement appréciées par les personnes concernées. Les retombées positives sont notamment un plus grand nombre de personnes qui font du bénévolat ou ont de bonnes relations de voisinage, ce qui inspire d’autres personnes à faire de même.
RTA
Régions de tri d’acheminement (les trois premiers caractères des codes postaux canadiens utilisés pour désigner les régions géographiques).
Surplus du consommateur
Différence entre le montant maximal que les consommateurs sont prêts à payer pour utiliser un bien ou un service (comme l’accès aux GLAM) et le coût réel de l’usage. Cette différence est considérée comme une mesure des avantages pour les consommateurs.
Surplus du producteur
Différence entre les recettes perçues par le producteur (dans ce cas, les GLAM) et le montant minimal avec lequel ce dernier aurait pu offrir les services. En gros, le surplus du producteur équivaut aux profits du producteur.
TIC
Technologies de l’information et des communications.
Usagers actuels
Personnes qui ont utilisé les GLAM au cours des 12 derniers mois.
VAN
Valeur actualisée nette. Valeur nette des avantages futurs, moins les coûts futurs, à laquelle un taux d’actualisation est appliqué pour convertir ces chiffres en termes actuels.
VDP
Volonté de payer. Montant maximal en dollars que les gens verseraient (ou laisseraient aller) pour avoir accès à des institutions comme les GLAM. Il s’agit d’une mesure de la valeur que les gens accordent aux GLAM en fonction de leurs préférences personnelles.
VET
Valeur économique totale. Mesure des avantages économiques des institutions comme les GLAM pour la collectivité, ce qui comprend l’estimation de la valeur de non-usage (c.-à-d. la valeur des GLAM pour la société, que les personnes les utilisent ou non).

1. Introduction

1.1 À propos de cette étude

En décembre 2016, l'Association des musées canadiens ( AMC), en partenariat avec Bibliothèque et Archives Canada ( BAC), a tenu un sommet à Ottawa pour explorer la valeur des galeries, des bibliothèques, des archives et des musées (Taking it to the Streets : Sommet sur la valeur des bibliothèques, des archives et des musées dans un monde en mutation). Le sommet a abouti à la création du Groupe de travail sur la Déclaration d'Ottawa ( GTDO), dont le mandat est d'explorer et d'étudier comment les galeries, les bibliothèques, les archives et les musées ( GLAM) apportent une valeur à la société canadienne. Le sommet et la Déclaration sont le résultat du travail concerté de M. Guy Berthiaume, bibliothécaire et archiviste du Canada, appuyé par le personnel de Bibliothèque et Archives Canada et de l' AMC.

Le GTDO était coprésidé par le Dr Berthiaume et le Dr John McAvity, directeur général et chef de la direction de l' AMC. Messieurs Berthiaume et McAvity ainsi que les membres du GTDO ont poursuivi leurs efforts pour explorer la valeur des GLAM après le sommet. En conséquence, à la fin de 2018, l' AMC, au nom du GTDO, a chargé Oxford Economics d'entreprendre une étude nationale sur la valeur des GLAM au Canada. Cette étude a été rendue possible grâce aux contributions financières de Patrimoine canadien, de la Fondation McConnell et de Mme Rosamund Ivey.

Dans le présent rapport, le terme « GLAM » fait référence aux types d’établissements suivants :

  • les galeries publiques à but non lucratif dont le but principal est la communication plutôt que la vente;
  • les bibliothèques publiques à but non lucratif dans les municipalités et les régions, les bibliothèques autochtones, les bibliothèques universitaires des établissements d’enseignement postsecondaire canadiens, les bibliothèques spécialisées (par exemple, dans les hôpitaux, les musées, les galeries d’art et les jardins botaniques et celles offrant des services aux personnes handicapées) et les bibliothèques provinciales, territoriales et nationales;
  • les archives publiques à but non lucratif dans les municipalités et les régions, les archives autochtones, les archives des établissements d’enseignement postsecondaire canadiens et les archives provinciales, territoriales et nationales;
  • les musées publics à but non lucratif dans les municipalités et les régions, les musées autochtones et les musées des établissements d’enseignement postsecondaire canadiens.

1.2 Avantages des GLAM

Les GLAM canadiens reçoivent chaque année quelque 150 millions de visiteurs, mais ils sont bien plus que de simples attractions touristiques. Ils préservent et mettent en valeur le patrimoine canadien au pays et partout dans le monde, tout en donnant accès à des ressources qui favorisent l’éducation, la recherche et la création artistique, et ils jouent un rôle clé pour mobiliser les collectivités partout au Canada.

Ce chapitre passe en revue la documentation existante qui démontre la valeur et l’ampleur des avantages qu’offrent les GLAM à la société. Malgré les nombreux chevauchements entre les types de GLAM, nous présentons les quatre types d’établissements séparément afin de mieux mettre en évidence leurs forces respectives. De plus amples renseignements sur les avantages globaux des GLAM sont présentés au chapitre 8 et aux annexes 4 et 5 du présent rapport.

1.2.1 Galeries

Les galeries sélectionnent et préservent les œuvres et les rendent accessibles au public. En organisant des expositions et des programmes, les galeries font progresser la connaissance, la compréhension et l’appréciation des arts, aident à soutenir la recherche et inspirent la créativité. De plus, les galeries offrent des contenus conçus pour sensibiliser le public au rôle et à la pertinence de l’art dans le passé et dans la société d’aujourd’hui.

Il est de plus en plus répandu d’admirer des œuvres d’art sur l’écran d’un ordinateur portable et d’un téléphone intelligent depuis une décennie, vu la croissance exponentielle d’Internet et des médias sociaux. Bien qu’il puisse s’agir d’un outil utile pour accéder à des œuvres d’art dans le confort de la maison, les chercheurs soutiennent que l’art admiré en personne apporte de plus grands avantages pour la société et pour les individus.

L’analyse des données effectuée par Hill Strategies au Canada montre que la visite d’une galerie d’art a un lien apparent avec plusieurs indicateurs sociaux positifsFootnote 3. Fig. 2 compare un certain nombre de dimensions chez les personnes ayant visité une galerie à celles qui n’en ont pas visité en 2010. Les visiteurs de galeries d’art sont beaucoup plus susceptibles de se dire en très bonne ou en excellente santé (physique et mentale) et de faire du bénévolat.

Fig. 2. Santé, bien-être et liens sociaux des visiteurs de galeries d’art en 2010 figure 2

Source: Hill Strategies

Figure description

Néanmoins, ces chiffres généraux n’ont pas tenté de contrôler l’effet des variables démographiques. Des modèles économétriques (semblables à ceux dont il est question au chapitre 8.2 du présent rapport) ont été créés pour vérifier si la visite d’une galerie a un lien avec le bien-être individuel, au-delà des caractéristiques démographiques. Les modèles de régression ont montré que la visite d’une galerie d’art est liée à une amélioration de la santé et à des taux de bénévolat plus élevés, même en maintenant inchangés d’autres éléments (comme la scolarité, les revenus, l’âge, la région, l’activité physique, etc.). Dans le modèle de santé, les visiteurs de galerie sont 35 % plus susceptibles de se dire en très bonne ou en excellente santé que les non-visiteurs, même après avoir tenu compte des autres caractéristiques démographiques. De même, les visiteurs de galeries d’art sont 89 % plus susceptibles d’avoir fait du bénévolat au cours des 12 derniers mois que les non-visiteurs, même en tenant compte d’autres facteurs.

De façon plus générale, l’exposition à l’art présente plusieurs avantages pour la sociétéFootnote 4 ; de récentes études ont révélé que les indicateurs de satisfaction, de qualité de vie ou de bonheur sont en corrélation positive avec la participation à des activités artistiques et culturelles.

Une étude a révélé une corrélation positive entre la participation aux arts ou être un public de la communauté artistique et une augmentation des taux de bien-être mental ou de satisfaction à l’égard de la vie.Footnote 5 Des recherches antérieure ont également que les programmes d’arts communautaires permettent de renforcer le capital social en augmentant la capacité et la motivation des participants à jouer un rôle dans la vie civique.Footnote 6 Selon cette recherche, les programmes d’arts communautaires permettent souvent de mobiliser les personnes de milieux défavorisés (jeunes à risque, minorités, résidents de quartiers pauvres) et visent des objectifs comme la régénération esthétique du milieu ou la sensibilisation au multiculturalisme.

Conformément à ce constat, les données anecdotiques du Canada soutiennent également la pertinence des programmes d’arts communautaires pour les jeunes à risque. Ainsi, le Power of the Arts Forum tenu à Calgary en 2012 a étudié l’exemple de l’Antyx Community Arts de Calgary, qui soutient que les jeunes utilisent les arts et la culture pour insuffler un changement social. Dans le cadre de ce forum, certains participants au programme du Calgary Youth Offender Centre ont témoigné des effets positifs de ce programme créé pour eux.Footnote 7

De même, une méta-étude menée en 2011 a examiné 24 articles (dont certains étaient canadiens) portant sur des enfants de 3 à 16 ans.Footnote 8 Elle a permis de constater que la participation à des activités et événements artistiques organisés améliore la réussite des études secondaires, les compétences en littératie des jeunes enfants, les capacités cognitives et les compétences transférables.

Enfin, un rapport canadien de 2012 produit par l’Alberta Foundation for the Arts ( AFA) a révélé que les arts et la culture contribuent à l’épanouissement et au dynamisme des quartiers.Footnote 9 Le maintien d’une solide présence des arts a été jugé essentiel pour maintenir le bien-être des collectivités et pour attirer tant les nouveaux résidents que les visiteurs. Les collectivités au sein desquelles les arts sont très présents se sont également révélées plus connectées et mobilisées, de même que plus susceptibles de favoriser des interactions positives entre divers groupes.

1.2.2 Bibliothèques

Les bibliothèques sont des pierres angulaires essentielles aux collectivités locales. En plus de donner accès à une foule de ressources propices à la lecture, à l’éducation et à la recherche, elles aident les gens à parfaire leurs compétences, à trouver un emploi et à vivre un fort sentiment d’appartenance, entre autres choses.

Une récente étude commandée par le Arts Council of England a fait un survol de la littérature sur les avantages sociaux et éducatifs des bibliothèques et examiné plus en détail cinq domaines d’influence.Footnote 10

Le premier domaine d’influence concerne l’éducation et le développement personnel des enfants et des adolescents. Grâce à leur offre de services de base et à des activités ciblées pour les enfants et les adolescents, les bibliothèques encouragent la lecture,Footnote 11 ce qui en retour favorise le développement du langage, la littératie et le rendement scolaire en général.Footnote 12 En même temps, les bibliothèques soutiennent directement la réussite scolaire.Footnote 13 Une meilleure réussite scolaire se traduit par l’amélioration de l’employabilité ainsi que de la santé et du bien-être des enfants et des adolescents au fil de leur développement.Footnote 14 Une meilleure employabilité génère ensuite une activité économique et des recettes fiscales, ainsi que des économies publiques grâce à la réduction des prestations d’aide sociale et des dépenses de santé publiques.

Le deuxième domaine d’influence est l’éducation des adultes, l’acquisition de compétences et l’employabilité. Grâce aux mêmes canaux que ceux décrits ci dessus, les bibliothèques encouragent la lecture et l’apprentissage chez les adultes et les aident à trouver un emploi.Footnote 15 Ces influences se traduisent par une amélioration de l’alphabétisation des adultes et du développement des talents, ce qui favorise en retour un meilleur niveau de santé, de bien-être et d’employabilité. En outre, parallèlement, la recherche d’emploi améliore directement l’employabilité.Footnote 16 Une meilleure employabilité se traduit par une augmentation de l’activité économique, de l’épargne publique et des recettes fiscales.

Le troisième domaine d’influence concerne la santé et le bien-être. En augmentant les niveaux de lecture chez les enfants et les adultes, ainsi qu’en leur offrant des activités ciblées liées à la santé, les bibliothèques peuvent favoriser le bien-être mental et physique et soutiennent les partenaires du milieu de la santé dans la prestation de leurs services.Footnote 17 Selon les données probantes, les efforts de prévention s’en trouvent ainsi améliorer, notamment grâce à la promotion de l’activité physique et des modes de vie sains et à la sensibilisation aux facteurs de la mauvaise santé.Footnote 18 Comme mentionné précédemment, tout cela se traduit en bout de ligne par des économies publiques.

Le quatrième domaine d’influence est le soutien et la cohésion de la collectivité. En tant que centres de quartier, les bibliothèques offrent un milieu gratuit, ouvert à tous et accueillant pour leurs collectivités locales et leurs fournisseurs de services, en plus de rendre l’information locale accessible à tous leurs visiteurs.Footnote 19 Selon les données probantes, elles augmentent ainsi le capital social en favorisant une plus grande mixité sociale et à une confiance accrue envers les gens et les institutions.Footnote 20

Le cinquième et dernier domaine d’influence est l’offre numérique. Les bibliothèques soutiennent l’intégration numérique de leur collectivité en donnant aux usagers un accès de base aux ordinateurs connectés à Internet, ainsi qu’aux programmes d’éducation ciblés sur les TIC (technologies de l’information et des communications).Footnote 21 Ce service contribue à combler le fossé numérique, par exemple en donnant accès aux services publics et aux prestation sociales en ligne, ainsi qu’en offrant aux usagers la possibilité de participer à la vie publique et civique en ligne. Ceci peut se traduire par des économies publiques.Footnote 22

1.2.3 Archives

Les archives jouent un rôle fondamental en fournissant une preuve des activités passées. Les archives conservent des documents sur les sphères politique, économique et sociale de la vie, ainsi que sur les réalisations dans les domaines des arts, de la culture et des sports, ce qui nous aide à découvrir notre histoire et notre société et à renforcer notre sentiment d’identité. Les archives nous permettent de tenir les gouvernements responsables de leurs actions et contribuent souvent à faire en sorte que justice prévale. Toutefois, les études existantes portant sur les avantages sociaux des archives sont plutôt limitées, comme l’indique le reste du présent chapitre.

Yakel et coll. (2012) ont analysé les données de 23 archives gouvernementales au Canada, qui ont accepté pendant deux semaines de demander à chaque visiteur en personne de répondre à un sondage.Footnote 23 Dans le questionnaire, les auteurs ont demandé aux répondants de donner leur opinion sur l’influence sociale des archives en fonction de cinq dimensions : la possibilité d’apprendre, la préservation de la culture et du patrimoine, le renforcement de l’identité, le soutien des activités commerciales et la défense des droits des citoyens. La réponse au sondage se faisait sur une échelle de 1 (tout à fait d’accord) à 5 (tout à fait en désaccord); les répondants canadiens étaient largement d’accord avec toutes les dimensions (Fig. 3). Le soutien aux archives en tant que moyen de préserver la culture et le patrimoine s’est classé au premier rang, avec une moyenne de 1,13, et le soutien aux activités commerciales est arrivé bon dernier, avec une moyenne de 1,84.

Fig. 3. Répercussions sociales des archives (répondants canadiens seulement) figure 3

Source: Yakel et al. (2012)

Figure description

Des résultats similaires ont été obtenus par le Public Services Quality Group ( PSQG) britannique dans le cadre d’un sondage mené auprès des visiteurs des archives qui demandait aux répondants d’évaluer la contribution des archives à la société en fonction de plusieurs dimensions similaires (Fig. 4).

Fig. 4. Les archives contribuent à la société en…

Pourcentage des répondants qui sont tout à fait d'accord ou d'accord

figure 4

Source: PSQG 2004

Figure description

En plus des grandes répercussions sur la société, les archives semblent influencer également les usagers, d’après les résultats de l’enquête du PSQG de 2002, qui a fourni des renseignements supplémentaires sur les répercussions personnelles perçues (Fig. 5).Footnote 24

Fig. 5. Les usagers estiment que les archives…

Pourcentage des répondants qui sont d'accord

figure 5

Source: PSQG 2002

Figure description

Enfin, les données du Royaume-Uni donnent à penser que les archives peuvent jouer un rôle important pour favoriser l’inclusion sociale. Cette dernière est facilitée à la fois par le développement de l’identité personnelle (plusieurs répondants ont souligné l’importance des données probantes sur les naissances, les mariages et les décès comme moyen d’acquérir un sentiment d’identité et une confiance en soi) et par le développement de l’identité communautaire (la collaboration entre la collectivité et les archives peut inspirer non seulement un sentiment d’appartenance et de l’intérêt pour l’histoire, mais aussi promouvoir la participation citoyenne).

Grâce à leur rôle clé de fournisseurs d’information dans le cadre du processus démocratique et de l’exercice des droits des citoyens informés, les archives peuvent également avoir une influence sans pareille dans l’atteinte de l’objectif d’inclusion sociale du gouvernement.Footnote 25 Dernier point, mais non le moindre, certaines données empiriques provenant de groupes de discussion au Royaume-Uni donnent à penser que les archives offrent aux nouveaux membres d’une communauté la possibilité de s’enraciner.Footnote 26

1.2.4 Musées

Les musées ont pour rôle fondamental de raconter l’histoire de l’humanité et de la nature au fil des siècles.Footnote 27 Ils mettent en vedette des objets fabriqués par la nature et par l’homme qui témoignent de la richesse culturelle des villages, des villes et des nations. Au début des années 2000, une enquête menée auprès de 2 400 Canadiens a été entreprise pour connaître l’opinion des gens à l’égard des musées.Footnote 28 Selon les résultats de l’enquête, la grande majorité des répondants estiment que les musées jouent un rôle utile dans la présentation et l’explication des réalisations artistiques (94 %) et des réalisations en sciences et en technologie (96 %) du Canada. Quelque 97 % croient que les musées jouent un rôle utile dans l’explication du patrimoine naturel du Canada, et une proportion semblable estiment que les musées jouent un rôle essentiel pour préserver les objets et la connaissance de l’histoire du Canada. Il est fort probable que ces résultats soient tout aussi vrais ailleurs qu’au Canada; par exemple, les données du Royaume-Uni laissent voir que les musées servent de rappel d’événements communs à toute la société et aident donc à construire la mémoire collective.Footnote 29

La présence d’objets originaux dans les musées contribue également à les rendre dignes de confiance aux yeux des usagers. Dans leur étude, Conrad et coll. (2009) examinent comment les Canadiens intègrent le passé dans leur vie quotidienne. Lors de la collecte des données, ils ont demandé aux répondants de réfléchir à la fiabilité des sources d’information sur le passé.Footnote 30 Plus de 40 % des répondants ont indiqué que les musées étaient la source la plus fiable. Trois raisons semblent justifier ce choix : la disponibilité des artéfacts et des documents primaires, la conviction de la neutralité des musées puisqu’ils sont administrés par des professionnels et l’assurance découlant de l’utilisation de plusieurs sources d’information.

Fait étonnant, 96 % des répondants à l’enquête canadienne sur les musées disent également croire que les musées contribuent à la qualité de vie. Cette influence positive est largement reconnue dans la littérature; par exemple, Silverman (2010) suggère que les musées contribuent à la santé et au bien-être en : I) encourageant la relaxation; II) suscitant un changement positif instantané dans la physiologie et/ou les sentiments; III) favorisant la contemplation, qui peut avoir des effets positifs sur la santé mentale; IV) facilitant l’éducation en matière de santé; V) jouant le rôle de défenseur de la santé publique et améliorant les milieux de soins de santé.Footnote 31

Comme exemple éloquent de ces effets, mentionnons le récent programme de thérapie par l’art offert par le Musée des beaux-arts de Montréal, qui permet aux médecins de prescrire des visites au musée à des personnes souffrant de problèmes de santé mentale, d’autisme ou de troubles alimentaires ou ayant des difficultés liées à l’apprentissage, à la vie commune et à l’inclusion sociale.

Les recherches universitaires sur les patients psychiatriques ont également montré que les objets du musée pourraient « faciliter le counseling en cas de maladie, de décès, de perte et de deuil, ainsi que contribuer à rétablir la dignité, le respect et le sentiment d’identitéFootnote 32 ». De nombreux articles montrent également que les interventions muséales ont des effets positifs sur le bien-être émotionnel, comme en témoignent les résultats déclarés, notamment le sentiment de connexion et d’appartenance, l’amélioration des compétences, l’optimisme, le sentiment d’espoir et l’estime de soiFootnote 33 Par ailleurs, certains auteurs ont souligné le rôle des musées en tant qu’agents pour stimuler l’inclusion sociale et diminuer les réflexes d’exclusion sociale dans les collectivités en offrant des milieux et des pratiques pour réexaminer les comportements, les manières et les opinions.Footnote 34

Enfin et surtout, les musées jouent un rôle éducatif fondamental tant pour les adultes que pour les enfants. Environ 68 % des répondants à l’enquête sur les musées canadiens estiment que ces établissements offrent à la fois une expérience éducative et récréative, sans parler des 15 % qui considèrent ces visites comme purement éducatives.

Environ 92 % de tous les répondants croient qu’il est important que les enfants fréquentent les musées. Selon un récent examen de la documentation, il existe de plus en plus de preuves que les expositions muséales, lorsqu’elles sont appuyées par des activités de facilitation, peuvent avoir une incidence positive sur l’attitude des enfants envers les sciences, ainsi que sur le travail d’équipe, les compétences en communication ainsi que la pensée critique dans les domaines de l’histoire, des sciences, des arts et des sciences humaines.Footnote 35

Par exemple, Burchenal et Grohe (2007) étudient l’incidence de l’adoption d’une stratégie de pensée visuelle (SPV), approche utilisée en classe et dans les musées pour favoriser le développement de la pensée critique.Footnote 36 En mettant l’accent sur la communication informelle entre un éducateur dans un musée et les élèves, la SPV consiste à interroger les enfants, en les exhortant à présenter des arguments à l’appui de leurs idées. En étudiant avec soin des objets artistiques et en en discutant, les enfants ont l’occasion d’établir des liens avec leurs expériences antérieures et leurs connaissances pour donner un sens aux œuvres d’art chacun à sa manière. Les auteurs ont montré que la méthode de la SPV est efficace pour soutenir le développement de la pensée critique chez les enfants.

1.3 Quantifier les avantages des GLAM

Cette étude vise à quantifier les avantages des GLAM pour la société et à les mettre en contexte en les comparant aux coûts d’exploitation du secteur. Il est facile d’évaluer les coûts d’exploitation à partir des statistiques de Patrimoine canadien et des bibliothèques publiques canadiennes, mais il est beaucoup moins simple de quantifier la pleine valeur de tous les avantages qu’offre le secteur.Footnote 37 Pour y parvenir, nous devons donc utiliser des techniques d’analyse sophistiquées, comme expliqué ci-dessous.

Dans de nombreux cas, les avantages économiques ou la valeur d’une entreprise ou d’un établissement peuvent être mesurés en fonction de certains paramètres du marché, comme leur contribution au « produit intérieur brut » ( PIB) et à l’emploi. Même si ces paramètres sont bien connus et compris, ils ne représentent qu’une partie de la valeur générée par certains types d’activités économiques, particulièrement dans le cas des musées et des autres institutions culturelles. De nombreuses institutions culturelles emploient seulement un petit nombre de personnes, et leur contribution au PIB national est parfois assez faible. Cependant, leur valeur sociale dépasse souvent, et de loin, cette contribution « directe », ce qui démontre bien la nécessité de trouver une meilleure méthode pour évaluer la valeur qu’elles apportent, tant pour la société que pour les personnes qui les fréquentent.

Une évaluation de la « valeur économique totale » ( VET) est la méthode idéale dans ce cas.Footnote 38 Établie dans le cadre du bien-être économique (plutôt qu’en fonction des comptes nationaux, lesquels constituent le fondement du PIB), l’évaluation de la VET est une forme d’analyse coûts-avantages ( ACA) qui vise à établir et à regrouper les diverses valeurs accordées à un établissement ou à un secteur par la société. Dans le cas des GLAM, les avantages se divisent en deux principales catégories : valeur d’usage direct et valeur de non-usage (Fig. 6). Nous examinerons chacune de ces catégories à tour de rôle.

Fig. 6. Cadre de la valeur économique totale des GLAM figure 4
Figure description

1.3.1 Valeur d’usage direct

La valeur d’usage direct est la valeur attribuée aux GLAM par les personnes qui les utilisent. Elle est calculée à partir de divers renseignements sur les usagers des services fournis par les GLAM, ainsi que de données sur les revenus générés par les GLAM à partir des droits payés par les usagers.

Une composante importante de la valeur d’usage direct est la valeur d’usage en personne. En théorie, cette valeur représente la somme de la « volonté de payer » des visiteurs pour fréquenter les GLAM. En pratique, la volonté de payer des visiteurs est calculée en additionnant :

  • le coût que les personnes paient réellement pour se procurer un billet d’entrée aux GLAM (s’il y a lieu);
  • la différence entre ce coût et le montant maximal que les visiteurs seraient disposés à payer pour visiter le GLAM. Cette différence est connue sous le nom de « surplus du consommateur ».

Cette approche repose sur l’hypothèse selon laquelle l’évaluation que fait chaque personne de sa visite dépasse habituellement le coût à verser pour la faire. Elle est donc très différente de la simple prise en considération des prix du marché pour estimer la valeur d’un établissement.

Si les visiteurs des GLAM accordaient à leur visite exactement la même valeur que celle du coût d’entrée, on pourrait donc dire que ce qu’ils donnent pour chaque visite et reçoivent en retour s’équivaut et ils seraient indifférents entre visiter ou non un GLAM. En réalité, ils visitent les GLAM parce qu’ils estiment tirer profit de l’expérience qui dépasse le simple coût d’entrée, ce qui en fait une visite appréciable. Dans le domaine du bien-être économique, cette valeur supplémentaire est considérée comme le surplus du consommateur.

Par exemple, un visiteur peut accepter de payer un droit d’entrée de 10 $ pour visiter le Musée du Nouveau-Brunswick à Saint John, mais en profiter tellement qu’il aurait été prêt à le visiter même si le prix du billet avait été de 15 $. Le surplus du consommateur pour une telle personne serait de 5 $. Si un second visiteur n’était disposé à payer que 12 $ pour la visite, son surplus du consommateur serait de 2 $. De cette façon, les consommateurs tirent beaucoup plus d’avantages que le prix qu’ils paient pour visiter les GLAM.

En calculant le surplus du consommateur des visiteurs et en l’ajoutant au prix qu’ils paient pour un billet d’entrée dans le GLAM, nous pouvons estimer la « valeur d’usage direct » qu’accordent les visiteurs à l’établissement.

Diverses autres méthodes sont utilisées pour calculer d’autres aspects de la valeur de l’usage direct, comme le revenu, la valeur en ligne et la valeur éducative, comme l’expliquent les chapitres suivants de la présente étude.

1.3.2 Valeur de non-usage

La valeur de non-usage est celle qu’accordent aux GLAM les personnes qui ne les visitent pas, mais qui en tirent néanmoins des avantages. La valeur de non-usage est de trois types :

  • la « valeur d’existence », qui rend compte du fait que de nombreuses personnes apprécient la simple existence des GLAM et sont disposées à contribuer à leur maintien, même si elles n’ont pas l’intention de les visiter;
  • la « valeur de legs », qui rend compte de l’importance que les gens accordent aux établissements en tant que dépôts d’art, de production scientifique, de patrimoine historique et de littérature au profit des générations futures;
  • la « valeur d’option », qui rend compte de la valeur que les gens accordent à la possibilité de visiter des GLAM, même s’ils ne l’ont pas encore fait.

Dans une large mesure, ces sentiments de la valeur de non-usage se chevauchent et cohabitent pour de nombreux citoyens, qui sont donc considérés comme un groupe.

1.3.3 Avantages globaux

Outre la valeur d’usage direct et de non-usage, il y a la valeur représentée par les avantages globaux qu’offrent les GLAM. Il s’agit d’une valeur qui, bien que quantifiable, n’est pas intégrée à la VET pour diverses raisons méthodologiques ou conceptuelles. Néanmoins, il convient d’en souligner l’importance, et cette valeur est examinée dans un chapitre ultérieur du présent rapport.

1.3.4 Analyse coûts-avantages.

Après avoir quantifié tous les aspects de la valeur décrits ci-dessus, nous sommes en mesure d’établir l’évaluation sociale des GLAM en fonction des coûts de leur exploitation. Ce processus est connu sous le nom d’analyse coûts-avantages ( ACA). La division des avantages selon leur coût nous permet d’établir un « rapport coûts-avantages » ( RCA) pour le secteur et pour chaque type d’établissement. En termes simples, un RCA supérieur à 1,0 indique que les avantages d’un investissement dans une initiative ou un établissement (comme les GLAM) l’emportent sur les coûts pour la société. Il peut aussi être considéré comme une forme de rendement du capital investi (RCI) pour la société.Footnote 39 Nous pouvons également déduire les coûts des avantages au fil du temps pour estimer la valeur actualisée nette ( VAN).

Remarque concernant les approches axées sur le bien-être économique et l’impact économique

Comme susmentionné, la VET s’insère dans une approche axée sur le bien-être économique et tient compte de l’incidence à la fois sur le marché et hors marché. Il s’agit d’une approche différente de celle de l’impact économique, qui mesure des facteurs fondés sur le marché, comme le PIB et l’emploi, et utilise des multiplicateurs économiques. Les deux se chevauchent dans certains domaines, mais reposent sur des hypothèses divergentes et mesurent des choses différentes.

Le bien-être économique est axé sur le rendement (c.-à-d. le RCA ou le RCI) d'un investissement social donné (habituellement le montant consacré aux coûts d’exploitation et au capital, mais peut aussi concerner des éléments comme le coût du temps) et peut comprendre les valeurs marchande et non marchande, comme la valeur de non-usage. Il s’agit de déterminer si une initiative ou institution donnée permet d’améliorer l’efficacité économique (productivité), mais aussi son incidence, qui se mesure par le bien-être des personnes, en fonction de choses qu’il n’est pas toujours possible d’échanger sur les marchés (par exemple, la valeur de non-usage). Le bien-être économique permet donc d’établir une « règle de décision » pour déterminer si un investissement social en vaut la peine ou non (c.-à-d. un RCA ou une VAN).Footnote 40

L’analyse d’impact est axée sur les mesures du marché, comme les emplois et le PIB, lesquelles pourraient présenter un intérêt particulier dans certains contextes stratégiques. Malgré un certain chevauchement, certains éléments inclus dans l’approche axée sur le bien-être économique sont exclus de l’analyse d’impact et vice versa. Autrement dit, les études de l’impact économique mesurent l’activité économique en fonction de la contribution à l’économie dans son ensemble, ou la part du « potentiel économique » revenant à des institutions comme les GLAM. En comparaison, les études sur le bien-être économique mesurent les avantages nets (avantages moins coûts), c’est-à-dire la façon dont la société s’en porte mieux et la façon dont les institutions comme les GLAM augmentent ce potentiel économique. Ni l’une ni l’autre de ces approches n’est « meilleure » que l’autre; elles mesurent des choses différentes. L’annexe 1 présente plus en détail l’approche axée sur le bien-être économique adoptée dans la présente étude.

Fig. 7. Typologie des avantages
Inclus comme avantage dans l’étude du bien-être économique? Inclus comme avantage dans l’étude de l’impact économique? Commentaire
Surplus du producteur (profit) Oui Oui Partie du PIB.
Surplus du consommateur Oui Non Non échangé sur les marchés.
Effets à long terme sur la productivité (p. ex., éducation) Yes, where quantifiable Non L’impact suppose une productivité constante.
Valeur de non-usage Oui Non Non échangé sur les marchés.
PIB Non Oui Le PIB est une mesure d’impact clé.
Emploi Non Yes L’emploi est généralement considéré comme faisant partie des coûts (d’exploitation) dans le cadre d’une approche axée sur le bien-être économique.
Fournit une règle de décision Oui Non Un RCA supérieur à 1,0 indique que les avantages de l’investissement l’emportent sur les coûts.

Source : Oxford Economics

Coûts d’exploitation des glam

Pour offrir leurs services et programmes et exploiter leurs installations, les GLAM doivent engager d’importantes dépenses de fonctionnement et d’entretien. Ces coûts sont assumés par les organismes publics (au moyen des impôts), les entreprises privées (au moyen de commandites) et les établissements à même les recettes provenant de la vente de billets aux visiteurs.

Nous estimons que le secteur des GLAM a engagé des dépenses d’exploitation de 3,0 milliards de dollars en 2019. Plus du tiers de ce montant représente le coût d’exploitation des musées, tandis que près du tiers découle du coût d’exploitation des bibliothèques (Fig. 8). Le coût d’exploitation des galeries et des archives compte pour l’autre tiers des dépenses du secteur.

Fig. 8. Estimation des dépenses d’exploitation des GLAM, prix de 2019 figure 8

Source : Patrimoine canadien, CBUC, Oxford Economics

Figure description

Recettes d’exploitation des GLAM

La composante la plus évidente de la valeur créée par les GLAM est l’élément de valeur pour les visiteurs revendiqué sous la forme de droits d’entrée et d’adhésion. Nous estimons ces recettes à 725 millions de dollars en 2019, dont la grande majorité (93 %) proviennent des musées et des galeries, comme on peut s’y attendre.

Fig. 9. Recettes estimatives des GLAM, prix de 2019 figure 9

Source : Patrimoine canadien, CBUC, Oxford Economics

Figure description

Valeur pour les visiteurs des GLAM en personne

4.1 Contexte

Le présent chapitre traite de l’évaluation des GLAM à l’aide d’une approche connue sous le nom de méthode du coût du trajet ( MCT). La MCT a largement servi à étudier les lieux culturels et environnementaux dans le monde entier.

La valeur des bibliothèques universitaires est estimée dans un chapitre distinct (4.3), car il existe un certain nombre de considérations propres à ces établissements.

4.2 Méthode du coût du trajet

Un certain nombre de techniques ont été utilisées dans la documentation universitaire pour estimer la valeur d’« usage direct » qu’accorde les visiteurs à une attraction culturelle, notamment le simple sondage auprès des visiteurs, afin d’établir le prix qu’ils disent être disposés à payer pour visiter l’attraction. Toutefois, un inconvénient potentiel de cette approche est que les gens peuvent sous-estimer la véritable valeur de cette attraction et penser que l’enquête laisse entrevoir une hausse du prix des billets par l’établissement.

Une autre approche bien établie consiste à examiner les actions des visiteurs pour obtenir des indices sur la valeur qu’ils accordent à l’institution culturelle. Les méthodes qui suivent cette approche sont appelées techniques des « préférences révélées ».

L’une de ces techniques consiste à élaborer une « méthode du coût du trajet » ( MCT). Les visiteurs des GLAM viennent de partout au Canada (et du monde), et plus le trajet qu’ils doivent parcourir pour visiter l’établissement est long, plus le coût du trajet qu’ils auront engagé sera élevé. La MCT utilise l’analyse économétrique pour exploiter ces tendances afin de comprendre de quelle façon la propension des gens à visiter des GLAM diminue à mesure que le coût du trajet augmente. À partir de cette analyse, il est possible d’estimer le surplus du consommateur d’un visiteur. Ce dernier peut ensuite être ajouté au coût d’un billet pour le GLAM, afin de calculer la valeur réelle qu’accorde le visiteur à l’établissement. Il s’agit de l’approche que nous avons adoptée dans la présente étude.

Pour élaborer une méthode du coût du trajet pour les GLAM, nous avons eu besoin de renseignements sur les origines de leurs visiteurs. Plusieurs établissements recueillent des renseignements sur le lieu de résidence des visiteurs lorsqu’ils achètent un billet ou utilisent un service.

La MCT repose sur le fait que le trajet parcouru pour visiter une attraction, comme un musée ou une galerie, entraîne des coûts qui vont au-delà des droits d’entrée officiels. Le visiteur de GLAM doit assumer d’autres coûts pour s’y rendre, notamment des frais de carburant et autres coûts liés à l’usage d’un véhicule, des frais de stationnement et le « coût de renonciation » du temps qu’il consacre aux déplacements. La valeur nette d’une visite au GLAM après avoir tenu compte des frais de déplacement sera donc beaucoup plus élevée pour une personne qui vit à cinq kilomètres du GLAM que pour une personne qui vit à 100 kilomètres. Dans notre analyse, nous pouvons utiliser ces variations en frais de déplacement pour établir la valeur approximative de divers droits d’entrée aux GLAM.

Le degré de rareté des visiteurs vivant plus loin des GLAM nous permet de déduire à quel point le visiteur type est sensible aux changements du coût de la visite de l’établissement. Dès que nous comprenons l’ampleur de cette sensibilité (dont le nom technique est « élasticité de la demande par rapport au prix », souvent simplement appelée « élasticité »), nous pouvons calculer le montant maximal que les visiteurs seraient disposés à payer pour visiter le GLAM. La différence entre le montant maximal que les visiteurs seraient disposés à payer et le prix réel d’entrée pour visiter le GLAM est connue sous le nom de « surplus du consommateur ».

Dans le cadre de ce projet, nous avons élaboré une « méthode du coût du trajet par zone » ( MCTZ) sur mesure pour divers établissements.Footnote 41 Cette MCTZ consiste à diviser le pays en zones concentriques autour du GLAM puis, en fonction du lieu de résidence des visiteurs, à déterminer le taux de visite pour un certain nombre d’habitants de chaque zone.Footnote 42 Ainsi, lorsque 200 000 visiteurs d’un musée vivent dans une zone située à une distance de route de 10 à 20 kilomètres du GLAM et que la population totale de cette zone est d’un million d’habitants, le taux de visite pour mille habitants est de 200. Si la zone située à une distance de 50 à 70 kilomètres abrite 50 000 personnes et compte une population de trois millions d’habitants, on obtient un taux de visite pour mille habitants de 17. Dans cet exemple, le taux de visite dans la zone plus éloignée est moins élevé en raison du coût plus élevé à assumer pour se rendre sur les lieux, comme on pouvait s’y attendre.

À partir des données de chaque GLAM sur le lieu de résidence des visiteurs canadiens, nous avons pu ainsi estimer le nombre de personnes ayant visité chaque établissement qui proviennent de centaines de RTA au Canada. Prenant appui sur les données de Statistique Canada, nous avons pu déterminer la population vivant dans chaque région, puis calculer le taux de visite. Enfin, en utilisant un algorithme de cartographie de Google, nous avons établi la durée du trajet (et la distance) entre chaque RTA et le GLAM à l’étude. Pour ce faire, nous avons formulé les hypothèses simplificatrices suivantes :

  • Même si tous les visiteurs des GLAM ont été inclus dans l’analyse, au moment d’évaluer le coût et la durée du trajet, une limite de coût équivalant à une « excursion d’un jour » de 250 kilomètres à partir de l’établissement concerné a été fixée. Les trajets faits à l’intérieur de cette limite ont été attribués aux zones décrites ci-dessus. On a supposé que les visiteurs en provenance de l’extérieur de cette limite avaient le même profil de déplacements que ceux venant de l’intérieur de celle-ci, et on les a donc attribués aux zones à l’intérieur de la limite.Footnote 43
  • Les visiteurs qui ont moins de 2,5 kilomètres à parcourir pour se rendre au GLAM y vont à pied.
  • Les visiteurs qui vivent à plus de 2,5 kilomètres du GLAM peuvent choisir d’y aller en voiture ou en transport en commun, selon la durée du trajet nécessaire entre ces deux modes de transport (si la différence est de plus de 25 minutes, ils choisiront la voiture).

Ces hypothèses sont établies pour reproduire le plus fidèlement possible les tendances dans les moyens de transport découlant de notre enquête nationale sur la population canadienne.

Ainsi, pour chaque GLAM, nous avons pu regrouper les RTA, les visiteurs et la population en dix zones pour lesquelles un taux de visite a été déterminé. Pour chaque zone, nous avons estimé le coût total du trajet par personne, ce qui comprend :

  • le coût du trajet direct – y compris les frais en carburant, en entretien, en pneus et en stationnement pour se rendre au GLAM en voiture, selon l’information publiée par l’Association canadienne des automobilistes et Parkopedia.Footnote 44 Dans le cas des visiteurs qui utilisent plutôt les transports en commun, nous avons calculé le tarif moyen local en fonction du tarif en espèces d’un seul billet pour les adultes, les jeunes et les aînés, et nous avons pondéré les frais en fonction de l’âge de la population. Enfin, aucun coût du trajet direct n’a été attribué aux visiteurs qui se rendent aux GLAM à pied;
  • la valeur du temps requis pour faire le trajet – fondée sur les valeurs de temps standard de Statistique Canada.Footnote 45 Pour les musées et les galeries, nous avons supposé que la valeur du temps équivaut à la moitié du salaire horaire, afin de tenir compte de la nature récréative de l’activité. Pour les bibliothèques et les archives, nous avons plutôt utilisé des hypothèses propres au Canada sur la proportion d’usagers qui visitent les établissements à des fins de travail ou de recherche et supposé une valeur équivalant au plein salaire horaire de ces visiteurs.Footnote 46

Selon ces zones de trajet et le taux de visite, nous avons pu déduire à quel point les visiteurs sont sensibles aux changements dans le coût d’une visite aux GLAM et évaluer le montant maximal qu’ils seraient disposés à payer pour visiter un établissement. La représentation graphique de ces données s’appelle une courbe de demande. Un exemple de courbe de demande pour les visiteurs des GLAM, fondée sur diverses hausses simulées du prix du billet (ou autres droits d’entrée), est présenté à la Fig. 10.

La courbe de demande montre que lorsque le coût d’entrée supplémentaire est nul (c.-à-d. que le coût d’entrée est le même qu’à l’heure actuelle), le nombre de visites demeure le même. À mesure que le coût d’entrée augmente, le nombre de visites diminue. Au départ, le nombre de visites est très sensible à toute légère variation du coût d’une visite aux GLAM (à l’extrémité droite de la courbe), mais le degré de sensibilité (ou « élasticité ») diminue à mesure que le coût supplémentaire augmente. Ainsi, on s’attendrait à ce qu’une hausse du coût supplémentaire d’une visite, qui passerait de zéro à 10 $, réduise de moitié environ le nombre de visiteurs, tandis qu’une hausse supplémentaire du coût aurait une incidence beaucoup plus faible sur le nombre de visiteurs.

Fig. 10. Exemple de courbe de demande pour les visites aux GLAM figure 10

Source: Oxford Economics

Figure description

L’estimation des courbes de demande constitue donc un outil puissant pour analyser les GLAM. Ces courbes fournissent de l’information sur la valeur que les gens accordent aux GLAM et sur le nombre de personnes qui seraient disposées à les fréquenter à divers prix. Cette information pourrait être particulièrement intéressante pour les établissements imposant des droits d’entrée, mais aussi lorsque les conditions d’accès changent partout (p. ex., il devient plus/moins coûteux d’accéder aux GLAM).

De plus, la courbe de demande tient compte des préférences des gens pour utiliser les GLAM dans le but de leur choix (p. ex. lire des livres, faire de la recherche d’emploi, voir des œuvres d’art). Elle tient également compte des préférences des gens pour utiliser les GLAM plutôt que de chercher une solution de rechange. Par exemple, les gens peuvent fréquenter les bibliothèques publiques, qui n’imposent pas de droit d’entrée, mais s’il y en avait, ils pourraient chercher une solution de rechange (p. ex. acheter des livres).

La forme de la courbe de demande, mesurée par sa sensibilité aux variations de prix (ou élasticité), nous indique à quel point les GLAM sont attrayants par rapport à ces autres options et ce qui se produirait si de tels frais étaient effectivement perçus. Ce faisant, elle nous indique les compromis que les gens pourraient faire quant à l’utilisation de leurs ressources (temps et argent) et nous fournit ainsi la clé pour évaluer les GLAM.

La courbe de demande peut également être utilisée pour estimer le surplus du consommateur des visiteurs des GLAM en examinant l’incidence de diverses hausses simulées du coût d’une visite sur le nombre de visiteurs. Essentiellement, toute la zone située sous la courbe de demande correspond à la différence entre le coût réel et le montant maximal que les visiteurs seraient disposés à payer pour visiter l’établissement. Il s’agit du « bénéfice » ou du surplus du consommateur dont il a été question ci-dessus.Footnote 47 Les divers modèles produisent une gamme d’estimations du surplus du consommateur, lesquelles varient selon le type d’établissement, mais aussi selon son emplacement géographique et sa taille (urbaine ou rurale, petite ou grande, etc.).

En plus d’une MCT pour chaque GLAM, nous avons également élaboré des « supermodèles » (modèles nationaux) à partir de l’enquête nationale pour chaque catégorie d’établissement. Ces modèles nationaux offrent une approche « descendante » en utilisant les données de l’enquête nationale, contrairement à l’approche « ascendante », qui utilise les données comportementales provenant des divers GLAM. Comme ils ouvrent un échantillon beaucoup plus large de la population, les modèles nationaux constituent donc un complément utile à chaque MCT ascendante. Ces différentes approches de modélisation présentent une autre caractéristique importante : les modèles nationaux utilisent le coût du trajet déclaré par les gens (ainsi que les valeurs définies de la durée élaborées ci-dessus). C’est donc dire que les modèles nationaux tiennent compte du coût du trajet perçu, tandis que les modèles ascendants tiennent compte de ce qu’on appelle parfois le « coût défini par le chercheur ».Footnote 48

Dans le cas des musées et galeries, les résultats ascendants combinés avec ceux de notre modèle national indiquent que la valeur moyenne de chaque visite est de 44 $. Selon les données de Patrimoine canadien pour 2015 (les plus récentes disponibles), il y a eu un total de 45,6 millions de visites aux galeries et musées à but non lucratif au Canada : 31,5 millions de visites aux musées et 14,1 millions de visites aux galeries.Footnote 49 En multipliant le surplus du consommateur de chaque visite par le nombre total de visites, on obtient une estimation de la valeur totale des galeries et des musées canadiens pour leurs usagers. Selon nos estimations, les galeries et les musées génèrent un surplus du consommateur annuel total de 2,0 milliards de dollars.

Pour les archives, les données sur les visites sont plus limitées, car la zone est moins bien étudiée. Toutefois, nous avons réussi à surmonter ce problème dans une certaine mesure en ayant accès à des données supplémentaires. Nos estimations s’appuient sur quatre sources principales. Nous avons utilisé l’information provenant : 1) des Archives et collections spéciales de l’Université du Nouveau-Brunswick et 2) des Archives de l’Ontario, ainsi que 3) de l’élaboration d’un « supermodèle » (modèle national) à partir des résultats de l’enquête. Quant à la quatrième et dernière source, nous avons obtenu les données sur l’origine des visiteurs recueillies dans le cadre de l’enquête sur les visiteurs des archives menée par Yakel et coll. (2012).Footnote 50 Nous avons donc disposé de 468 réponses utilisables sur les visites dans 23 archives canadiennes à l’échelle du pays. Cette dernière source de données semble être l’une des plus riches au monde en ce qui concerne les visites d’archives.

En combinant les quatre modèles, nous estimons un surplus du consommateur de 65 $ par visite, soit 185 millions de dollars à l’échelle nationale. Les données probantes indiquent que les personnes ayant visité des archives en personne sont susceptibles d’être particulièrement déterminées, surtout que l’accès en ligne aux archives est de plus en plus facile.Footnote 51 Voilà qui permet d’expliquer le surplus du consommateur beaucoup plus élevé par visite que nous avons évalué.

Enfin, en ce qui concerne les bibliothèques, nous avons obtenu des données pour élaborer des MCT pour les bibliothèques publiques de Hamilton, Kitchener, Regina et Vancouver. À ces MCT s’ajoute un « supermodèle » (modèle national) tiré des résultats de l’enquête nationale. Les résultats combinés de ces deux sources indiquent un surplus du consommateur de 18 $ par visite. En multipliant ce chiffre par le nombre total de visites aux bibliothèques publiques du Conseil des bibliothèques urbaines du Canada (ci-après le CBUC), puis en l’étendant à toutes les bibliothèques publiques, on obtient une valeur totale de 1,8 milliard de dollars par année.Footnote 52 0 ci-dessous fournit un résumé des valeurs d’usage en personne.

Fig. 11. Valeur d’usage en personne des GLAM
Élément Galeries Bibliothèques Archives Musées Total
Valeur d’usage en personne moyenne par visite, en $ (1) 43,6 17,6 65,2 43,6
Nombre estimatif de visites en 2019, en millions (2) 14,1 102,2 2,8 31,5
Valeur d’usage en personne (en millions de dollars) (3) = (1) * (2) 615 1 797 185 1 374 3 972

Source: Oxford Economics
Tous les chiffres sont arrondis.

4.3 Bibliothèques universitaires

La discussion qui précède porte sur l’estimation de la valeur des visites en personne aux GLAM, y compris dans les bibliothèques publiques. Toutefois, cette estimation ne tient pas compte des visites aux bibliothèques universitaires. Les bibliothèques universitaires n’ont pas le même motif d’usage, la même fonction et le même caractère que les bibliothèques publiques.

De plus, bon nombre de leurs usagers sont des étudiants, et certains d’entre eux vivent sur le campus. Les étudiants peuvent choisir de vivre sur le campus parce que c’est là où ils reçoivent leur enseignement et profitent des installations, notamment la bibliothèque. Cette situation crée ce qu’on appelle techniquement un « problème d’endogénéité », car le choix du lieu de résidence des usagers n’est pas indépendant de l’établissement qu’ils utilisent, mais est régi par celui-ci, à tout le moins en partie. La MCT suppose généralement que le choix du lieu de résidence est « exogène » ou indépendant de l’établissement – p. ex., nous supposons que la plupart des usagers de galeries ne vivent pas délibérément près d’une galerie d’art (bien qu’évidemment, au sens large, la galerie puisse être l’un des nombreux attraits de vivre dans une ville donnée).

Un autre problème tient au fait que bon nombre des avantages des bibliothèques universitaires sont liés à l’éducation et que les avantages en matière d’éducation ne peuvent se concrétiser qu’à long terme.

Par conséquent, nous n’avons pas utilisé la MCT pour mesurer les avantages des bibliothèques universitaires; nous avons plutôt choisi une approche différente. De nombreuses tentatives ont été faites pour mesurer la valeur des bibliothèques universitaires. Bon nombre d’entre elles mettent l’accent sur des mesures comme la persévérance scolaire des étudiants ou un rendement scolaire supérieur en raison de l’usage élevé des bibliothèques universitaires.Footnote 53 Toutefois, il se peut qu’elles ne mesurent qu’une partie des avantages des bibliothèques universitaires. Par exemple, un usage élevé des bibliothèques universitaires peut améliorer les notes des étudiants, mais tous les étudiants (y compris les étudiants qui les utilisent peu) peuvent en bout de ligne en tirer un avantage

Les bibliothèques universitaires sont très bien intégrées à l’enseignement universitaire. Par conséquent, l’approche adoptée dans la présente étude consiste à considérer les bibliothèques universitaires comme faisant partie des avantages généraux offerts par l’enseignement supérieur à long terme.Footnote 54 Si tel est le cas, les bibliothèques universitaires représenteraient une part des avantages d’une telle éducation pour les étudiants. Bien entendu, les membres du corps professoral utilisent également ces établissements, et on tient également compte des avantages de l’usage de ces établissements par les professeurs. L’approche adoptée est décrite en détail dans l’encadré ci-dessous. Cette approche donne un RCA d’environ 3,4 pour les bibliothèques universitaires et une VAN de 3,4 milliards de dollars.

En raison du caractère très différent des bibliothèques universitaires, nous avons néanmoins distingué leurs résultats de ceux des bibliothèques publiques, car certains pourraient croire qu’un tel amalgame vient réduire la transparence et peut brouiller le caractère assez distinctif de chaque établissement. Les principaux résultats liés au RCA et à la VAN présentés dans le sommaire et la conclusion ne précisent donc que les résultats des bibliothèques publiques (ce qui exclut les bibliothèques universitaires).

Évaluation de la valeur des bibliothèques universitaires

La méthode choisie pour estimer la valeur des bibliothèques universitaires repose sur l’estimation des répercussions à long terme des études universitaires au Canada. Les bibliothèques universitaires font partie d’un ensemble d’apprentissages ayant lieu dans les universités et devraient donc se voir attribuer une part des avantages. Vu les données sur le retour aux études universitaires au Canada et l’attribution de la part des coûts des bibliothèques, il est possible de calculer un RCA et une VAN pour l’usage par les étudiants. De plus, on peut également tenir compte de l’usage qu’en font les universitaires pour estimer une valeur totale combinée.

Étudiants

L’approche suivante a été adoptée pour évaluer les avantages de l’usage des bibliothèques universitaires par les étudiants :

  • Les données de l’Organisation de coopération et de développement économiques ( OCDE) ont servi à calculer le total des coûts sociaux et des avantages d’un diplôme universitaire canadien pendant la vie active des étudiants.Footnote 55 Il s’agit à la fois des coûts et des avantages privés (p. ex. frais, revenu d’emploi perdu, salaires futurs plus élevés) et publics (subventions gouvernementales, recettes fiscales futures).
  • D’après les données de l’ OCDE, la valeur actualisée des coûts est de 89 249 $ et celle des avantages sociaux, de 297 764 $ au cours de la vie d’un étudiant canadien type.Footnote 56 Cela équivaut à un RCA de 3,3, ce qui signifie que les avantages sociaux d’un diplôme universitaire canadien représentent 3,3 fois les coûts.
  • La prochaine question est de savoir comment appliquer ces résultats aux bibliothèques universitaires. Puisque les avantages représentent 3,3 fois les coûts, il est nécessaire d’estimer le coût des bibliothèques. Les données de l’Association des bibliothèques de recherche du Canada (ci-après l’ABRC) ont servi à estimer le coût d’exploitation des bibliothèques universitaires (montant rajusté de 737 millions de dollars en 2016-2017).Footnote 57
  • Toutefois, les avantages mentionnés ci-dessus résultent du fait que la société encourt non seulement des coûts directs (coûts d’exploitation enregistrés par l’ABRC), mais aussi des coûts indirects (revenu perdu pendant les études).
  • D’après les estimations ci-dessus, nous calculons que les coûts indirects représentent 47 % du total des coûts sociaux. Par conséquent, l’ensemble des coûts sociaux attribuables aux bibliothèques de l’ABRC ont été évalués à environ 1,4 milliard de dollars par année.
  • Compte tenu d’un RCA de 3,3, il est raisonnable d’estimer à 4,7 milliards de dollars les avantages sociaux des bibliothèques universitaires et d’établir une VAN de 3,3 milliards de dollars.

Corps professoral

Les avantages pour le corps professoral ont été déterminés en fonction des travaux de King et Tenopir (2008).Footnote 58

  • • King et Tenopir ont entrepris des travaux d’évaluation contingente dans cinq universités américaines et constaté que la consultation de revues spécialisées est de loin l’activité offerte par les bibliothèques universitaires la plus populaire auprès du corps professoral. En conséquence, leur étude se concentre sur l'utilisation annuelle des revues académiques dans les bibliothèques universitaires.
  • • Ce travail est en quelque sorte un parallèle à celui lié aux avantages pour les étudiants ci-dessus. Il tient compte à la fois des coûts d’accès privé (coûts salariaux annuels du corps professoral de 704 $US par personne) et des coûts d’achat et de tenue à jour des collections de revues pour les bibliothèques (1 052 $US par membre du corps professoral en tout). Il comprend également les avantages de l’usage, vu le coût d’obtention des données d’autres sources (3 466 $US par membre du corps professoral par année).Footnote 59 Un RCA de 3,3 est consigné.
  • • Puisque les coûts des collections de revues sont déjà inclus dans l’usage par les étudiants ci-dessus, seuls les coûts liés au temps du corps professoral sont inclus dans les calculs de la présente étude.
  • • Le nombre d’universitaires dans les établissements de l’ABRC a été estimé à partir des données de l’ABRC indiquant 845 782 étudiants dans ces établissements et d’un rapport moyen de 20 étudiants par professeur.Footnote 60 Ces calculs donnent 42 289 universitaires dans les universités membres de l’ABRC. Une fois la valeur des professeurs exprimée en dollars américains de 2008 convertie en dollars canadiens de 2019, les avantages annuels semblent en revanche être de 216 millions de dollars, alors que le coût d’usage des bibliothèques universitaires par les professeurs est de 43,9 millions de dollars (ce qui exclut es coûts d’exploitation des bibliothèques).Footnote 61

Résultats

Les résultats combinés des estimations susmentionnées relatives aux étudiants et aux membres du corps professoral donnent à penser que les avantages totaux s’élèvent à 4,9 milliards de dollars et que le coût total s’élève à 1,4 milliard de dollars en valeur actualisée, ce qui donnerait un RCA de 3,4 milliards pour les bibliothèques universitaires (et une VAN de 3,4 milliards de dollars). Il convient de souligner que ce résultat reflète en grande partie les avantages à long terme de ces bibliothèques, car celles-ci contribuent à l’augmentation des salaires que toucheront les étudiants et des recettes gouvernementales pendant la vie active des étudiants.

Valeur de non-usage

5.1 Contexte

Pour évaluer la valeur des GLAM, il est important de porter attention non seulement à leur usage direct, mais aussi à un vaste ensemble de valeurs allant au-delà de cet usage. Qu’ils utilisent ou non les GLAM, les gens peuvent simplement apprécier qu’ils « soient là », c’est-à-dire le fait que les GLAM existent et qu’ils apportent du bon à la société. Ils peuvent également trouver important de s’assurer que les GLAM soient préservés pour les générations à venir. Peut-être souhaitent-ils aussi utiliser les GLAM « un jour » et veulent-ils garder cette option ouverte.

Cet ensemble de valeurs est souvent appelé « valeur de non-usage » ou « valeur d’usage passif ». La valeur de non-usage est en fait assez intuitive; les sociétés sont prêtes à subventionner une gamme d’activités à long terme. Outre les arts, ces subventions peuvent notamment servir à offrir des services dans les collectivités éloignées. La plupart des gens n’habitent pas ces communautés ou ne s’attendent jamais à utiliser ces services. Ils peuvent néanmoins être heureux de les financer par souci d’équité ou autre motif et considérer qu’il revient à la société de le faire. De même, la volonté de la société à subventionner les biens culturels à long terme peut être considérée comme une indication implicite de la valeur de non-usage.

La valeur de non-usage est habituellement estimée pour les commodités environnementales ou culturelles, qui sont souvent considérées comme intrinsèquement précieuses par les citoyens. Selon des études antérieures, la valeur de non-usage peut représenter une proportion importante des avantages d’un bien culturel ou environnemental.

Dans le cas des GLAM, la valeur de non-usage est généralement constituée de trois composantes :

  • Valeur d’existence — La valeur que les gens attachent à l’existence des GLAM malgré le fait qu’ils n’ont peut-être pas l’intention de les visiter.
  • Valeur de legs — La valeur que les gens accordent aux GLAM comme avantage pour les générations futures.
  • Valeur d’option — La valeur que les gens attachent à la possibilité de visiter les GLAM à un moment donné, qu’ils exercent ou non cette option.

En pratique, les gens peuvent avoir plusieurs de ces composantes à l’esprit lorsqu’ils estiment la valeur de non-usage dans des situations comme celles abordées dans notre enquête nationale, et il peut être difficile de les distinguer.

L’importance de la valeur de non-usage pour les institutions culturelles a été démontrée dans certaines administrations. Ainsi, à Détroit, les électeurs, le secteur privé et le gouvernement ont agi pour empêcher la vente d’une partie de la collection du Detroit Institute of the Arts (DIA) en période de crise financière. Il a fallu investir plus de 800 millions de dollars américains dans le cadre de ce qu’on a appelé le « Grand marchandage » (Grand Bargain). Comme la majorité de la population de la ville était peu susceptible d’être des usagers de l’établissement, la volonté de la société de payer une telle somme pour conserver sa collection d’art en période de crise financière est un exemple éloquent du rôle de la valeur de non-usage des biens culturels.Footnote 62

La valeur de non-usage peut être mesurée dans le cadre d’un sondage public, à l’aide d’une technique d’enquête appelée « évaluation contingente » ( EC). Une EC a été effectuée dans le cadre de l’enquête nationale sur les GLAM décrite précédemment.

5.2 Enquête nationale

Par définition, la valeur de non-usage n’est pas négociée sur le marché, puisqu’elle se rapporte à la façon dont les gens valorisent une chose qu’ils ne paient pas directement ou qu’ils n’utilisent pas. Afin de mesurer la valeur de non-usage des GLAM, il a donc fallu mener une enquête nationale auprès de la population en général. L’approche adoptée pour ce type d’enquête consiste à mettre l’accent sur la « volonté de payer » ( VDP) des gens pour les biens culturels, et notre enquête n’a pas fait exception.

Comme mentionné précédemment, des questions sur la VDP ont donc été intégrées à l’enquête national en ligne décrite ci-haut et menée auprès de la population canadienne.Footnote 63 Des quotas ont été imposés selon le sexe, l’âge, le niveau de scolarité, la langue (français/anglais) et la province ou le territoire de résidence afin d’obtenir un échantillon assez représentatif de la population canadienne. Au total, 2 045 réponses ont été reçues de résidents canadiens. Le questionnaire d’enquête a été élaboré en fonction de la documentation récente sur les approches d’évaluation contingente.Footnote 64

L’enquête nationale a visé les usagers actuels des GLAM (soit les personnes qui ont utilisé ces établissements au cours des 12 derniers mois), ainsi que les non-usagers (soit les personnes qui n’ont pas utilisé les GLAM au cours des 12 derniers mois ou qui ne les ont jamais utilisés). Les non-usagers sont particulièrement intéressants dans ce cas-ci parce qu’ils pourraient valoriser les GLAM même s’ils ne les utilisent pas. Cette appréciation peut être vue comme un indice de la valeur de non-usage sous-jacente que la société accorde aux GLAM (tant les usagers actuels que les non-usagers).

Les résultats de l’enquête ont ensuite permis d’évaluer la VDP dans les divers établissements et les GLAM dans leur ensemble. L’approche ayant servi à cette fin est décrite dans l’encadré ci-dessous.

Évaluation de la valeur de non-usage des GLAM

Dans le cadre de l’enquête nationale, on a demandé à tous les répondants (les usagers actuels et les non-usagers) s’ils étaient disposés à payer pour les quatre types de GLAM définis.Footnote 65

Il faut être prudent lorsqu’on pose des questions sur des ressources culturelles comme les GLAM. Les analystes doivent garder à l’esprit que, contrairement aux biens que les gens achètent au quotidien (p. ex., l’épicerie), le « prix » de la ressource en question ne leur est pas toujours familier. En outre, dans leurs réponses, certaines personnes risquent de surévaluer leur VDP parce que « le dire ne coûte rien » (biais hypothétique) ou, au contraire, de la sous-évaluer par crainte de se voir imposer de nouvelles taxes ou charges (biais stratégique); en outre, le mot « taxe » peut déclencher des objections de principe (« votes de protestation »). Bien que certains universitaires croient qu’il faudrait révéler le coût du service aux répondants (p. ex. les dépenses publiques par GLAM), certains analystes soulignent aussi le risque de « biais d’ancrage », soit lorsque les répondants reprennent la valeur fournie par le questionnaire.

Afin d’atténuer certains de ces éventuels biais, les répondants ont reçu certains renseignements sur la contribution des GLAM à la société. On leur a ensuite demandé s’ils seraient disposés à faire un don pour soutenir les GLAM partout au pays si ces derniers ne recevaient pas tous les fonds publics nécessaires. Vous trouverez ci-dessous une forme abrégée de la question sur la VDP. (La question complète est incluse dans le questionnaire, qui se trouve à l’annexe 6.)

D’une façon ou d’une autre, tous les Canadiens paient actuellement pour l’entretien et l’exploitation annuels de galeries, de bibliothèques, d’archives et de musées ( GLAM), que ce soit par l’entremise de taxes, de dons, de droits d’entrée ou d’autres moyens. Toutefois, imaginez que les GLAM n’ont aucune autre source de financement gouvernemental ou privé et que la seule façon d’assurer leur survie est de compter sur des dons de particuliers. Dans une telle situation, quel serait le montant maximal que vous seriez disposé à verser chaque année à titre de don pour conserver tous les GLAM à but non lucratif du Canada?

On a ensuite demandé aux répondants de choisir le montant qu’ils seraient prêts à payer parmi diverses options de paiement, mais ils étaient également libres de choisir un autre montant s’ils le souhaitaient.Footnote 66

Les répondants ont été sensibilisés au fait qu’ils disposaient d’un budget limité pour financer les GLAM en plus d’assumer leurs dépenses quotidiennes. De plus, l’enquête en ligne permettait aux répondants de voir la somme de tous les montants qu’ils étaient disposés à payer à chaque établissement; en prenant conscience de leur VDP pour tous les GLAM, ils n’avaient pas tendance à la surestimer. L’ensemble des 2 045 répondants devaient fournir une valeur pour cette section de l’enquête.

Fig. 12. VDP moyenne pour les GLAM par répondantFootnote 67 figure 12

Source : Oxford Economics

Figure description

Comme l’indique la Fig. 12 ci-dessus, les usagers actuels ont tendance à donner une évaluation plus élevée que les non-usagers. Ce résultat est conforme aux attentes et s’explique sans doute par la confusion qu’entretiennent les répondants entre leur valeur d’usage et la valeur de non-usage qu’accorde la société en général.

C’est sur la valeur déclarée par les non-usagers que se concentre la présente étude. Cette valeur peut être considérée comme la valeur de non-usage sous-jacente que la société dans son ensemble (soit les usagers et les non-usagers) attribue aux GLAM. En multipliant les diverses valeurs de non-usage des répondants par le nombre total estimé de résidents canadiens âgés de 16 ans et plus au 1er juillet 2018 (31,1 millions), on obtient une valeur de non-usage pour chaque établissement, ainsi que pour le secteur des GLAM dans son ensemble.Footnote 68 Ces valeurs sont présentées ci-dessous. Elles représentent une évaluation du montant que la société est disposée à payer pour préserver les GLAM, au-delà de la valeur que leur accordent les gens dans leur usage quotidien.

Bien entendu, certains diront que même en ajoutant la valeur de non-usage aux autres valeurs examinées dans ce rapport, la valeur ainsi obtenue ne rend toujours pas compte de toute la valeur sociale que possèdent les GLAM. Le chapitre sur l’analyse multicritères ( AMC) fournit une indication qualitative de la valeur globale des GLAM.

Fig. 13. Valeur de non-usage des GLAM
Élément Galeries Bibliothèques Archives Musées Total
Valeur de non-usage moyenne par personne en dollars (1) 17,2 17,3 14,3 22,3 71,1
Population canadienne de 16 ans et plus au 1er juillet 2018 (millions) (2) 31,1 31,1 31,1 31,1 31,1
Valeur de non-usage (en millions de dollars) (3) = (1) * (2) 536 537 446 693 2 212

Source: Oxford Economics
Tous les chiffres peuvent être arrondis.

Après avoir donné leur évaluation des GLAM, les répondants ont été invités à justifier leur réponse. La figure ci-dessous montre la volonté de payer moyenne des non-usagers selon les raisons données pour justifier leur évaluation.Footnote 69 Très peu de non-usagers (74) disent ne pas apprécier les GLAM; en fait, la plupart disent les apprécier grandement et/ou être heureux de les financer. Certains non usagers (210) ayant dit n’avoir jamais utilisé de GLAM (ou être peu susceptibles de les utiliser) ont tout de même déclaré être disposés à payer 60 $ pour maintenir leurs activités. Enfin, le plus grand groupe de non-usagers a dit ne pas avoir les moyens de financer les GLAM (247 répondants) et a donc déclaré une VDP moindre (34 $ pour tous les GLAM).

Fig. 14. VDP moyenne des non-usagers selon la raison donnée pour justifier l’évaluation et nombre de répondants figure 14

Source : Oxford Economics

Figure description


Valeur en ligne

6.1 Contexte

Tout comme les visites en personne, les gens peuvent se connecter aux GLAM en passant par un portail en ligne, soit à partir de sites Web et de catalogues « traditionnels », soit de plus en plus par des portails de médias sociaux.Footnote 70 Et tout comme les visites en personne, les visites en ligne permettent aux usagers d’interagir directement avec les GLAM. Elles constituent donc une autre forme de surplus du consommateur dont il faut tenir compte dans l’évaluation des GLAM.

Les sites Web des GLAM et les portails de médias sociaux deviennent une ressource de plus en plus importante pour les usagers. Ces canaux en ligne ont notamment comme fonction de fournir de l’information sur l’établissement même et sur les événements à venir, d’offrir des présentations interactives et des initiatives éducatives, de permettre la recherche dans les catalogues en ligne, de faire des réservations et des demandes de documents, de donner accès à diverses ressources électroniques ainsi qu’à des documents et images numérisés, de permettre le téléchargement ou la diffusion en continu de contenus, ainsi que d’assurer un échange direct avec les usagers par l’entremise des médias sociaux.

Les services en ligne des GLAM permettent donc au public de « se connecter virtuellement » à ces établissements sans nécessairement les visiter. Puisque les gens consacrent une partie de leur temps libre à accéder aux données des GLAM en ligne au lieu de faire autres choses, ils apprécient implicitement les services en ligne offerts par ces établissements.

Ce n’est que récemment que les économistes ont porté leur attention sur les méthodes servant à évaluer la valeur de l’activité en ligne. Pour mieux comprendre cette valeur, il faut adapter la documentation existante sur la valeur de l’Internet à la gamme de services en ligne offerts par les GLAM. Cette approche est décrite brièvement ci-après et plus en détail à l’annexe 3.

6.2 Estimation de la valeur en ligne

La clé pour comprendre la valeur des services en ligne est de voir ces derniers comme une source d’information, dont le coût d’accès est principalement exprimé en temps. Et plus il faut de temps pour obtenir une information donnée en ligne, moins les gens sont susceptibles d’utiliser les services en ligne.

Par exemple, imaginez un instant que tous les usagers des GLAM en ligne devaient revenir à un accès commuté plutôt qu’à un accès à large bande pour profiter des services en ligne des GLAM. Les tracas supplémentaires et la vitesse plus lente d’une connexion par ligne commutée dissuaderaient probablement de nombreux usagers, de sorte que la demande diminuerait (et le surplus du consommateur serait réduit). À l’inverse, grâce à l’introduction de services en ligne et d’une connexion à large bande rapide, les renseignements offerts par les GLAM ont été consultés beaucoup plus souvent ces dernières années parce qu’il est devenu beaucoup plus rapide et plus facile d’y accéder.

La figure ci-dessous illustre ce fait. Même si les chiffres sont hypothétiques, imaginez que les usagers sont encore limités aux connexions par ligne commutée pour accéder aux données des GLAM et que le coût en temps est égal à 20 $. Dans l’exemple, seulement 10 personnes utilisent la connexion. Toutefois, avec une connexion à large bande, l’accès est de toute évidence beaucoup plus rapide – le coût en temps chute à 5 $, et 30 personnes peuvent donc utiliser les ressources en ligne des GLAM. Ces chiffres nous donnent également une idée de la mesure dans laquelle les gens accordent de la valeur à l’accès aux données et de leur sensibilité au coût en temps (c.-à-d. leur « élasticité »). Les 20 personnes supplémentaires qui utilisent les services en ligne des GLAM à 5 $ doivent évaluer ces données à moins de 20 $. Pourquoi? Parce qu’autrement, ils auraient dépensé cette somme pour accéder aux données au départ.

Fig. 15. Usage des GLAM et temps consacré (en ligne) figure 15
Figure description

Le fort usage en ligne de certains GLAM, comme les archives, par rapport à leur usage en personne donne également une indication des préférences des usagers.Footnote 71 La vitesse et la commodité d’Internet font en sorte qu’il y a beaucoup plus de demandes de renseignements faites aux archives que si tous ces usagers devaient se rendre sur place pour consulter les données. Sans services en ligne, de nombreux usagers actuels de ces services auraient à assumer des coûts d’accès (en personne) plus élevés et, comme dans l’exemple ci-dessus, beaucoup pourraient être dissuadés de le faire.

On peut donc dire que, en gros, plus il faut de temps pour obtenir un élément d’information (c.-à-d. plus le coût est élevé), plus la demande est faible et vice versa.

Ces constats nous donnent des indices sur la façon de valoriser les services en ligne. Le temps que les usagers passent à accéder au contenu des GLAM en ligne indique le temps qu’ils acceptent d’y consacrer (c.-à-d. le coût de leur accès en ligne). Grâce à certains renseignements sur la sensibilité des personnes à l’évolution de ces coûts (soit l’élasticité), nous pouvons alors estimer une courbe de demande pour le contenu en ligne des GLAM et le surplus du consommateur d’une manière analogue à l’estimation du surplus du consommateur pour l’accès en personne au moyen de la MCT.Footnote 72

Voilà pourquoi, dans le cadre de notre enquête nationale, nous avons demandé aux répondants d’indiquer le temps consacré et la fréquence de consultation du site Web des GLAM, des catalogues et des portails de médias sociaux. À cela se sont ajoutées des données sur le temps passé en ligne rapportées par divers GLAM à l’échelle du pays. Nous avons ainsi pu nous faire une idée du temps consacré à chaque session à divers GLAM sur les sites Web officiels, les catalogues et les portails de médias sociaux.

Le temps médian estimatif consacré aux sites Web, aux catalogues et aux médias sociaux a été combiné aux valeurs que les Canadiens accordent au temps (également utilisées dans les MCT) pour obtenir le coût en temps de l’usage en ligne par session.Footnote 73 À l’aide de l’information sur le nombre de sessions (à partir des données de Patrimoine canadien et du CBUC) et la sensibilité au coût en temps passé en ligne, nous avons estimé une courbe de demande et un surplus du consommateur pour l’usage en ligne de divers GLAM. Fig. 16 illustre la démarche suivie pour les sites Web des musées. La même approche a été utilisée pour les autres GLAM et pour les médias sociaux.

Fig. 16. Surplus du consommateur des sites Web des musées figure 16
Figure description

L’annexe 3 décrit plus en détail l’approche adoptée pour mesurer la valeur des services en ligne des GLAM.

Toutefois, l’enquête nationale et les documents complémentaires des GLAM fournissent plus que des données sur la valeur en dollars. L’une des questions soulevées à l’étape de l’exploration des données dans le présent rapport est le manque d’information sur l’utilisation des médias sociaux dans les GLAM en général. Vu l’importance croissante des médias sociaux, il s’agit d’une question importante.

D’après les données de l’enquête, les sites Web demeurent l’outil en ligne le plus couramment utilisé pour accéder aux GLAM. Toutefois, l’analyse de ces données laisse également voir que les médias sociaux représentent une assez grande proportion de l’usage total des GLAM et que la fréquence d’utilisation de certaines formes de médias sociaux est plus élevée que celle des sites Web.

On peut donc présumer que les médias sociaux pourraient offrir aux gens un important moyen d’accéder aux GLAM (même si l’ampleur de ce phénomène n’a toujours pas été quantifiée de façon exhaustive).

6.3 Valeur en ligne

Les estimations de la valeur en ligne des GLAM (soit le surplus du consommateur) sont présentées dans la figure ci-dessous. Comme nous l’avons indiqué, ces résultats comprennent les sites Web officiels, les catalogues et l’utilisation de Facebook, Twitter et Instagram, mais excluent les autres portails de médias sociaux en raison de la petite taille de l’échantillon qu’ils représentent.

Fig. 17. Valeur en ligne des GLAM
Élément Galeries Bibliothèques Archives Musées Total
Valeur des sites Web et des catalogues (en millions de dollars) (1) 68 367 114 120 668
Valeur des médias sociaux (en millions de dollars) (2) 310 269 240 157 975
Valeur en ligne totale (en millions de dollars) (3) = (1) + (2) 378 636 353 277 1 644

Source : Oxford Economics
Tous les chiffres peuvent être arrondis.

Éducation formelle

En plus de ce qu’ils ont à offrir aux visiteurs adultes, les GLAM apportent d’importants avantages éducatifs aux élèves qui les visitent dans le cadre de programmes scolaires ou éducatifs formels.

Le présent chapitre s’appuie sur les données probantes tirées de la documentation universitaire sur le rendement à long terme de l’éducation afin d’estimer la valeur de la contribution des GLAM à l’éducation des élèves et de la société dans son ensemble.

Les visites d’élèves aux GLAM constituent une partie importante du processus éducatif. La scolarisation fournit un cadre formel qui favorise l’apprentissage et, comme il est indiqué ci-dessous, les avantages d’une telle éducation sont bien documentés. On peut donc s’attendre à ce que les visites scolaires faites aux GLAM dans le cadre d’un programme d’études fassent partie de ces avantages. Parallèlement, la visite des GLAM peut servir à inspirer la créativité, les idées et l’apprentissage, qui peuvent tous être bénéfiques à long terme pour les élèves dans le cadre de leur éducation formelle. En effet, certains chercheurs soutiennent que l’expérience d’apprentissage favorisée par les sorties scolaires aux GLAM (ou établissements culturels connexes) offre des milieux d’apprentissage particulièrement efficaces. Ainsi, une sortie scolaire dans un musée ne vise pas nécessairement à inspirer les élèves à devenir scientifiques ou artistes. La valeur à long terme d’une telle sortie tient souvent au fait qu’une visite structurée aux GLAM peut encourager un état d’esprit plus novateur et stimuler la pensée critique, lesquels peuvent ensuite se refléter dans la valeur des emplois que décrocheront éventuellement les élèves.

À première vue, il peut sembler difficile de quantifier la valeur des visites scolaires aux GLAM. Toutefois, à long terme, l’éducation formelle, qu’elle prenne la forme de visites scolaires aux GLAM ou d’un apprentissage scolaire plus typique au quotidien, produit une main d’œuvre plus compétente et productive. Cet avantage au chapitre de la productivité se reflétera dans les salaires futurs des travailleurs. Les économistes reconnaissent depuis longtemps cet avantage, et c’est pourquoi la valeur de l’éducation scolaire ou postscolaire est souvent en bonne partie estimée en fonction de la valeur qu’elle ajoute aux salaires futurs. De même, dans la mesure où les visites éducatives formelles aux GLAM contribuent à cette acquisition à long terme de connaissances et de compétences, leur valeur devrait être intégrée à ces salaires.Footnote 74

Outre son incidence sur les salaires, l’éducation peut avoir d’autres répercussions à long terme, notamment les conséquences de l’amélioration des valeurs civiques et de la confiance, de la réduction de la criminalité et de la participation aux institutions démocratiques – souvent regroupées sous le nom de « capital social ». Une analyse de ces vastes avantages est présentée dans un chapitre ultérieur du présent rapport.Footnote 75

Il convient également de souligner que les valeurs éducatives mesurées ici se constatent à plus long terme (contrairement à la valeur immédiate des déplacements mesurée par la MCT). Voilà qui témoigne de la nature à long terme du processus éducatif — ses avantages ne peuvent se faire sentir que tout au long de la vie d’une personne, bien après les études. Certains des avantages peuvent également profiter à des « tiers », comme le gouvernement, qui tirera parti des salaires futurs plus élevés en touchant des recettes fiscales plus élevées. Ces avantages de tiers sont appelés « externalités » par les économistes.

Les données probantes internationales sur les avantages à long terme de l’éducation scolaire sont particulièrement solides et cohérentes. En particulier, les travaux canadiens d’Oreopoulos qui s’appuient sur les modifications apportées à la réglementation sur l’éducation obligatoire dans les provinces fournissent une solide preuve du rendement de l’éducation scolaire au Canada. D’après ces travaux, la valeur d’une année d’éducation scolaire équivaut à une augmentation de salaire à long terme de 11,7 % par année pour la durée de vie moyenne d’une personne.Footnote 76

En outre, ces travaux vont tout à fait dans le même sens que d’autres études internationales sur le rendement de l’éducation.Footnote 77 Cette connaissance du rendement de l’éducation scolaire nous permet donc de mesurer la valeur des visites éducatives formelles aux GLAM.

L’encadré ci-dessous explique la démarche que nous avons suivie pour quantifier la valeur des visites éducatives. En gros, nous avons utilisé le nombre de visites scolaires aux GLAM, ainsi que la valeur à vie de chaque visite (mesurée par l’augmentation des salaires). Nous avons ainsi pu estimer la valeur des visites éducatives formelles aux GLAM au cours de la vie d’une personne.

Déterminer la valeur des visites éducatives formelles aux GLAM

L’estimation de la valeur des visites éducatives formelles repose sur diverses sources. Le document Enquête du gouvernement du Canada sur les établissements du patrimoine : Rapport 2017 de Patrimoine canadien précise le nombre de visiteurs par groupes scolaires dans les galeries, les archives et les musées en 2015, ainsi que la taille des groupes scolaires.

Dans le cas des bibliothèques, les chiffres du CBUC rendent compte des données sur l’éducation, y compris les programmes d’enseignement scolaire, lesquelles ont été utilisées comme indicateur de séances d’éducation formel.Footnote 78 Ces données ont ensuite été majorées pour tenir compte des bibliothèques publiques ne faisant pas partie du CBUC à l’aide du facteur d’ajustement de 1,25, décrit précédemment.

Ces données ont été complétées par des renseignements sur les visites scolaires fournis par un certain nombre de GLAM à l’échelle du pays. Selon ces établissements, les visites peuvent généralement durer de 1 à 2 heures. Cependant, comme il est probable que la durée de la visite elle-même a été complétée par un enseignement préalable et postérieur en classe, la durée moyenne d’une visite a été fixée à une journée d’enseignement.

Oreopoulos estime que le taux de rendement annuel d’une année d’éducation scolaire sur les salaires futurs (en comparant les personnes qui ont terminé leurs études secondaires à celles qui ne l’ont pas fait) est de 11,7 % au Canada.Footnote 79 C’est donc dire qu’une année d’études supplémentaire ajoute 11,7 % aux gains d’une personne à chaque année de sa vie professionnelle. Le revenu à vie d’un Canadien qui n’a pas terminé ses études secondaires a ensuite été estimé de l’âge de 20 à 65 ans, en fonction d’une valeur actualisée (VA), en utilisant un taux d’actualisation réel de 3,5 %.Footnote 80

Ainsi, nous estimons un revenu à vie moyen de 536 000 $ en VA pour les Canadiens qui n’ont pas terminé leurs études secondaires.Footnote 81 En tenant compte d’une hausse des salaires de 11,7 %, la valeur à vie d’une année d’études supplémentaire est donc estimée à environ 63 000 $.

Comme une année scolaire compte 196 jours, la VA moyenne d’une visite scolaire aux GLAM est donc de 320 $ par élève (63 000/196).Footnote 82 En multipliant cette valeur par le nombre annuel d’élèves qui visitent les GLAM (estimé à 9,7 millions d’après les données ci-dessus), on peut penser que la VA des avantages éducatifs des GLAM est d’environ 3,1 milliards de dollars par année. Il convient de noter que ces répercussions ne comprennent pas les avantages non salariaux (capital social) des GLAM ni les avantages d’un apprentissage supplémentaires qui peuvent découler des sorties scolaires au-delà d’une journée de classe typique.

La valeur des avantages éducatifs formels des GLAM canadiens peut être établie à l’aide des valeurs obtenues par les calculs décrits dans l’encadré ci-dessus. Ainsi, nous obtenons une valeur totale de 3,1 milliards de dollars. La valeur de chaque type de GLAM est également précisée dans le tableau ci-dessous.

Fig. 18. Valeur des avantages éducatifs formels des GLAM
Élément Galeries Bibliothèques Archives Musées Total
Nombre d’étudiants participant à des visites scolaires ou de séances éducatives par année (en millions) (1) 1,36 4,26 0,13 3,97 9,72
VA à vie par visite (en dollars) (2) 320 320 320 320 320
Valeur des avantages éducatifs formels (en millions de dollars) (3) = (1) * (2) 435 1 361 41 1 271 3 108

Source: Oxford Economics
Tous les chiffres peuvent être arrondis.

Avantages globaux

8.1 Contexte

Selon les principes économiques habituels, les personnes qui utilisent les GLAM disposent d’une information parfaite, c’est-à-dire qu’elles sont pleinement conscientes de tous les avantages de cette utilisation et décident de les utiliser en conséquence. Voilà qui permet de mieux comprendre le comportement des gens (ou les « préférences révélées ») grâce à des techniques comme la MCT, dont il a été question précédemment.

En résumé, les courbes de demande et le surplus du consommateur mis au point par la MCT sont une façon de déterminer la valeur que les gens accordent à l’usage des GLAM, en tenant compte des coûts d’utilisation et des solutions de rechange. Si l’usage des GLAM coûte plus cher, certaines personnes peuvent cesser de les utiliser, car les coûts dépasseraient les avantages qu’elles perçoivent (et le surplus du consommateur diminuerait). S’il en coûte moins cher d’utiliser les GLAM, les usagers seraient plus nombreux et/ou les utiliseraient plus souvent.

Toutefois, les économistes (et en particulier les spécialistes du domaine florissant de l’économie comportementale) admettent que l’information peut être imparfaite. Les gens peuvent utiliser des GLAM même s’ils n’ont qu’une connaissance partielle des avantages qu’ils en retirent ou qui sont offerts aux autres membres de la collectivité. Les grands avantages (« externalités ») pour la société pourraient ne pas être pris en considération par le surplus du consommateur d’un usager mesuré par la MCT ou autres méthodes d’évaluation directe.Footnote 83 Certains de ces avantages plus généraux ont déjà été abordés dans le chapitre précédente sur les avantages éducatifs formels. Toutefois, il peut en exister d’autres, qui sont parfois plus difficiles à intégrer dans une ACA pour diverses raisons techniques et méthodologiques, mais qui sont importants à reconnaître.

Ce chapitre présente les grands avantages économiques des GLAM. Ces avantages ne font pas partie de l’ ACA évaluée pour les raisons expliquées ci-dessous (et à l’annexe 4). En outre, on soutient que les cadres économiques ne peuvent (et ne doivent pas) tenter de quantifier tous les aspects des répercussions des GLAM – et c’est d’ailleurs pour cette raison que de vastes mesures qualitatives sont également utilisées pour mesurer ces avantages. Ces mesures sont examinées dans le chapitre suivant sur l’analyse multicritères.

Un certain nombre d’avantages globaux sont parfois constatés dans le contexte des GLAM. En voici quelques-uns :

  • Répercussions sur le bien-être
  • Capital social
  • Répercussions sur l’éducation informelle (des enfants et des adultes)
  • Retombées économique à long terme

Au moment d’examiner ces répercussions, il est important de bien sous-peser la valeur supplémentaire que les GLAM peuvent avoir au-delà des mesures conventionnelles, tout en reconnaissant le pouvoir et la rigueur d’une approche axée sur le bien-être économique (et la structure qu’elle exige).

Il convient également de noter que bon nombre des concepts ci-dessous se recoupent dans une certaine mesure, ce qui signifie qu’ils ne pourraient pas nécessairement être simplement « additionnés » même s’ils se prêtent à une quantification complète. Fig. 19 présente certains des concepts clés abordés ci-dessous et leurs recoupements possibles.

Fig. 19. Interaction des avantages globaux figure 19
Figure description

8.2 Répercussions sur le bien-être

Les GLAM peuvent être des sources de réflexion et d’inspiration pour stimuler la créativité de leurs visiteurs. En principe, tous les GLAM ont ces attributs en commun. Beaucoup de visiteurs de galeries peuvent témoigner du sentiment de paix, de réflexion et d’inspiration que de tels établissements peuvent susciter. Ceux-ci peuvent également nous aider à nous épanouir en suscitant des idées créatives. De leur côté, les musées peuvent nous aider à comprendre notre place dans le monde – ou le cosmos – et nous amener à réfléchir à notre propre raison d’être et à notre contribution à la société. Ils peuvent nous inspirer en nous rappelant les luttes des générations passées et susciter nos espoirs pour l’avenir. Et ils peuvent nous aider à comprendre les luttes et les espoirs des autres cultures que la nôtre.

Les bibliothèques, surtout depuis qu’elles servent de plus en plus de carrefour communautaire, peuvent également être une source importante de bien-être personnel. En plus d’offrir la possibilité de réfléchir et d’apprendre en profondeur, elles favorisent l’interaction, l’échange d’idées et l’établissement de liens, tous des éléments pouvant contribuer à un sentiment d’utilité et d’appartenance à la communauté. Et même si cela peut sembler moins évident, les archives peuvent avoir les mêmes répercussions, car la recherche peut aussi permettre aux usagers de trouver de nouvelles idées et de s’épanouir grâce à la recherche et à l’apprentissage en profondeur.

Voilà pourquoi les GLAM peuvent améliorer notre sentiment de bien-être général. Cette meilleure appréciation du monde en général peut également nous aider à comprendre nos points de vue et nos cultures, ce qui nous incite parfois à entrer en communication avec les gens de notre quartier et/ou accroît notre propension à faire du bénévolat au sein de notre collectivité. La figure ci-dessous résume ces répercussions positives en montrant comment les GLAM aident à renforcer les divers aspects du bien-être et de la cohésion sociale.

Fig. 20. Le rôle des GLAM pour favoriser le bien-être multidimensionnel figure 20
Figure description

Les répercussions qu’ont les GLAM sur le bien-être ont fait l’objet de nombreuses discussions, études et débats au cours des dernières années. Grâce à la recherche, nous sommes de plus en plus convaincus des répercussions sur le bien-être à mesure que les données probantes s’accumulent.Footnote 84 En effet, le Canada est devenu un chef de file mondial dans la reconnaissance des répercussions des GLAM sur le bien-être. De vastes travaux de recherche concertée entre le Musée des beaux-arts de Montréal et la profession médicale ont permis de reconnaître les répercussions des GLAM sur le bien-être, et les médecins sont maintenant autorisés à prescrire des visites aux GLAM à leurs patients.Footnote 85

De telles répercussions sur le bien-être sont-elles quantifiables à l’intérieur d’un cadre économique? Pour trancher cette question, certains soutiennent que c’est précisément l’une des raisons pour lesquelles les gens vont visiter les GLAM. Si tel est le cas, on pourrait donc affirmer que les répercussions sur le bien-être font pleinement partie de la décision des gens de visiter les GLAM et, de ce fait, des mesures du surplus du consommateur estimées précédemment.

Toutefois, on pourrait aussi soutenir que ces effets ne sont pas intégrés au processus décisionnel (ou ne le sont qu’en partie). Les gens ne comprennent peut-être pas (entièrement) la façon dont une visite aux GLAM peut s’avérer assez thérapeutique, les sensibiliser davantage au monde ou en faire de meilleurs citoyens.

Puisqu’il n’est pas certain que les gens tiennent compte (ou pleinement compte) de ces répercussions lors de leurs visites aux GLAM, des analystes comme Fujiwara proposent une autre approche (l’évaluation du bien-être ou « EBE ») qui s’attarde à mesurer le bien-être que les gens obtiennent d’une visite aux GLAM.Footnote 86 Il s’agit d’une solution de rechange aux méthodes traditionnelles, comme la MCT ou l’évaluation contingente.

Les travaux effectués par ces analystes n’en sont, encore à ce jour, qu’à leurs débuts. En outre, comme cette approche s’appuie sur une modélisation économique « descendante » complexe, et sur certaines hypothèses concernant les relations, la causalité soulève inévitablement des questions. Ainsi, il se peut que les personnes qui visitent les GLAM soient plus « tournées vers les autres » que celles qui n’y vont pas, mais est-ce parce que les GLAM les inspirent à « parler à leurs voisins » ou est-ce parce qu’elles mènent une vie active et diversifiée et choisissent de visiter les GLAM? En outre, l’estimation peut grandement varier selon les spécifications et les hypothèses de modélisation.

Voilà pourquoi cette approche n’a pas été adoptée comme fondement principal de la présente étude. Néanmoins, il est important de reconnaître le bien-être comme un avantage possible, et il vaut la peine d’examiner de plus près les éventuelles relations entre l’usage des GLAM et les mesures du bien-être.

Au Royaume-Uni, Fujiwara et coll. ont effectué un travail approfondi sur les musées, les galeries et les bibliothèques en utilisant diverses mesures de la satisfaction de la vie, à partir de diverses mesures du bien-être déclarées par les personnes elles-mêmes (par exemple, le bien-être subjectif, la santé, le bonheur). Cette approche permet d’examiner l’influence qu’a l’usage de ces établissements sur les mesures autodéclarées du bien-être des personnes. Elle offre également une méthode pour convertir ces répercussions en équivalents monétaires. Dans une série d’articles, ces auteurs constatent ce qui suit :

  • La visite d’un musée est associée à une amélioration du bien-être (bonheur) équivalant à recevoir 3 228 £ (6 874 $) par année.Footnote 87
  • L’usage fréquent des bibliothèques est associé à une amélioration du bien-être équivalant à recevoir 1 359 £ (2 894 $) par année.Footnote 88
  • L’usage des bibliothèques pourrait améliorer les chances des jeunes d’accéder à l’enseignement supérieur, avec un avantage estimé à 2 114 £ (4 955 $) par personne.Footnote 89

Les valeurs citées aux deux premiers points représentent le montant d’argent qui produirait le même effet que l’usage de l’établissement sur le bien-être d’une personne. Ainsi, la visite de musées a le même effet sur le bien-être que de recevoir 6 874 $ par année. La valeur de l’usage des bibliothèques mentionnée au dernier point représente l’avantage net par personne qu’offrent les bibliothèques d’augmenter la probabilité de fréquentation d’un établissement d’enseignement supérieur (ce qui, à son tour, accroît la capacité future de gagner des revenus, comme il est expliqué dans le chapitre sur l’éducation formelle ci-dessus).

Ces auteurs soulignent que leurs travaux doivent susciter quelques réserves en ce qui concerne la causalité. En substance, cependant, ils estiment avoir fait de leur mieux pour contrôler les effets des variables démographiques (par exemple l’âge, l’éducation, le revenu) et, dans certains cas, les « instruments » afin de gérer la causalité, mais la causalité inverse pourrait poser problème. Ils soutiennent tout de même que l’approche adoptée serait acceptable en vue d’élaborer des politiques publiques.

Néanmoins, de tels travaux soulèvent des questions intéressantes, notamment la suivante : constate-t-on des répercussions semblables dans le cas des GLAM canadiens? L’encadré ci-dessous donne un aperçu de la façon dont l’étude actuelle s’est acquittée de cette tâche. De plus amples détails techniques figurent à l’annexe 4.

Mesurer le bien-être

Afin d’explorer cette question, l’enquête nationale menée dans le cadre de la présente étude comprenait des questions relatives à plusieurs dimensions du bien-être, en fonction des résultats d’enquêtes sociales canadiennes déjà menées.Footnote 90 Le questionnaire détaillé se trouve à l’annexe 6. En bref, les questions de l’enquête choisies pour faire l’objet d’une analyse plus approfondie comprennent celles concernant :

  • la satisfaction à l’égard de la vie — degré de satisfaction d’une personne à l’égard de sa vie;
  • la santé — évaluation que fait une personne de sa santé;
  • les relations de voisinage — le degré de connaissance d’une personne envers ses voisins;
  • le bénévolat — le fait qu’une personne ait fait du bénévolat ou non au cours des 12 derniers mois.Footnote 91

Conformément aux travaux susmentionnés, on a demandé aux participants d’évaluer leur bien-être en fonction de leur satisfaction à l’égard de la vie, de leur santé et de leurs relations de voisinage, puis d’indiquer s’ils avaient fait du bénévolat ou non au cours de la dernière année. Leurs réponses ont ensuite été codées selon les échelles numériques indiquées plus haut.

Puisque la fréquentation des GLAM (et la fréquence de cette fréquentation) a également été établie dans le cadre de l’enquête nationale, il est possible d’analyser l’incidence de l’usage des GLAM sur les mesures du bien-être.

La façon la plus simple de procéder consiste à comparer les cotes moyennes des répondants qui ont utilisé au moins un GLAM au cours de la dernière année à celles des répondants qui n’ont pas utilisé de GLAM.

Fig. 21. Mesures du bien-être des usagers et des non-usagers des GLAMFootnote 92 figure 21

Source : Oxford Economics

Figure description

Bien entendu, de nombreuses autres influences, comme l’âge, l’éducation, la situation d’emploi et le sexe, pourraient avoir une influence sur le bien-être des gens. Par conséquent, des travaux économétriques plus détaillés ont été entrepris, en tenant compte de l’influence du revenu, de l’âge, du niveau de scolarité, de l’emploi et du sexe. De plus, la fréquence à laquelle les usagers ont visité les GLAM pourrait faire une différence. Si c’est le cas, une approche qui n’examine que le sous-groupe des personnes faisant un usage très fréquent des GLAM pourrait donner des résultats différents de ceux d’un modèle qui examine l’usage moyen global. On a donc apporté deux spécifications au modèle de base pour cette analyse :

  • Approche 1 — la relation entre les personnes qui ont utilisé les GLAM au cours de la dernière année et le bien-être (approche axée sur l’usage);
  • Approche 2 — la relation entre les usagers fréquents (3 fois ou plus) des GLAM et les mesures du bien-être (approche axée sur la fréquence).

Ces deux approches ont fait appel à l’analyse de régression pour tenir compte de l’âge, du revenu, de la situation d’emploi et du sexe afin d’évaluer l’incidence que l’usage des GLAM pourrait avoir sur le bien-être.

Ces approches et les résultats obtenus sont décrits plus en détail à l’annexe 4.

Les principaux résultats de la modélisation en fonction de l’approche faisant un lien entre le bien-être et l’usage des GLAM au cours de la dernière année (approche 1 dans l’encadré ci-dessus) sont présentés ci-dessous. La variable dépendante représente l’indicateur du bien-être.

Fig. 22. Bien-être offert par les GLAM : résultats de la régression pour l’usage Footnote 93
Variable dépendante Incidence de l’usage d’au moins un GLAM au cours de la dernière année (grandeur de coefficient) Échelle Footnote 94
Satisfaction à l’égard de la vie Non significative -
Santé 0,14 1 à 5
Relations de voisinage 0,07 1 à 4
Bénévolat 0,16 0 à 1

Source : Analyse d’Oxford Economics

En termes simples, ces résultats indiquent l’existence de relations positives et significatives entre l’usage des GLAM et les indicateurs de bien-être en ce qui concerne la santé, les relations de voisinage et le bénévolat. Ainsi, l’usage d’au moins un GLAM au cours de la dernière année est associé à une augmentation de 0,14 de l’état de santé autodéclaré (sur une échelle de 1 à 5, où 1 est mauvaise santé et 5 est excellente santé). Des corrélations positives ont également été constatées entre l’usage des GLAM, d’une part, et les relations de voisinage et le bénévolat, d’autre part.

Fait intéressant, aucune relation significative n’a été constatée entre la fréquentation des GLAM et la satisfaction à l’égard de la vie. Ce résultat contredit les conclusions de Fujiwara et coll. (avril 2014) en ce qui concerne les bibliothèques au Royaume-Uni. Cela dit, on peut faire une distinction entre la satisfaction à l’égard de la vie et les mesures du « bonheur » qui sont parfois utilisées dans les enquêtes sur le bien-être. La satisfaction à l’égard de la vie représente l’évaluation que les gens font de la vie dans son ensemble (et de la façon dont elle peut se mesurer jusqu’à l’atteinte de leurs objectifs). Le bonheur puise dans les émotions et les humeurs des gens dans le moment présent. Fujiwara (2014) fait valoir que, comme ces mesures s’appuient sur différents aspects de la vie des gens, nous pourrions nous attendre à ce qu’elles produisent des résultats différents au moment d’évaluer les répercussions des GLAM. De plus, il souligne que la santé est fortement corrélée aux mesures du bonheur et qu’elle peut éclairer la façon dont l’usage des GLAM influe sur le bien-être.

Bien que la présente étude ne comporte aucune mesure du bonheur, ces observations sont instructives. En plus de présenter un intérêt en soi, la santé peut donc être une « variable masquante » (ou variable substitutive) du bonheur. Dans cette optique, et compte tenu des récentes initiatives canadiennes reconnaissant l’incidence possible des GLAM sur la santé, les résultats relatifs aux répercussions sur la santé présentent un intérêt particulier.

Ces approches et les résultats obtenus sont décrits plus en détail à l’annexe 4. De plus, tel qu’indiqué à l’annexe 4, ces résultats de régression permettent également de fournir une estimation monétaire de l’avantage équivalent des GLAM pour le bien-être. Selon cette estimation, la valeur annuelle des GLAM pour l’amélioration du bien-être d’un usager moyen (mesurée par les effets sur la santé) équivaut à 1 440 $.Footnote 95

Une autre approche (l’approche 2 ou l’approche axée sur la fréquence) consiste à n’examiner que les usagers les plus assidus des GLAM (c.-à-d. ceux qui ont utilisé des GLAM trois fois ou plus au cours d’une année). Cette valeur a été modélisée à partir de diverses spécifications : régression linéaire simple, régression logistique (« logit »), modèle de variable instrumentale avec estimateur des doubles moindres carrés et modèle logit ordonné.

En général, nous avons commencé par des modèles plus simples (le modèle de régression linéaire simple) en utilisant un plus grand nombre de variables (y compris les produits croisés entre les variables), puis nous avons graduellement réduit le nombre de variables pour nous limiter à celles qui étaient significatives et exemptes de problème statistique.

On trouvera à l’annexe 4 des précisions sur la méthodologie utilisée et les résultats complets des régressions qui ont donné les meilleurs résultats. Ces résultats couvrent chacun des avantages généraux du bien-être subjectif général, de la santé, de la participation communautaire et du bénévolat. Chaque avantage est ventilé selon le type d’établissement : galeries, bibliothèques, archives et musées.

Pour comparer divers modèles, nous avons utilisé une gamme de critères :

  • la nécessité que les variables indépendantes soient statistiquement significatives à un niveau de confiance de 95 % (c.-à-d. que leurs paramètres ont une valeur p inférieure à 0,05);
  • l’importance du coefficient de fréquence des visites (un coefficient positif plus important indique une plus grande incidence sur l’aspect du bien-être qui nous intéresse);
  • l’ajustement global du modèle (R-carré ajusté ou variable khi-carré).

Fig. 23 ci-dessous montre les coefficients de fréquence des visites (souvent appelés « facteurs d’impact ») pour ces diverses spécifications du modèle.

Fig. 23. Facteurs d’impact sur les avantages globaux, selon le type de modèle de régression
Type d’avantage global Coefficient (erreur-type, type de variable de fréquence)
Régression linéaire simple Régression logistique Variable instrumentale (doubles moindres carrés) Régression logit ordonnée
Bien-être subjectif général 0,016***
(0,004)
[Cont.]
0,276***
(0,029)
[Cont.]
0,165*
(0,095)
Galeries 0,717***
(0,183)
Bibliothèques 0,667***
(0,093)
Archives 0,880***
(0,267)
Musées 0,686***
(0,100)
Santé 0,083*
(0,044)
0,419***
(0,152)
0,276***
(0,094)
Galeries 0,062***
(0,031)
0,426*
(0,237)
0,603***
(0,174)
Bibliothèques 0,062***
(0,020)
0,375***
(0,124)
0,358***
(0,094)
Archives 0,104***
(0,044)
0,484*
(0,251)
Museums 0,047***
(0,020)
0,232***
(0,114)
Relations de voisinage 0,255***
(0,065)
1,055***
(0,281)
0,510***
(0,118)
0,523***
(0,104)
Galeries 0,224***
(0,042)
0,944***
(0,174)
0,758***
(0,168)
Bibliothèques 0,167*
(0,098)
Archives 0,300***
(0,065)
1,250***
(0,276)
1,017***
(0,250)
Musées 0,089***
(0,022)
0,341***
(0,107)
0,374***
(0,100)
Bénévolat 0,247***
(0,065)
0,983***
(0,282)
0,308***
(0,069)
Galeries 1,195***
(0,182)
Bibliothèques 0,562***
(0,108)
Archives 0,983***
(0,282)
Musées 0,636***
(0,109)

Source : Oxford Economics
Signification : *** = 0,01, ** = 0,05, * = 0,1. Les erreurs-types sont robustes.
Les résultats supérieurs sont en caractères gras. Les modèles comportant des paramètres de fréquence non significatifs sont exclus. [cont.] = variable dépendante continue.

Cette approche plus complexe révèle évidemment des corrélations positives entre les visites aux GLAM et les dimensions de base du bien-être, en tenant compte des facteurs démographiques. Notons également que, dans les modèles de régression linéaire simples, seul le bien-être subjectif général pour tous les GLAM comporte une variable dépendante qui est effectivement continue (mesurée sur une échelle ordonnée de 0 à 10), tout comme le modèle des variables instrumentales (doubles moindres carrés). C’est donc dire que chacun des facteurs d’impact, ou coefficients, représente la hausse du bien-être résultant de visites supplémentaires. Les autres régressions linéaires simples permettent de calculer une régression des variables binaires ou fictives (1 pour les usagers fréquents, sinon 0) pour une combinaison de variables explicatives continues et binaires (les variables dépendantes).

Les différentes combinaisons de formats variables signifient que la plupart des régressions utilisées doivent être interprétées avec prudence. Par exemple, que signifie l’ajustement d’une ligne lorsque le résultat ne peut prendre que 1 ou 0? Une telle fonction de régression est interprétée comme une probabilité conditionnelle. Par exemple, nous estimons qu’il y a une probabilité de 0,72 que les visiteurs réguliers de galeries (trois visites ou plus) déclarent un bien-être subjectif général plus élevé que les visiteurs non réguliers, en tenant compte des variables démographiques (Stock et Watson, 2015). Notamment, toutes les régressions ne tiennent compte que des facteurs démographiques statistiquement significatifs pour éviter les biais et l’inflation dans les résultats.

À première vue, les modèles de régression robustes indiquent que les visites aux GLAM ont une influence positive importante sur le bien-être. Nous constatons une incidence plus marquée de la fréquence des visites sur les divers aspects du bien-être pour chaque type de GLAM. Il s’agit d’un résultat intuitif, car on pourrait s’attendre à ce que les mêmes groupes de personnes qui visitent certains établissements ont également en commun de plus grandes similitudes en ce qui concerne leur bien-être déclaré et les facteurs démographiques. Afin de comparer ces avantages globaux selon les dimensions du bien-être ou chaque type de GLAM, une étude plus détaillée des résultats de la régression est nécessaire, comme l’indique l’annexe 4.

En bref, bien que la relation entre les GLAM et le bien-être puisse être modélisée de diverses façons (et que les problèmes de causalité persistent), ces résultats fournissent certaines données probantes indiquant que les GLAM pourraient contribuer au bien-être.

Comme c’est le cas pour les modèles plus simples examinant l’usage et le non-usage des GLAM ci-dessus, ces avantages peuvent être exprimés en valeur monétaire dans la mesure où la régression utilisée contient des paramètres statistiquement significatifs, notamment le revenu. Par exemple, à l’aide de la spécification des doubles moindres carrés, nous constatons que les visites régulières (trois fois ou plus par année, pour tous les types d’établissements) sont associées à une amélioration annuelle du bien-être (mesurée par les effets sur la santé) équivalente à 4 149 $ par usager de GLAM. Cette valeur plus élevée pourrait indiquer que l’usage plus fréquent des GLAM est associé à une amélioration du bien-être.

8.3 Capital social

Il existe diverses définitions du capital social, qui tournent toutes autour de l’idée de confiance, de cohésion sociale et d’engagement envers les institutions. L’ OCDE définit ce terme comme « des réseaux assortis de normes, de valeurs et de conceptions communes qui facilitent la coopération au sein des groupes ou entre eux ».Footnote 96

Dans une large mesure, les arguments relatifs au capital social semblent recouper ceux sur le bien-être dont il a été question plus haut, de même que ceux sur l’éducation informelle dont il est question ci-dessous. Ainsi, il se peut que les visites aux GLAM améliorent la compréhension envers les autres collectivités, les relations de voisinage et le bénévolat, ainsi que favorisent des collectivités plus instruites. Une meilleure éducation pourrait permettre aux gens de trouver de meilleurs emplois (soit une productivité accrue grâce au capital humain) et d’être de meilleurs citoyens.

Comme c’est le cas pour le bien-être et l’éducation informelle, le capital social a fait l’objet de nombreuses études, tant au Canada qu’à l’étranger, en tant que domaine d’intérêt général ou de répercussion de la fréquentation des GLAM.Footnote 97

Cela dit, ces répercussions peuvent ne pas profiter qu’aux personnes concernées. Il peut y avoir des retombées profitables à la société dans son ensemble – p. ex., le nombre accru de personnes qui font du bénévolat ou qui ont de bonnes relations de voisinage peut inspirer d’autres personnes à faire de même, créant ainsi un cercle vertueux.

Toutefois, à ce jour, la plupart des arguments plaidant en faveur du capital social ont porté sur des mesures qualitatives ou descriptives plutôt que sur la mesure quantitative du phénomène. À part l’analyse du bien-être faite dans la présente étude, les travaux de Riddell constituent une exception partielle à cette règle. Il semblerait cependant que les répercussions sociales se rapportent surtout aux personnes mêmes plutôt qu’à une mesure des effets d’entraînement (ou retombées) sur le reste de la société.

Le chevauchement entre les concepts entourant le capital social et les idées explorées ailleurs dans le présent chapitre, ainsi que l’absence de quantification dans la littérature, rend difficile la quantification de ces répercussions.

8.4 Éducation informelle

Outre les avantages éducatifs formels mentionnés au chapitre 7, les GLAM peuvent contribuer à l’éducation informelle des gens, c’est-à-dire l’éducation qu’ils entreprennent dans leurs temps libres. Entre autres exemples de répercussions de l’éducation informelle, mentionnons l’amélioration des capacités de lecture et d’écriture grâce aux livres empruntés aux bibliothèques publiques, ainsi que l’acquisition de connaissances lors de visites de musées et de galeries publics.

On suggère souvent le lien suivant : l’exposition aux GLAM peut aider les enfants, en particulier, à approfondir leurs connaissances. Dans le cas des bibliothèques publiques, l’éducation informelle qu’elles offrent à ces derniers peut favoriser la lecture, améliorer les résultats en écriture et aux tests et ainsi accroître leurs chances d’accéder à des études supérieures et à des emplois mieux rémunérés (et plus productifs). De leur côté, les établissements comme les musées et les galeries peuvent stimuler leur curiosité, parfaire leurs connaissances et susciter leur créativité, de même que favoriser l’apprentissage après l’école et l’obtention de meilleurs résultats scolaires, ce qui, encore une fois, vient augmenter leurs chances de poursuivre des études postsecondaires et améliorer les salaires et les situations d’emploi. L’apprentissage en science, technologie, ingénierie et mathématique (STIM) que favorisent les musées est souvent cité en exemple pour illustrer ces répercussions.Footnote 98

Bon nombre de ces répercussions (surtout en ce qui concerne les galeries et les musées) sont regroupées sous le nom de « capital culturel », terme initialement inventé par Pierre Bourdieu pour décrire le degré de familiarité avec les codes culturels dominants de la société.Footnote 99

La connaissance de ces codes peut profiter à la personne, même si elle ne fait qu’« induire » une sensibilisation culturelle. Toutefois, une population plus scolarisée peut offrir certains avantages aux apprenants eux-mêmes grâce à des salaires et à une productivité plus élevés (l’avantage le plus souvent mesuré par les économistes). On peut également constater des répercussions sur la société en général, comme on l’a suggéré plus haut, puisqu’une population plus instruite peut démontrer de meilleures valeurs civiques, comme un engagement envers la primauté du droit, des taux de criminalité plus faibles, une participation plus élevée au vote et aux autres institutions démocratiques, et une sensibilisation accrue à l’environnement.

La figure ci-dessous donne un aperçu du cycle positif dans lequel l’éducation informelle des enfants et des jeunes adultes offerte par divers types de GLAM pourrait avoir de telles répercussions.

Fig. 24. Répercussions de l’éducation informelle figure 24
Figure description

Ces questions sont examinées plus en détail à l’annexe 5. En bref, notre compréhension des répercussions des GLAM sur l’éducation informelle a fait des progrès prometteurs, et certaines de ces répercussions peuvent être quantifiées, particulièrement dans le cas de l’apprentissage informel des enfants et des jeunes adultes. Nous avons adopté une position relativement prudente sur cette question et avons exclu ces répercussions de l’ ACA dans le cadre de notre étude. Néanmoins, il importe de mettre en évidence l’incidence que peuvent avoir ces répercussions sur le bien-être économique.

8.5 Retombées économiques à long terme

Comme nous l’avons indiqué précédemment, le cadre d’ ACA standard adopté ci-dessus suppose que les personnes qui utilisent les GLAM le font parce qu’elles le jugent utile et considèrent en retirer un avantage. Prenons l’exemple d’un entrepreneur qui fréquente une bibliothèque à des fins professionnelles dans le cadre d’une recherche pour fonder une nouvelle entreprise. La MCT devrait tenir compte des avantages pour la société d’une visite à la bibliothèque. Si le coût du trajet était plus élevé que les avantages tirés de la recherche, le visite n’aurait pas eu lieu.Footnote 100

Toutefois, l’économie reconnaît (dans les limites du raisonnable) le potentiel de ce qu’on appelle les « retombées ». Il y a retombées lorsque les conséquences des actions personnelles ou organisationnelles ne sont pas pleinement appréciées par les personnes concernées. La recherche-développement (R-D) est une forme de retombées (positives) souvent citée dans la littérature économique. Les entreprises peuvent investir dans la R-D à leurs propres fins et en tirer un certain avantage. Toutefois, leurs innovations et les utilisations ultimes qui en sont faites sont plus utiles à la société que ce qu’elles peuvent avoir elles-mêmes prévu au départ, parce que d’autres s’inspirent de leurs inventions et les adaptent d’une manière inédite.

En principe, les GLAM pourraient donc présenter des retombées à long terme qui ne sont pas prises en considération dans un cadre de bien-être économique conventionnel à court terme. Ainsi, le fait de mener des recherches liées au travail dans une bibliothèque publique pourrait notamment déboucher sur la création d’un nouveau produit ou d’une nouvelle entreprise. D’autres entreprises peuvent ensuite améliorer ce produit de façon imprévue. Des retombées peuvent donc, en bout de ligne, découler de l’utilisation de la bibliothèque publique pour développer le produit.

Ces questions sont examinées plus en détail à l’annexe 5. En bref, les cadres actuels de bien-être économique se sont révélés remarquablement résistants aux critiques, et les questions relatives à la causalité et au double comptage suscitent des inquiétudes quant à l’application des retombées à long terme.

Néanmoins, s’il convient d’être prudent quant à ces avantages, il peut en principe y avoir des retombées positives des GLAM en tant que complément au bien-être économique conventionnel. En particulier, il se peut que l’accès aux GLAM soit un indicateur d’une société ayant de solides valeurs civiques et des institutions dignes de confiance et qui adhère aux principes démocratiques et à la primauté du droit. Les répercussions qui en découlent pourraient stimuler la croissance économique à long terme et procurer des avantages sociaux.

Voilà qui est vrai non seulement pour le bien-être économique, mais aussi pour le bien-être de la société en général (thème repris dans le chapitre suivant). Les exemples ci-dessous renforcent ce point en examinant ce qui se produit lorsque l’accès aux GLAM est restreint, plus précisément dans le cas des archives. Même si les archives peuvent être perçues par certains comme inoffensives, elles sont l’un des GLAM les plus controversés sur le plan social. La question des documents qui y sont conservés (et surtout ceux qui ne le sont pas) et des personnes qui sont autorisées à y accéder peut faire l’objet d’un grand débat de société.

Étude de cas : l’ouverture des archives fait-elle une différence?

La question de savoir à quoi ressemblerait un monde sans les GLAM, c’est-à-dire quelle différence ils font, est à la base de bon nombre des questions abordées dans ce rapport. Même s’il est impossible de faire une analyse contrefactuelle complète (bien que nous soulignions les différences entre usagers et non-usagers), nous pouvons examiner les cas ayant donné lieu à quelque chose de semblable.

L’ouverture partielle des archives de l’ancienne Union soviétique (et même de ses États satellites) après la fin de la Guerre froide en est un exemple. L’ouverture des archives peut être perçue comme ce que les économistes appellent une « expérience naturelle », c’est-à-dire une situation où des événements se produisant en dehors du contrôle des analystes donnent un aperçu d’une question particulière. Dans ce cas, un événement unique nous permet d’acquérir des connaissances qui ne se limitent pas aux nuances de l’histoire soviétique, mais qui mettent en évidence des questions beaucoup plus générales concernant l’importance des archives au Canada et ailleurs.

Bien qu’interrompue et partielle, l’ouverture des archives soviétiques a mis en lumière des questions comme :Footnote 101

  • Le secret était si omniprésent entre les divers ministères qu’il était difficile de planifier ou d’allouer efficacement les ressources.
  • L’inefficacité de la coordination ministérielle et du contrôle de la qualité a grandement nui au progrès technologique civil soviétique; les militaires se distinguaient par un contrôle de qualité poussé.
  • L’« accélération de la production » ou storming (atteinte des objectifs mensuels dans les derniers jours du mois, entraînant des produits de piètre qualité) était pratique courante et concernait 40 % à 60 % de la production dans les années 1960.
  • Les taux de croissance macroéconomique ont été exagérés par une inflation cachée.
  • Le nombre de décès survenus lors de la Deuxième Guerre mondiale est plus élevé d’environ 7 millions que les chiffres avancés avant 1991 (27 millions plutôt que 20 millions).
  • La sécurité plutôt que l’idéologie a été l’un des principaux moteurs de la Guerre froide.

Applebaum (2004) souligne que les données archivistiques soviétiques publiées ont été essentielles à sa recherche sur le goulag, lui ayant permis de quantifier la nature des camps (la plupart des détenus étaient des paysans et des travailleurs, et non des intellectuels) et leur omniprésence (18 millions de personnes y ont transité). Pour elle, l’important n’est pas que la recherche archivistique nous aide à garantir que « de telles choses ne se reproduiront jamais » (ou se dérouleront de la même façon), mais qu’elle nous aide à comprendre le comment et le pourquoi pour préparer les sociétés à y faire face lorsqu’elles se produiront.Footnote 102

Les révélations des archives peuvent également être très personnelles; les anciennes archives de la Stasi ont permis de découvrir un modèle de surveillance très répandu qui a forcé les familles, les amis et les voisins à faire face à des questions difficiles.Footnote 103 D’autres ont fait le lien entre la diffusion des archives soviétiques et des exemples internationaux, comme la Commission vérité et réconciliation post-apartheid en Afrique du Sud, voyant l’ouverture des archives comme une bonne indication de la transparence du gouvernement et de la robustesse sociale.Footnote 104

Les pays occidentaux ne sont pas à l’abri de tels enjeux. Au Canada, les archives ont joué un rôle important en fournissant des documents essentiels à la Commission de vérité et réconciliation. La Commission a siégé de 2008 à 2015 pour révéler la vérité sur les préjudices individuels et collectifs causés par le système des pensionnats chez les élèves autochtones et leur famille et susciter un processus de guérison et de réconciliation.

Même si la recherche archivistique continue peut amener les pays à devoir faire face aux épisodes troublants de leur histoire, certains se sont récemment butés au problème inverse : qu’arrive-t-il lorsque les documents d’archives sont détruits ou interdits d’accès? Parmi les exemples récents, mentionnons la perte des documents du scandale Windrush et l’interdiction d’accès aux archives nationales hongroises après 1945.Footnote 105

En quoi cette question est-elle pertinente dans un cadre économique? Devrait-elle l’être? Les travaux susmentionnés montrent de quelle façon le blocage de l’information nous empêche de bien comprendre le fonctionnement des économies et des sociétés. En effet, les archives laissent voir que les décideurs soviétiques eux-mêmes ont souffert d’un manque d’information sur leur propre société et leur propre économie, ce qui a nui à leurs efforts de gestion.

Voilà qui rejoint les questions explorées dans le texte précédent. Premièrement, en présence d’une restriction de l’information, on peut présumer que les décisions clés ne sont pas prises de façon efficace.Footnote 106 Les archives font partie du processus décisionnel – nous ne pouvons pas bien comprendre le fonctionnement de l’économie ou de la société si nous ne pouvons pas tirer des leçons ou prendre des décisions optimales. En bref, la « rupture du barrage » des archives soviétiques indique clairement que les archives font une différence, même en termes économiques bruts, sans parler des grandes préoccupations sociales.

Deuxièmement, les archives (et les GLAM) ont-elles des retombées à long terme? Comme mentionné précédemment, au Canada et dans la plupart des pays occidentaux comparables, on s’attendrait à ce que, précisément parce que l’accès à l’information est disponible (contrairement à l’ancienne Union soviétique), la décision d’utiliser les archives témoigne grandement de la valeur continue de celles-ci (telle que mesurée par des méthodes comme la MTC).

Néanmoins, cette étude de cas donne également l’impression qu’il pourrait y avoir des retombées à plus long terme au-delà du cadre de l’ ACA. Lorsqu’on constate l’incidence d’une restriction in extremis de l’accès aux données, on comprend que les archives ont un rôle à jouer dans la création d’une société dans laquelle la confiance à l’égard de l’accès à l’information fait partie du capital social. Les archives s’inscrivent dans une démarche de maintien d’une société civile, responsable devant des citoyens informés et éduqués et devant la primauté du droit. En principe, certaines de ces retombées pourraient s’ajouter à la valeur directe obtenue par l’usage des archives et se constater seulement à long terme à l’échelle macroéconomique (soit l’argument en faveur des « données ouvertes »).

En outre, il y a bien sûr les grands enjeux sociaux, soulignés plus haut, dont les cadres économiques ne peuvent rendre compte. La restriction de l’accès aux dossiers personnels (qu’il s’agisse de ceux de la génération de la Stasi ou du scandale Windrush) peut avoir des répercussions directes sur les personnes vivantes, ce qui fait ressortir l’importance des institutions de mémoire pour la société.

8.6 Remarque sur l’emploi et les effets multiplicateurs

Outre les répercussions générales susmentionnées, l’emploi et les effets multiplicateurs sont parfois mentionnés comme d’importants avantages des GLAM.

Comme nous l’avons mentionné, les bibliothèques en particulier peuvent jouer un rôle important dans l’emploi et la formation. Ainsi, un usager actuellement en emploi peut utiliser une bibliothèque publique pour en trouver un nouveau. La bibliothèque a donc joué un certain rôle dans sa recherche d’emploi. Et, en effet, son choix d’utiliser la bibliothèque publique dans sa démarche fera partie de sa décision de s’y rendre. Comme pour toute autre raison de se rendre à la bibliothèque, la valeur estimée par la MCT tiendra compte de cette décision. Si les avantages offerts par les services de la bibliothèque étaient inférieurs au coût du trajet pour se rendre à la bibliothèque, il n’aurait pas fait le trajet.

De même, les personnes sans emploi peuvent utiliser les ressources de la bibliothèque pour se former et trouver du travail; la valeur de la bibliothèque pour ces usagers sera donc prise en considération dans le cadre de la MCT.

Toutefois, à quelques exceptions près, les nouveaux emplois eux-mêmes ne font pas partie des avantages mesurés par les évaluations du bien-être économique. Cette question est examinée plus en détail à l’annexe 5.

Les effets multiplicateurs sur les détaillants locaux sont aussi souvent mentionnés dans le contexte des GLAM. Ainsi, l’ouverture d’une nouvelle galerie peut inciter les gens à la visiter, puis à faire des achats à proximité, offrant aux détaillants une source appréciée de revenus et les amenant ensuite à passer des commandes auprès de leurs fournisseurs, et ainsi de suite ( effets multiplicateurs). Cela dit, de sérieuses raisons techniques nous empêchent d’inclure ces répercussions dans l’analyse du bien-être économique.

Dans les deux cas, il importe de faire une distinction entre étude de l’impact économique (qui mesure les emplois, le PIB et les effets multiplicateurs) et étude du bien-être économique (qui mesure les avantages nets pour la société). Les études de l’impact économique mesurent l’activité économique en fonction de la contribution à l’économie dans son ensemble, ou la part du « potentiel économique » revenant à des institutions comme les GLAM. En revanche, les études du bien-être économique mesurent les avantages nets (avantages moins coûts), c’est-à-dire la façon dont la société s’en porte mieux et la façon dont les institutions comme les GLAM augmentent ce potentiel économique.

Comme nous l’avons mentionné, la présente étude porte sur le bien-être économique, de sorte que les emplois en soi et les effets multiplicateurs ne font pas partie des avantages évalués. À l’inverse, de nombreuses autres répercussions, comme le surplus du consommateur, la valeur de non-usage et les avantages éducatifs formels, sont inclus dans une analyse du bien-être économique, mais exclus d’une étude de l’impact économique.

Un résumé des avantages généraux souvent associés aux GLAM est présenté ci-dessous. Il précise en quoi ces répercussions peuvent (ou non) faire partie des grands avantages économiques, en plus de s’inscrire dans le cadre du bien-être économique utilisé dans la présente étude.

Fig. 25. Typologie des avantages globaux
Répercussion Commentaire sur l’application au cadre économique
Bien-être Les répercussions sur le bien-être sont un effet potentiel important. Toutefois, cette approche peut être considérée comme une solution d’évaluation de rechange au cadre conventionnel du bien-être économique.
Capital social Concept important, abondamment analysé dans la littérature, mais de nombreux aspects recoupent le bien-être, l’éducation informelle et les retombées.
Éducation informelle Des preuves de plus en plus nombreuses de l’existence de répercussions. Néanmoins, les liens de causalité demeurent incertains.
Retombées Il peut exister certaines preuves de retombées, et les « expériences naturelles » en fournissent quelques-unes, mais une quantification robuste de la causalité reste difficile.
Effets sur l’emploi Les avantages des GLAM dans la recherche d’emplois devraient être pris en considération dans la MCT. Cependant, les nouveaux emplois ne feraient pas eux-mêmes partie d’un cadre du bien-être économique.
Effets multiplicateurs Ne convient qu’à une étude de l’impact économique. Leur inclusion est incompatible avec les principes du bien-être économique.

Source : Analyse BIS Oxford Economics

Comme nous l’avons mentionné, les annexes 4 et 5 abordent plus en détail la question des avantages globaux.


Avantages sociaux qualitatifs : analyse multicritères

Comme mentionné précédemment, l’analyse économique est un précieux outil pour examiner certaines questions, comme la valeur que donne la société à l’usage des GLAM, de manière éclairée, subtile et puissante. Toutefois, elle n’offre qu’une vision du monde (parmi tant d’autres). Un certain William Shakespeare a fait une bonne mise en garde contre les limites de toute vision du monde il y a quelques siècles :

Il y a plus de choses dans le ciel et la terre, Horatio
Que tu n’en rêves dans ta philosophie.
Hamlet (acte 1, scène 5)

Certains peuvent penser que les GLAM offrent plus d’avantages que ne le laisse voir l’analyse économique – ou même qu’ils suscitent des valeurs sociales intrinsèques dont les cadres économiques ne peuvent rendre compte. Voilà pourquoi l’ analyse multicritères ( AMC) a également été utilisée pour évaluer l’importance perçue et le degré d’efficacité de ces attributs. L’ AMC permet d’obtenir une vision plus globale des avantages, notamment les opinions et les sentiments qu’ont les gens à l’égard des GLAM. À l’instar de l’approche axée sur le bien-être, l’ AMC a été intégrée à l’enquête nationale auprès de la population canadienne, ainsi qu’à une enquête menée auprès des intervenants des GLAM.

Notre AMC a surtout porté sur sept dimensions clés qui ont été jugées particulièrement pertinentes lors des discussions avec l’Association des musées canadiens et BAC. Ces dimensions sont les suivantes :

  1. Mobilisation communautaire et participation citoyenne;
  2. Préservation du patrimoine culturel et historique;
  3. Accès aux ressources nécessaires à la recherche, à l’innovation et à l’éducation;
  4. Protection de la vérité, de l’intégrité et des valeurs sociales;
  5. Qualité de vie, santé mentale et physique et bien-être;
  6. Source d’inspiration pour la créativité;
  7. Promotion de l’identité des collectivités marginalisées et contribution à la cohésion communautaire.

Dans le cadre de l’ AMC, nous avons inclus dans notre enquête nationale des questions sur les attributs que le grand public et les intervenants des GLAM appréciaient le plus au sujet des GLAM. On a demandé aux répondants d’évaluer chaque attribut sur une échelle de 1 à 10 pour évaluer leur importance relative, ce qui donne une indication claire de la valeur relative de ces critères pour divers publics.

Les résultats tendent à montrer que le grand public et les intervenants des GLAM s’entendent sur les objectifs sociaux qui comptent le plus pour chaque GLAM (Fig. 26). Les deux groupes de répondants conviennent du fait que les archives et les musées jouent un rôle clé dans la préservation du patrimoine canadien, tandis que les bibliothèques jouent un rôle crucial dans l’accès aux ressources nécessaires à la recherche.

Fait intéressant, les objectifs sociaux des galeries d’art ne font pas autant consensus : pour le grand public, la préservation du patrimoine est la dimension la plus importante, tandis que les intervenants des GLAM mentionnent en premier lieu le fait que les galeries soient source d’inspiration pour la créativité. Une autre constatation intéressante a trait aux perceptions à l’égard des bibliothèques. Les intervenants classent la mobilisation communautaire au deuxième rang des attributs les plus importants, tandis que le grand public la classe parmi les moins pertinents.

En règle générale, les intervenants ont tendance à attribuer des notes plus généreuses, à quelques exceptions près. Le rôle des galeries dans la protection de la vérité est perçu comme plus important pour le grand public que pour les intervenants. De même, l’incidence des archives sur la qualité de vie est ressentie plus fortement par le grand public que par les intervenants.

Même s’il ne faut pas exagérer ces différences, il faut les garder à l’esprit; ces données offrent des perspectives uniques sur le vaste rôle des GLAM. Elles peuvent être utilisées pour examiner des considérations allant bien au-delà de la portée de la présente étude et des estimations quantitatives. Ainsi, elles pourraient notamment aider à répondre à des questions comme : Les GLAM offrent-ils les services que le public estime importants ou y accordent-ils la priorité? Les GLAM devraient-ils montrer la voie à suivre même si le public ne juge pas (encore) certains attributs aussi importants que les intervenants?

Fig. 26. Importance des GLAM, selon les intervenants (bleu foncé) et le grand public (bleu pâle), N = nombre d’intervenants répondants Footnote 107
Galeries
figure 26
Figure description

Fig. 26. Importance des GLAM, selon les intervenants (bleu foncé) et le grand public (bleu pâle), N = nombre d’intervenants répondants
Bibliothèques
figure 26, Libraries
Figure description

Fig. 26. Importance des GLAM, selon les intervenants (bleu foncé) et le grand public (bleu pâle), N = nombre d’intervenants répondants
Archives
figure 26, Archives
Figure description

Fig. 26. Importance des GLAM, selon les intervenants (bleu foncé) et le grand public (bleu pâle), N = nombre d’intervenants répondants
Musées
figure 26, Musées
Figure description

Fait intéressant, lorsqu’ils ont été interrogés sur les niveaux d’efficacité, les intervenants ont signalé des niveaux élevés d’efficacité perçue, surtout en ce qui concerne les attributs les plus importants (Fig. 27). Toutefois, les notes sur l’efficacité ont tendance à être inférieures aux notes sur l’importance indiquées ci-dessus. Voilà qui est important, car si les intervenants estiment que les GLAM – ou certains types de GLAM – ne sont pas aussi efficaces qu’ils pourraient l’être, il est pertinent de comprendre les raisons de cette lacune. Comme dans le cas de la question de l’importance qui précède, peut-être est-il utile de poser la question dès le départ, plutôt que de chercher nécessairement la « bonne » réponse. Ces données donnent un aperçu de ces questions et offrent une excellente occasion d’amorcer les débats.

Fig. 27. Résultats de l’ AMC, efficacité selon les intervenants du GLAM figure 27
Figure description

Conclusion

Les chapitres précédents ont présenté des estimations de la valeur générée par les GLAM pour les visiteurs, la valeur perçue qui leur est attribuée par les non-utilisateurs ainsi que les valeurs en ligne, éducatives et de revenus. Nous estimons que la valeur économique brute des GLAM pour le Canada en 2019 a été de 11,7 milliards de dollars (fig. 28). Cependant, il est important de placer cette estimation de la valeur brute générée par le secteur dans son contexte, en la comparant aux coûts d'exploitation des GLAM, estimés à 3,0 milliards de dollars en 2019. En divisant la valeur des bénéfices quantifiés par ces coûts, on obtient un RCA de 3,9. Cela signifie que pour chaque dollar dépensé pour l'exploitation des GLAM en 2019, 3,90 dollars de bénéfices ont été générés pour la société au cours de la même année, tandis que les bénéfices nets se sont élevés à plus de 8,6 milliards de dollars.

Fig. 28. Sommaire des coûts et avantages des GLAM, 2019
M$ en 2019 Galeries Bibliothèques Archives Musées Tous les GLAM
Recettes 222 31 22 451 727
Valeur de non-usage 536 537 446 693 2 212
Valeur d’usage 615 1 797 185 1 374 3 972
Usage en ligne 378 636 353 277 1 644
Valeur éducative 435 1 361 41 1 271 3 108
Avantages totaux 2 185 4 362 1 047 4 067 11 662
Coût d’exploitation 556 955 395 1 106 3 012
Coût total 556 955 395 1 106 3 012
Rapport coûts-avantages ( RCA) 3,9 4,6 2,7 3,7 3,9
Avantages nets 1 629 3 408 652 2 961 8 650

Source : Oxford Economics

Le RCA de 3,9 est un puissant indicateur de la valeur du secteur. Bien que le RCA soit un outil décisionnel utile, il faut faire preuve de prudence au moment de comparer divers types d’investissements, en raison de l’utilisation de différentes méthodologies et composantes (par exemple, certaines études peuvent ne pas inclure une évaluation de la valeur de non-usage). De plus, il se peut qu’un projet dont la valeur nette sur le plan monétaire est élevée présente un faible RCA.Footnote 108

Il est néanmoins utile de comparer le RCA susmentionné à celui d’études similaires portant sur des institutions culturelles du monde entier. Par exemple, l’examen effectué par l’Americans for Libraries Council ( ALC) des bibliothèques américaines a révélé qu’un RCA de 3,1 ou mieux était courant parmi les études examinées.Footnote 109 Des RCA se situant entre 2,8 et 4,2 ont également été constatés pour les bibliothèques publiques de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande.Footnote 110 Ces résultats et d’autres résultats semblables sont présentés ci-dessous à la Fig. 29.

En outre, en raison de l’importance des investissements concernés, l’économie des transports est un domaine d’application commun pour les analyses coûts-avantages. Des exemples de RCA pour les investissements en infrastructure au Canada sont également résumés à la Fig. 29. Fig. 30 présente le RCA des GLAM dans le contexte des grands projets d’investissement en infrastructure publique au Canada.

Fig. 29. Rapports coûts-avantages dans la littérature
Auteur Année Sujet Emplacement géographique RCA
Études sur l’infrastructure, Canada
Centre for Public Management Inc. 2009 Amélioration de la route de l’Alaska Canada 1,5 à 2,6
Ville de Markham 2018 Infrastructure
grise
Markham (Canada) 2,0 à 5,0
Iacobacci 2017 Investissements dans le
transport en commun
Grand Montréal,
Grand Toronto et
Hamilton (Canada)
0,7 à 3,3
Études sur les bibliothèques publiques, à l’échelle mondiale
Aabø et coll. 2009 Études sur les
bibliothèques nationales
À l’échelle mondiale 3,0 (moyenne)
3,5 (médiane)
Imholz et coll. ( ALC) 2010 Bibliothèques américaines États-Unis 3,1
SGS Economics &
Planning
2013 Bibliothèques publiques Australie 2,9
Strode et al. 2012 Salles de lecture
et services
de prêt
Lettonie 1,4
Aabø 2005 Bibliothèques publiques Norvège 4,0
Yanez 2014 Bibliothèques Espagne 2,8 à 3,8
Kim 2011 Bibliothèques publiques À l’échelle mondiale 3,8 ( EC)4,5 (PR)Footnote 111
Ko et coll. 2012 Bibliothèques publiques Corée 3,7

Source : Iacobacci (2017), Oxford Economics
(*) Résultats déclarés pour l’option de réseau de métro (c.-à-d. SkyTrain.

Fig. 30. RCA des GLAM par rapport aux grands projets d’infrastructure publique au CanadaFootnote 112 figure 30

Source : Iacobacci (2017), Oxford Economics
(*) Résultats déclarés pour l’option de réseau de métro (c.-à-d. SkyTrain.

Figure description

Ces résultats indiquent que les GLAM ont un très bon rendement par rapport aux autres grands investissements sociaux. En substance, un dollar investi dans les GLAM peut éventuellement donner un rendement social plus élevé que les investissements dans d’autres formes d’investissement couramment mesurées, comme les infrastructures de transport.Footnote 113

Il convient également de rappeler que le présent rapport donne un aperçu national d’une foule d’établissements à l’aide d’une gamme d’outils de mesure. Au moment d’examiner les prochaines étapes pour le secteur et les leçons pratiques qu’il doit tirer, il est important que les discussions et les constatations de ce travail soient approfondies à l’échelle locale, provinciale et nationale, tout comme les outils utilisés pour l’analyse elle-même. Même si aucune analyse économique formelle n’est effectuée, les principales catégories de valeur explorées dans le présent rapport peuvent servir de point de départ aux GLAM en vue d’explorer leur base d’usagers et la façon dont ils ajoutent de la valeur à la société.

Par exemple, l’analyse du coût du trajet utilisé dans ce rapport est dérivée des données sur l’origine des usagers des GLAM (codes postaux). Ces données ou des données similaires pourraient être recueillies plus systématiquement et utilisées à de nombreuses autres fins, comme l’examen du lieu de résidence exact des usagers au moyen de « cartes thermiques » et des données démographiques de ces quartiers. Il serait ainsi plus facile de déterminer à quelles collectivités les GLAM fournissent des services et dans quelle mesure les divers groupes de population sont bien représentés. De même, une surveillance plus étroite des paramètres des services en ligne, en particulier les médias sociaux, pourrait fournir des renseignements supplémentaires sur l’utilisation qui est faite des services offerts par les GLAM. En plus de mieux comprendre les services présentant un intérêt particulier pour les usagers, ces données pourraient permettre aux GLAM d’élaborer de nouvelles offres de services axées sur la mobilisation en ligne. La collecte de données plus détaillées (p. ex. au moyen d’enquêtes répétées) sur la façon dont les usagers obtiennent des avantages éducatifs à la fois formels et informels pourrait être utile pour comprendre ces avantages à long terme. C’est particulièrement le cas de l’éducation informelle, où les études à long terme font défaut.

Si le Canada est un chef de file mondial pour ce qui est de reconnaître les répercussions des GLAM sur le bien-être, il pourrait aussi prêter davantage attention à la collecte de données de suivi sur la façon dont les visites améliorent la qualité de vie des usagers. Voilà qui compléterait la collecte de données à l’échelle nationale entreprise pour cette étude.

Enfin, il ne faut pas oublier les questions générales examinées par l’ AMC dans cette étude. Chaque GLAM pourrait examiner non seulement la note élevée (ou non) que les usagers accordent à un ensemble convenu d’attributs, mais aussi l’efficacité qu’il perçoit de ces attributs dans l’atteinte de ses objectifs et la façon dont ces notes se comparent aux perceptions des principaux intervenants. On pourrait ainsi évaluer si et/ou comment les GLAM s’acquittent de leur mandat et si les opinions des intervenants diffèrent systématiquement de celles des usagers.

Parallèlement, il ne faut pas négliger les limites de la présente étude ou de tout travail quantitatif. Certaines de ces limites sont décrites dans l’encadré ci-dessous.

Limites de la présente étude

Toute étude majeure portant sur une gamme de techniques d’estimation et de méthodes quantitatives présentera des limites. Voici quelques-unes des limites possibles liées à la présente étude :

  • Échantillon de la population – Tel qu’indiqué, la présente étude visait à obtenir un échantillon démographique représentatif de la population canadienne à partir de 2 045 participants en utilisant des quotas pour tenir compte de l’âge, du sexe, du niveau de scolarité atteint, de la langue officielle parlée et de la province. Un travail plus poussé aurait pu également viser à contrôler d’autres facteurs comme la situation d’emploi et le revenu (bien que ces questions démographiques aient été posées dans l’enquête, aucun échantillon par quota précis n’a été adopté). Toutefois, nous croyons que l’approche actuelle contrôle la plupart des principales variables démographiques d’intérêt. D’autres variables démographiques pourraient être fortement corrélées à celles déjà prises en considération (p. ex., le revenu pourrait être étroitement lié au niveau de scolarité).
  • Échantillon des établissements – Les données sur le coût du trajet et la modélisation en ligne provenaient notamment d’un certain nombre de GLAM répondant aux demandes de données, tel qu’indiqué ci-dessus. Vu le grand nombre de GLAM au Canada et le fait qu’il n’était manifestement pas possible d’inclure tous les GLAM dans cet échantillon, la question de la représentativité des données fournies peut être soulevée. Il convient toutefois de noter que l’analyse visait à remédier à cette situation en recueillant des données auprès du plus grand nombre de GLAM de taille et d’emplacement géographique possible à l’échelle du pays et, plus important encore, en combinant les données d’enquête nationales « descendantes » aux données « ascendantes » recueillies auprès de chaque établissement. Dans le cas des archives, l’ensemble de données a été complété par l’utilisation de données non publiées exhaustives fournies par la professeure Wendy Duff.
  • Évaluation du non-usage – Il existe une documentation abondante sur les approches utilisant une estimation des préférences déclarées pour déterminer la volonté de payer et les biais possibles de l’estimation. Certaines de ces approches sont décrites en détail dans le chapitre du présent rapport qui porte sur la valeur de non-usage. Comme nous l’avons mentionné dans ce chapitre, nous avons tenté de corriger ces biais en portant une attention particulière au libellé et à la présentation des questions. Néanmoins, comme cette évaluation est intrinsèquement subjective, le problème pourrait ne jamais être entièrement résolu. Une prochaine analyse pourrait se faire à l’aide de techniques plus avancées, comme la modélisation des choix, qui adoptent d’autres mesures pour résoudre le problème de biais des répondants.
  • Bibliothèques ne faisant pas partie du CBUC ou de l’ABRC – Il est possible de trouver des données fiables sur les bibliothèques du CBUC, mais l’information sur les bibliothèques ne faisant pas partie du CBUC est moins exhaustive, car elle est organisée en données provinciales présentant un niveau de détail diversifié. Comme mentionné précédemment dans la discussion sur l’évaluation des bibliothèques, les valeurs établies reposent donc sur les données des bibliothèques du CBUC, complétées par une estimation pour les bibliothèques ne faisant pas partie du CBUC. Il a ainsi été possible d’établir une estimation pour l’ensemble du secteur des bibliothèques publiques. En outre, comme mentionné, les estimations des bibliothèques universitaires reposent uniquement sur les données de l’ABRC car, malgré l’existence de données partielles, aucune information complète autre que celle de l’ABRC ne semble être disponible à l’échelle nationale. Les futurs efforts pourraient viser à résoudre ces problèmes de données et à améliorer les estimations faites dans le cadre de la présente étude.
  • Portée – La présente étude ne fait pas de distinction entre l’usage des GLAM par les Canadiens et les étrangers (p. ex., les touristes qui visitent les GLAM, les usagers étrangers du site Web des GLAM). L’usage des GLAM profite aux usagers, qu’ils soient résidents canadiens ou non. Cela dit, la plupart des coûts de soutien des GLAM sont assumés par la société canadienne. Nous sommes d’avis que les GLAM sont un avantage non seulement pour les Canadiens, mais aussi pour toute la société planétaire, de sorte que l’étude devrait avoir une portée mondiale. Toutefois, une approche plus restrictive aurait permis de limiter les avantages aux Canadiens et de les comparer aux coûts engagés par la société canadienne.

Comme pour toute recherche et tout travail empirique, les travaux futurs pourraient chercher à étendre les connaissances afin d’examiner ces limites plus en détail.

Enfin, il convient également de souligner que bon nombre des évaluations de la présente étude ont été élaborées en fonction de préférences individuelles, révélées (p. ex., au moyen de la MCT) ou déclarées (p. ex., valeur de non-usage). Cette façon de faire est conforme aux cadres économiques standards, qui soulignent l’importance de ces préférences pour évaluer les biens et les services et prendre des décisions. Néanmoins, il se peut que « le tout soit plus grand que la somme des parties ». Autrement dit, les GLAM peuvent offrir des avantages sociaux plus vastes que ce qu’une évaluation des préférences individuelles peut révéler. Certains de ces concepts ont été explorés dans les discussions du chapitre sur les avantages globaux du présent rapport, surtout ceux qui ont trait au capital social et aux retombées, notamment l’idée que la valeur des GLAM eux-mêmes puisse dépasser ce qu’un usager (ou un non-usager) peut percevoir.

Comme le laissent entendre ces discussions, si on veut explorer la valeur des GLAM dans tout son sens, il faut explorer les répercussions du mauvais fonctionnement de ceux-ci sur la société (comme l’étude de cas sur les archives présentée plus haut). Il est clair que cela peut avoir des répercussions sociales dommageables, même si personne ne peut en saisir pleinement l’ampleur sur le coup.

En revanche, les GLAM font partie intégrante du tissu social de toute société qui fonctionne bien. Par conséquent, comme l’indiquent les conclusions du présent rapport, leur préservation, leur promotion et leur développement devraient intéresser non seulement les travailleurs du secteur, mais aussi les citoyens et les décideurs.